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Paris : les théâtres privés, nouvelle manne des entrepreneurs

Ils sont promoteur immobilier, ex-fabriquant de pin's, ou producteur dans le show-business. Leur point commun : faire désormais des théâtres privés parisiens leur nouveau terrain de jeu et d'investissement, avec l'objectif assumé de les rentabiliser, en mettant au placard le complexe, si français, de faire de l'argent.
Article rédigé par franceinfo - Jacky Bornet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Le Théâtre des Variétés, sur le boulevard Montmartre, à Paris (IXe)
 (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

Hommes d’affaires
S'ils aiment le spectacle vivant, Jean-Manuel Bajen, Jean-Marc Dumontet et Jean-Claude Camus l'abordent en chef d'entreprise. "Nous allons chercher le client pour vendre notre produit », assume Jean-Manuel Bajun dans Le Figaro du 16 octobre. Celui-ci a racheté le Théâtre des Variétés à Jean-Paul Belmondo il y a huit ans, et a des visés sur d'autres salles, comme le Théâtre Hébertot, le Palace, le Théâtre de Paris ou le Comédia, tous en vente.

 

"Nous ne somme pas des artistes", ajoute-t-il. Ancien footballeur professionnel des Girondins de Bordeaux, reconverti dans l'immobilier, c'est en pragmatique qu'il investit. Ainsi est-il pratiquement le seul à être le propriétaire des murs de son théâtre, pour un coût de cinq millions d’euros. A son encontre, Jean-Claude Camus a, lui, racheté le bail du Théâtre de La Madeleine pour trois millions d’euros.

Le nerf de la guerre
Des sommes rondelettes auxquelles s’ajoutent les frais de mises aux normes de sécurité et de confort, d’un montant de  huit et six millions d’euros pour le Théâtre Saint-Martin et La Madeleine, qu’a dû sortir l’ancien producteur de Johnny Hallyday. Jean-Manuel Bajun ajoute de son côté qu’« il faut ensuite être capable de mettre un million d’euros sur la table à n’importe quel moment pour entretenir le lieu. On comprend qu’à ce prix là, la rentabilisation de la salle est le nerf de la guerre.

Sans oublier les salaires. Au théâtre des Variétés, le coût de l’entretien et des vingt-huit salariés est de 1 à 1,5 millions d’euros. Les budgets sont d’autre part variables selon les spectacles : décors, nombre de répétitions, publicité, cachets des comédiens… Pour retomber sur ses pattes, un spectacle n’a des chances d’être rentabilisé qu’à partir de quatre-vingt représentations.

 

Chacun a ses méthodes pour ne pas perdre pied. Jean-Marc Dumontet qui possède Le Point Virgule, le Grand Point Virgule et Bobino, ainsi que le Théâtre Antoine, associé à Laurent Ruquier, loue ainsi à TF1 Bobino pour « Danse avec les stars », programme une représentation pour enfants en matinée, puis les Vocapeople à 19h00 et Messmer, magicien, à 21h00. La multiplication des spectacles rentabilise l’occupation de la salle et touche des publics différents, tout en permettant de compenser un four éventuel. Les artistes sur scènes peuvent également être coproducteurs de leur spectacle, comme Dany Boon pour le « Dîner de cons » à La Madeleine, ou Chevalier et Laspalès pour « Les Menteurs », actuellement à La Porte Saint-Martin.

 

La cagnotte
La manne peut être au rendez-vous et quand ça paye, ça paye. « Le Songe d’une nuit d’été » de Shakespeare à fait un tabac à la Porte Saint-Martin, engrangeant un bénéfice de 1,3 million d’euros en 2012. La rentabilité de la salle depuis 2006 s’est concrétisée par 1,2 million de dividendes pour Jean-Claude Camus en 2010, 1,5 million en 2011 et 1,17 million en 2012, selon Le Figaro.

L’ancien producteur de Johnny s’en dit « le premier étonné », rapporte le quotidien. « Ma réussite dans la chanson comme au théâtre, vient du fait que je ne suis pas un artiste, mais je sais ce que je veux voir sur scène. Je suis le public ».

Jean-Marc Dumontet résume bien la situation : « Je ne me sens que chef d’entreprise, avec une obligation de rentabilité permanente ». Dont acte.
 

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