Semaine d’art en Avignon : dans "Le Tambour de soie", la danseuse Kaori Ito fait battre le cœur du public
La danseuse Kaori Ito et le comédien Yoshi Oïda, interprète emblématique de Peter Brook, modernisent un classique du théâtre nô. Magnifique.
Devant la Chapelle des Pénitents blancs à Avignon, une file d’attente s’allonge toujours alors que la salle est déjà bien pleine. Le Tambour de soie de Kaori Ito et Yoshi Oïda est un des petits bijoux de cette Semaine d’art en Avignon, qui nous permet de découvrir quelques-uns des spectacles annulés en juillet pour cause de Covid.
C’est à Jean-Claude Carrière que Yoshi Oïda a confié l’adaptation de cette histoire de désir, de culpabilité et de transmission entre une jeune femme qui se sent vieillir et un vieil homme qui se sent encore jeune. Cet homme balaye le plateau d’un théâtre et tombe en admiration devant une danseuse qui répète un spectacle avec son musicien. Elle lui promet d’être à lui s’il parvient à faire sonner le tambour de soie.
Une danseuse séduit un vieil homme
Kaori Ito, silhouette gracile et tout le charme et l’espièglerie qu’on lui connaît, incarne cette danseuse qui séduit le vieil homme, joué avec une juvénilité surprenant par Yoshi Oïda, 87 ans, inoubliable compagnon de route de Peter Brook (La Tempête, Le Maharabata…).
"C’est la première fois que je danse en kimono sur un texte traditionnel, nous dira Kaori à l’issue du spectacle, j’ai eu besoin d’éprouver en France mon identité sans passer par les stéréotypes japonais. Aujourd’hui, j’y reviens pour ne pas être touriste de ma propre culture".
C’est par une danse beaucoup plus suggestive que la danseuse et le vieil homme commencent par se découvrir : elle vibrante de tout son corps, lui timide, emprunté et pudique. Et c’est peu à peu, pour chacun d’entre eux, une découverte du corps de l’autre, une union dans un même souffle. Le vieil homme résigné se redresse, prend confiance, semble croire à un clin d’œil du destin.
Défi irréalisable
Mais il y a, posé au centre de la scène, ce tambour en forme de sablier, symbole du défi irréalisable lancé par la danseuse qui n’a pas su trouver les mots pour décliner les avances du vieil homme. Le drame pointe alors qui convoquera les univers parallèles chers à la société japonaise…
Sur la scène, un long rideau de soie comme une cascade, et les instruments traditionnels du musicien Makoto Yabuki : tambour, flûtes, xylophone en bambou…La mise en scène au cordeau réunit en symbiose la musique et la danse.
Grâce à la complicité avec Yoshi Oïda, son deuxième père comme elle l’appelle, le conte cruel se transforme en une histoire universelle de transmission.
Kaori Ito qu’on avait découverte dans Iris de Decouflé, en passant par Plexus d’Aurélien Bory ou les spectacles de James Thierrée et d’Alain Platel, multiplie depuis quelques années les créations personnelles avec sa propre compagnie. Cet automne voit les six à l’affiche dont Embrase-moi qu’elle danse nue avec son compagnon circassien Théo Touvet ou Chers, spectacles pour six interprètes sur le thème des ancêtres.
"Un spectacle 10 étoiles"
En découvrant Tambour de soie, on pense au spectacle où Kaori dansait avec un autre vieil homme, son père avec qui elle se réconciliait dans Je danse parce que je me méfie des mots (2015).
"Le Tambour de soie, un Nô moderne"
Mise en scène de Kaori Ito et Yoshi Oïda
Semaine d'art en Avignon
Du 23 au 26 octobre à 14H
Chapelle des Pénitents blancs
Place de la Principal, 84000, Avignon
Puis en tournée :
Du 29 octobre au 1 novembre 2020 Paris – Théâtre de la Ville
Du 17 au 18 novembre 2020 Amiens – Maison de la Culture d'Amiens
Le 26 février 2021 Agen – Théâtre Ducourneau
Du 21 au 25 avril 2021 Renens – Théâtre Kléber-Méleau
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