"Rapt" à la Comédie de Reims : Chloé Dabert sur un fil entre réalité et fiction

On entre dans cette pièce comme dans un labyrinthe peuplé de poupées russes. Il est question d'un texte de l'Anglaise Lucy Kirkwood, interdit en Grande-Bretagne, comme frappé du sceau secret-défense. Puis d'une autre auteure, Lucie Boisdamour, prenant le relais pour nous dire une vérité cachée.

Voilà les faits: entre 2011 et 2021, Noah et Celeste Quilter se sont aimés, ont eu un enfant, on les a retrouvés morts par balle chez eux. Noah et Celeste sont persuadés d'être écoutés, harcelés d'appels anonymes, leur voisin est bizarre, pourquoi ? "On ne sait pas, dit la metteuse en scène Chloé Dabert, on entre dans l'histoire, puis on oublie tout, on entre dans leur vie, on se fait choper. C'est hyperactuel, sans être donneur de leçon ou moralisateur ni manichéen ou pamphlétaire. Nous, ça nous a passionnés, on a eu énormément de débats, le texte alimente la pensée."

"Si le spectacle suscite des débats, c'est qu'il est réussi."

Chloé Dabert

à franceinfo

Sur scène, la maison du couple, des images projetées, des articles de presse, des discussions sur des forums et ce climat pesant de paranoïa aux relents complotistes. Une narratrice, la formidable Anne-Lise Heimburger, donne corps au récit ; Andréa El Azan et Arthur Verret incarnent le couple avec force.

"C'est quoi ce truc ?", se demandent les spectateurs perdus entre réalité et fiction, "qui manipule qui ?" En fait on assiste à un concentré des enjeux de l'époque, fake news, vérité parallèle, magie du théâtre, la pièce atteint sa cible : "Je pense surtout aux jeunes pour qui ça doit vraiment être difficile, confie Chloé Dabert. Ça pose aussi la question de leur libre-arbitre, il y a plein de jeunes qui s'informent sur TikTok ou des réseaux. C'est une autrice qui à la force de soulever des doutes et des questionnements et faire que les spectateurs vont réfléchir, discuter. Si le spectacle suscite ça, c'est qu'il est réussi."

Mais pour connaître la vérité... il faut aller le voir.

Rapt de Chloé Dabert à la Comédie de Reims jusqu'au 21 décembre et au 104 à Paris du 24 au 29 janvier.