"Sur la route de Madison" : Clémentine Célarié bouleverse Avignon
Rencontre avec Clémentine Célarié à Avignon :
Préparez vos mouchoirs. A moins que vous soyez d'un cynisme à toute épreuve ou doté d'un coeur en béton armé, cette pièce vous laissera forcément la gorge nouée et les yeux embués de larmes. D'abord parce que le roman culte de Robert James Waller (décédé il y a quelques mois) est sans doute l'une des plus belles histoires d'amour écrites au 20e siècle.
Ensuite, parce que ses deux interprètes, Clémentine Célarié et Jean-Pierre Bouvier, ont tellement de talent qu'ils nous font oublier Meryl Streep et Clint Eastwood qui ont incarné avant eux les personnages de Francesca Johnson et Robert Kincaid, dans le film sorti en 1995.
"C'est une aventure démente !"
Pas facile, pourtant, de passer après les deux monstres sacrés qui ont marqué ces rôles de leur empreinte et de s'attaquer à une pièce aussi forte émotionnellement. "Effectivement, c'est monstrueux !" reconnaît Clémentine Célarié, "c'est une aventure démente mais c'est ça qui est intéressant. Je ne pense pas à Meryl Streep, bien que je lui aie piqué quelques gestes qu'elle fait dans le film, comme fermer la porte du frigo avec le pied... Je me dis qu'elle ne m'en voudrait pas si elle me voyait !"Clémentine Célarié magistrale
Clémentine Célarié ne joue pas Francesca, elle est Francesca. "Moi, j'ai besoin de tomber amoureuse d'un personnage pour avoir envie de l'incarner" confie-t-elle. "J'aime cette femme, elle est merveilleuse". Tout comme les spectateurs, la comédienne semble totalement bouleversée par la passion dévorante que vit son personnage. Lorsqu'elle doit laisser repartir l'homme qu'elle n'a connu que quelques jours mais qui restera pour toujours l'amour de sa vie, elle pleure à chaudes larmes, pour de vrai. Et quand elle vient saluer le public qui applaudit à tout rompre, elle pleure encore, comme dépassée par les émotions qui la submergent."C'est un très beau rôle" poursuit l'actrice, "j'ai beaucoup de chance, je remercie le ciel tous les jours d'avoir un rôle comme ça. Je pense que c'est l'un des plus forts que j'ai joués. C'est une grande montagne pour moi, c'est pour ça que j'ai mal au ventre comme jamais avant de monter en scène ! Mais il faut y aller à fond, sinon il ne se passe rien. J'ai toujours voulu ça : un rôle dans lequel on met ses tripes sur la scène."
Un moment magique
On a envie de la remercier pour ce moment magique et hors du temps qu'on vient de passer et qui nous a totalement fait oublier que nous étions au théâtre, dans l'univers de l'illusion et des faux-semblants. Pendant 1h30, nous étions dans l'intimité de Francesca et Robert, dans la chaleur étouffante de cet été 1965, au fin fond de l'Iowa, où l'on se rafraîchit à coups de thé glacé fait maison.Précisons tout de même que si Clémentine Célarié est si exceptionnelle, c'est aussi grâce à son partenaire, Jean-Pierre Bouvier, qui lui renvoie la balle avec brio dans le rôle de Robert Kincaid, le baroudeur qui ne vit que pour les voyages mais qui serait prêt à poser ses valises pour cette femme. C'est d'ailleurs en le voyant au théâtre dans "La version Browning" que la comédienne a eu un coup de coeur et lui a proposé de jouer une pièce tous les deux. Et le talent est héréditaire dans la famille Bouvier puisque la mise en scène est signée Anne Bouvier, la fille de Jean-Pierre, qui avait déjà dirigé Clémentine Célarié l'an dernier à Avignon dans "Darius".
Le théâtre du Chêne noir, lieu pourtant emblématique d'Avignon, n'avait quasiment jamais connu un tel engouement. La pièce fait salle comble tous les soirs et le public finit debout pour saluer cette prestation. Nul doute que les programmateurs vont se bousculer pour que cette "Route de Madison" passe par leur théâtre. On devrait donc bientôt pouvoir l'applaudir un peu partout, à Paris comme en province.
Longue vie à Francesca et Robert !
L'HISTOIRE
Francesca Johnson est une mère de famille qui mène une vie paisible dans l'Iowa. Un jour de l'été 1965, alors que son mari et ses enfants sont partis à une foire aux bestiaux dans l'Illinois, elle croise la route de Robert Kincaid, reporter chargé de photographier les ponts du comté de Madison pour le "National Geographic". Dès leur premier regard, ils savent qu’ils sont faits l’un pour l’autre mais ne disposent que de quelques jours pour se découvrir et vivre cette passion, secrète et sans espoir, presque mystique, dont le souvenir deviendra leur raison de vivre.
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