Quatre fois où Jean-Pierre Elkabbach a fait scandale à Europe 1
La direction de Canal+ a annoncé mercredi que l'infatigable journaliste, évincé de la matinale d'Europe 1, va rejoindre i-Télé pour préparer la nouvelle formule de la chaîne.
Mais quand Jean-Pierre Elkabbach raccrochera-t-il donc les gants ? Dans un communiqué publié mercredi 11 janvier, la direction de Canal+ a annoncé l'arrivée du journaliste de 79 ans sur l'antenne d'i-Télé. Evincé au début de l'année de l'interview politique matinale d'Europe 1, il sera chargé de préparer le lancement de la nouvelle formule de la chaîne d'information, baptisée CNews.
L'ancien président de France 2 et France 3 assurera également des "interviews politiques et de grands entretiens", tout en conseillant son nouvel employeur "pour son développement".
Jean-Pierre Elkabbach est également nommé conseiller auprès de la Direction Générale du Groupe Vivendi/CANAL pour son développement.
— Groupe CANAL+ (@canalplusgroupe) 11 janvier 2017
Entré en 1982 à Europe 1, Jean-Pierre Elkabbach a pris les commandes de l'interview politique de la station de la rue François-Ier en 1987. Depuis, il a été au centre de plusieurs polémiques, souvent liées à ses amitiés politiques supposées. Florilège non exhaustif.
Quand il a demandé l'avis de Nicolas Sarkozy avant de recruter un journaliste
L'affaire remonte au début de l'année 2006. La journaliste Caroline Roux, chargée du suivi de la droite à Europe 1, est en partance pour Canal+. Le Canard enchaîné révèle que pour la remplacer, Jean-Pierre Elkabbach a demandé l'avis de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur et président de l'UMP. Contacté par l'hebdomadaire, le journaliste, alors directeur d'Europe 1, assume.
C'est la démarche classique de tout chef d'entreprise pour choisir les meilleurs, les plus libres et les plus indépendants
Jean-Pierre Elkabbachau Canard enchaîné
"J'ai dit à Nicolas Sarkozy : 'Est-ce que tu connais, dans la nouvelle génération qui émerge, qui sont les meilleurs ?' Il m'a donné deux ou trois noms qui étaient déjà dans ma liste…", indique-t-il encore. Et d'assurer que cette discussion a eu lieu dans un souci d'indépendance éditoriale, car les noms proposés par le ministre "ne seront pas retenus".
Cette argument ne convainc pas la rédaction d'Europe 1, qui demande à rencontrer le directeur pour régler le problème, rapporte à l'époque Libération. C'est finalement le journaliste Karim Rissouli, qui officiait déjà comme reporter au sein de la station, qui est choisi pour renforcer le service politique.
Quand il a fait un lapsus pour parler de l'UMP
La scène est racontée dans le livre Profession : Elkabbach, publié en 2009 aux éditions du Moment par le journaliste Vincent Quivy. Alors que l'élection présidentielle approche, Jean-Pierre Elkabbach reçoit au micro d'Europe 1, le 28 janvier 2007, le socialiste Jean-Louis Bianco.
L'élu, proche de Ségolène Royal, s'indigne au micro du fait que Nicolas Sarkozy se soit approprié la figure de Jean Jaurès dans un discours. Et de critiquer "l'inspirateur" présumé de ce coup politique : Frank Tapiro, alors conseiller en communication du candidat de la droite. L'échange qui suit "a laissé des traces dans les mémoires des journalistes de la station", écrit l'auteur du livre.
Jean-Pierre Elkabbach : "Oui, mais enfin, notre inspirateur, ce n'est pas monsieur..."
Jean-Louis Bianco : "C'est l'inspirateur..."
Jean-Pierre Elkabbach : "Comment il s'appelle ?"
Jean-Louis Bianco : "Tapiro !"
Jean-Pierre Elkabbach : "Non, ce n'est pas notre inspirateur."
Jean-Louis Bianco : "Mais pourquoi vous dites 'notre' inspirateur ?"
Jean-Pierre Elkabbach : "Ce n'est pas nos... nos... On n'a pas besoin..."
Jean-Louis Bianco : "Vous n'êtes pas de l'UMP, Jean-Pierre Elkabbach !"
Jean-Pierre Elkabbach : "Non, non, ni à l'UMP, ni..."
Jean-Louis Bianco : "'Notre' inspirateur…"
Quand il a "tué" par erreur Pascal Sevran
Lundi 21 avril 2008. Lors du journal de 19 heures, Europe 1 annonce en exclusivité la mort de l'animateur de France 2 Pascal Sevran, avant de démentir l'information dix minutes plus tard. L'erreur ne provient pas d'un journaliste inexpérimenté, mais du directeur de la radio : Jean-Pierre Elkabbach.
Libération explique alors que le journaliste avait appelé sa rédaction aux alentours de 18h50 pour annoncer ce scoop. Devant l'impossibilité de confirmer l'information, les journalistes de la station préfèrent être prudents, mais Jean-Pierre Elkabbach rappelle deux minutes avant le journal et "confirme".
Le lendemain, le patron d'Europe 1 prend la parole devant sa rédaction et déclare "assumer personnellement une erreur collective". Devant la gronde des journalistes, il finit par reconnaître sa responsabilité. Il sera remplacé en juin par Alexandre Bompard, mais gardera en mains l'interview politique de la station.
Quand il s'est ouvertement moqué de Bruno Le Maire
Cet esclandre aura-t-il été celui de trop ? Lors du troisième débat entre les candidats à la primaire de la droite, diffusé par France 2 et Europe 1 jeudi 17 novembre, Jean-Pierre Elkabbach a fait polémique en raillant ouvertement la candidature de Bruno Le Maire. Alors que l'ancien ministre de l'Agriculture vantait les mérites du "renouveau" en politique, le journaliste l'a interrompu.
Jean-Pierre Elkabbach : "Pourquoi ça ne fonctionne pas avec vous ?"
Bruno Le Maire : "Mais qu'est-ce qui vous dit, Jean-Pierre Elkabbach, que ça ne va pas fonctionner ? Vous connaissez déjà le résultat de dimanche ? Vous savez ce que vont voter les Français ? (...)"
Jean-Pierre Elkabbach : "On en parlera lundi matin..."
Bruno Le Maire : "Monsieur Elkabbach, je suis candidat à la primaire, ça mérite tout simplement le respect de votre part, et je n'ai pas à recevoir de leçons sur ma candidature. Ce sont les Français qui jugeront, ce n'est pas vous."
Le diagnostic de Jean-Pierre Elkabbach n'aura finalement pas été incorrect. Cela n'a pas empêché de nombreux journalistes de se plaindre de sa prestation (et de son âge) sur les réseaux sociaux.
On dira ce qu'on voudra, J-P. Elkabbach, sans Georges Marchais ni Raymond Barre, c'est plus ce que c'était#PrimaireLeDebat#C'étaitmieuxavant
— Renaud Dély (@RenaudDely) 17 novembre 2016
Je trouve JP Elkabbach plus en forme que lors du débat entre René Coty et Guy Mollet. #PrimaireLeDebat
— Pierre Courade (@PierreCourade) 17 novembre 2016
Avouons qu'on a connu Elkabbach plus mordant. Je me souviens de son interview de Ravaillac après l'assassinat d'Henri IV, c'était aut'chose.
— Benoît Gallerey (@bengallerey) 17 novembre 2016
Un peu plus de trois semaines plus tard, Europe 1 annoncera la fin des interviews politiques matinales de Jean-Pierre Elkabbach.
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