"Un sentiment de vie" aux Bouffes du Nord : tout le monde n’a pas la chance d’avoir un père colonialiste et une mère communiste

Seule en scène, la comédienne Valérie Dréville brille au théâtre des Bouffes du Nord dans "Un sentiment de vie", un texte original de Claudine Galea. Vulnérable et puissante.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
Valérie Dréville au théâtre des Bouffes du Nord, à Paris. (JEAN-LOUIS FERNANDEZ)

Les petites histoires, la grande Histoire, la transmission intergénérationnelle, les difficultés de la création artistique, Frank Sinatra, la radio… Un sentiment de vie ne se résume pas mais se vit au théâtre parisien des Bouffes du Nord avec une Valérie Dréville impressionnante de finesse et de subtilité, de rage et de tendresse. Vulnérable et puissante. Seule, face au public, dans un décor dépouillé, nu, Valérie Dréville impressionne dans l’incarnation du texte de Claudine Galea qui explore le lien invisible entre le passé qui refuse de se décomposer et le présent incertain. Avec tendresse, est exploré ce passé douloureux, celui de l’écrivaine qui a grandi entre un père né en Algérie, militaire ayant participé à la Seconde Guerre mondiale, à l’Indochine et une mère française et anticolonialiste.

 

Frank Sinatra, la radio et l’écrivaine

 

Un sentiment de vie est un objet textuel non identifié, un texte qui s’articule autour de trois parties : My secret garden, My way et This is (not the end). Dans la deuxième partie, la plus personnelle et certainement la plus émouvante, Valérie Dréville dialogue avec son père mourant dans une voiture avec Frank Sinatra en fond sonore. Des non-dits prennent vie. Et c’est là que réside la complexité de la relation père fille qui se situe aussi bien dans la sphère privée que dans un contexte plus global. Entre ce père qui n’a jamais dit « je t’aime » et la fille qui ne partage pas les choix politiques de son géniteur. "L’histoire n’est pas normale". Aucune histoire, en majuscule ou en minuscule. Et c’est là aussi qu’on voit toute la finesse de jeu de Valérie Dréville qui arrive à faire passer des émotions enfouies avec une grande pudeur. Et fragilité.

 

Valérie Dréville au théâtre des Bouffes du Nord, à Paris. (JEAN-LOUIS FERNANDEZ)

Au dialogue entre le père et la fille viennent se juxtaposer des hommages et remerciements à des écrivains et des artistes, comme Nina Simone. Le rapport à la création et à l’écriture est comme un fil rouge.  Un sentiment de vie est une expérience théâtrale qui s’affranchit de la forme, avec une mise en scène épurée signée Emilie Charriot.  

 (L'art du débutant, Valérie Dréville, Actes Sud, 20 euros) 

Fiche technique

Titre : Un sentiment de vie

Texte : Claudine Galea

Mise en scène : Émilie Charriot

Assistanat mise en scène : Olivia Barron
Lumière : Edouard Hugli
Costumes : Émilie Loiseau
Régie lumière : Alexy Carruba

Distribution : Valérie Dréville

Durée : 1h10

Dates : Jusqu’au 27 janvier

Lieu : Bouffes du Nord, 37 bis, boulevard de La Chapelle, 75010 Paris

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