"Horace" : l'ombre de la radicalisation sur l'oeuvre de Corneille à Aix-en-Provence
Amour, devoir, patrie. Peut-on encore en mourir aujourd'hui au nom de l'honneur et de la patrie? "Horace" de Pierre Corneille évoque les problématiques récurrentes du dramaturge français. Les choix que chaque individu fait face à une situation qui mêle le pouvoir, la famille et les sentiments. Le metteur en scène marseillais Renaud Marie Leblanc s'empare de la tragédie de Corneille dans une vision très actuelle et dépouillée.
Reportage : J. Bertolotti / L. Esnault / M. Morand
"Horace ou la radicalisation extrême"
L’histoire des Horace et des Curiace est un drame absolu. Doit-on, pour servir son pays tuer son meilleur ami ? Ici, le fameux "choix cornélien" prend toute sa dimension. Le metteur en scène Renaud Marie Leblanc s'empare de la confrontation entre les deux familles et la fait résonner avec la sombre actualité mondiale. La pièce du dramaturge du XVIIe siècle, réactualisée avec les codes actuels, plonge le spectateur dans un présent tragique. "Aujourd'hui on a la radicalisation, Daesh, les attentats, la pièce parle de tout cela. Le personnage d'Horace se radicalise et va devenir de plus en plus national extrémiste".Le choix de la mort et de la lâcheté
Beaucoup plus rarement jouée que "Le Cid", cette tragédie est l'une des plus belles pièces de Corneille. Plus audacieux que Rodrigue, le personnage d'Horace fascine par son pouvoir de manipulation. "On a le choix entre deux choix possibles et aucun n'est bon, donc on fait le choix du moins pire .... C’est très politique", conclut le metteur en scène.
"Horace" - Tragédie de Pierre Corneille créée en 1640 à Paris
En guerre, Rome et Albe résolvent de confier leur destinée à trois champions pris de part et d'autre. Le hasard désigne les trois frères Horace pour les Romains, les trois frères Curiace pour les Albins. Si du côté des Curiace on se lamente sur le destin cruel qui les contraint à oublier l’amitié, Horace sans état d’âme choisit l’intérêt de son pays. Lors du combat, les trois Curiace sont blessés, deux Horace sont tués, le troisième traque les blessés et les tue. De retour chez lui, Horace doit affronter les reproches de sa soeur Camille qui pleure son bien aimé Curiace assassiné. Mais que pèse l’amour fraternel devant la ferveur patriotique ! Horace tue Camille, celui qui élit l’honneur et l’intérêt de sa patrie au détriment de tout le reste, celui-là est un héros et le héros ira au paradis avec la bénédiction du père. Venue du fond des siècles, l’histoire des Horace et des Curiace, comme inscrite dans notre patrimoine intellectuel, même si on n’a jamais lu Corneille, vient se cogner dans notre histoire immédiate comme une peste brune.
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