"Les Diaboliques" : Christophe Barbier adapte au scalpel quatre contes cruels de Barbey d’Aurevilly sur scène
Le Bohneur dans le crime, Le Rideau cramoisi, La Vengeance d’une femme et Un dîner d’athées, quatre des six nouvelles des Diaboliques de Jules Barbey d’Aurevilly sont adaptées pour la scène par le critique et dramaturge Christophe Barbier. Mis en scène par Nicolas Briançon, avec trois comédiens et une comédienne, Les Diaboliques sont sur scène du mardi au dimanche 21h au Théâtre de Poche, à Paris.
En ouverture, Barbey d’Aurevilly se défend devant un juge invisible pour éviter un procès aux motifs d'atteintes aux bonnes mœurs et apologie du crime. Puis, il enchaîne la narration de quatre histoires pour argumenter sa défense. Une femme de chambre cache un double jeu, une fille introvertie se consume par amour, une femme se venge de son mari en se prostituant et un athée confesse à un prêtre d’avoir succombé à une femme fatale.
Élégante perversité
Tels sont les diaboliques retenus par Christophe Barbier. Chaque histoire est incarnée par un des quatre acteurs et actrices sur scène : Gabriel Le Doze, Magali Lange, Krystoff Fluder et Reynold de Gueyniveau. Grâce à la concision de l'adaptation nécessaire pour passer de l’écrit à l’oral, le spectateur n’en perd pas une goutte. La langue choisie d’Aurevilly, raffinée même dans l’abject, et travaillée par Christian Barbier, en restitue l’élégante perversité.
Cette charge est équilibrée par la sobriété de la mise en scène de Nicolas Briançon, tout en étant habitée d’atmosphère. La scène du "Poche" s’offre tel un écrin de velours noir, animé de volutes graphiques comme sorties de l’imagination d’un Gustave Doré. Les défroques sombres et sophistiquées des protagonistes les enveloppent des noirs desseins dont ils sont les pions.
Belle dame sans merci
Au centre de ces récits : la femme fatale, la "Belle dame sans merci" du poème de John Keats (1819), nimbée de mystère, qui avance à couvert, envoûtante et séductrice d’hommes bien trempés, désarmés devant l’extraordinaire, au sens étymologique du terme, hors norme.
Ces femmes "diaboliques" teinteraient de misogynie l’entreprise de Barbey d’Aurevilly. Mais ne serait-ce pas plutôt réhabiliter la femme que de lui attribuer cet autre pouvoir que la force physique identifiée à l’homme ? Ce pouvoir au-delà de la séduction l’affranchit du qualificatif peu amène de sexe faible, et les hommes en sont réduits à de simples pantins, exsangues.
Les Diaboliques
De Christophe Barbier, d'après Jules Barbey d’Aurevilly
Avec : Gabriel Le Doze, Magali Lange, Krystoff Fluder, Reynold de Gueyniveau,
Du mardi au dimanche 21h au Théâtre de Poche Montparnasse, 75014 Paris
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