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"Quand t'as trop de succès, on te tombe dessus" : les fanzouzes de "TPMP" soutiennent Hanouna plus que jamais

Franceinfo a discrètement assisté au tournage de l'émission-phare de C8, jeudi soir, au lendemain des sanctions infligées à la chaîne par le CSA.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Cyril Hanouna, animateur de l'émission "Touche pas à mon poste", sur C8, sort de sa convocation au secrétariat d'Etat de l'égalite entre les femmes et les hommes, à Paris, le 31 mai 2017. (MAXPPP)

"Cyril est chaud ce soir. Vraiment très chaud." Quelques minutes avant le début de l'émission "Touche pas à mon poste", Eric Mendes, chauffeur de salle, annonce la couleur, jeudi 8 juin. Au lendemain des sanctions infligées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) à la chaîne C8, il fait une mise au point avec les quelque 150 personnes présentes sur ce plateau de la Canal Factory, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), où franceinfo s'est fait une place incognito dans le public. 

"Ça va nous coûter beaucoup d'argent"

"Il y a des sanctions du CSA. Ça va nous coûter beaucoup d'argent : 200 000 euros, voire 300 000 euros par jour", détaille avec un air grave celui qui dansait et "dabbait" peu avant pour assurer le spectacle. "C'est des jaloux !", lance au premier rang une femme d'une cinquantaine d'années à qui il manque quelques dents, et qui a fait la route depuis la région de Charleville-Mézières (Ardennes). "Cyril a besoin que vous soyez chauds aussi, comme ça il sera encore plus chaud. Okay ?", poursuit Eric Mendes. Et de relancer : "Mais on est là pour passer un bon moment. Amusez-vous !"

Une très large partie de l'émission, ce soir-là, est consacrée à la décision du CSA. Le Conseil a interdit à la chaîne C8 "de diffuser des séquences publicitaires pendant cette émission, ainsi que 15 minutes avant et 15 minutes après sa diffusion", pour une durée de trois semaines au cours du mois de juin. L'animateur avait prévenu les fanzouzes (les supporters de l'animateur) sur les réseaux sociaux, avec notamment un détournement d'une chanson de Diam's, faisant référence à Olivier Schrameck, le président du CSA.

Au fil des tours de table, les chroniqueurs s'indignent. Géraldine Maillet s'insurge contre une "curie médiatique", "une sorte de vindicte (...) du microcosme parisien, du bon goût contre le mauvais goût". Catherine Laborde critique la "pudibonderie actuelle". Gilles Verdez y voit une décision de "bobos parisiens" qui fréquentent "les hauts milieux". Isabelle Morini-Bosc condamne un "acharnement des médias", qui ont "chauffé à blanc" l'instance.

"Il y a des propos négationnistes, xénophobes et racistes qui ont été diffusés sur les antennes de radio et de télé depuis une dizaine d'années qui n'ont jamais été sanctionnés par le CSA. Jamais !", affirme Renaud Revel, journaliste spécialiste des médias, invité de l'émission. Cyril Hanouna lance alors une séquence où s'enchaînent des archives des propos ou des gestes qui n'ont pas été épinglés. Parmi eux, les propos de Thierry Roland sur les Sud-Coréens, les mots crus de Serge Gainsbourg à Whitney Houston ou encore Rocco Siffredi qui agresse Cécile de Ménibus en plein direct. Finalement, "Baba" se dit victime d'une injustice.

Monsieur Schrameck, le président du CSA, s'est focalisé sur 'TPMP', je pense, et sur le groupe Canal+.

Cyril Hanouna

dans "Touche pas à mon poste"

Estimant le montant de la sanction à "5 à 6 millions d'euros" pour C8, Cyril Hanouna fait une proposition : "Moi, j'aurais préféré qu'on garde les pubs et qu'on les reverse à des associations (...) Je trouve que cette sanction, c'est n'importe quoi. Au moins que ça serve à quelqu'un." Et de s'adresser directement au gendarme de l'audiovisuel français : "Si le CSA nous regarde, franchement, pourquoi on ne ferait pas ça ?"

"C'était moins drôle que d'habitude"

A la sortie, vers 21h30, les supporteurs de "Baba" ont les traits tirés. La faute à un tournage long de quatre heures (pour "Il en pense quoi Camille ?" puis "Touche pas à mon poste"), une certaine chaleur sur le plateau et le lointain souvenir du seul gobelet d'eau distribué sur le plateau. Les ventres gargouillent. Bref, chacun cherche un endroit où manger ou souhaite rentrer au plus vite chez soi.

Ils ont également une petite mine parce qu'ils sont légèrement déçus par la teneur de l'émission, pour laquelle ils ont parfois réservé jusqu'à deux semaines en avance. "C'était moins drôle que d'habitude", juge un homme âgé d'une vingtaine d'années vêtu d'une chemise, comme le recommandent les annonces, et qui venait pour la première fois dans le public. "C'était bien quand même, de voir comment ça se passait en vrai sur le plateau", tempère un autre, un peu plus loin, qui assistait également à l'émission pour la première fois. Certaines personnes interrogées par franceinfo n'étaient pas au courant de la polémique avec le CSA et en ont été informées en direct : "On l'a appris sur le coup", racontent trois adolescents en survêtement, qui se demandent où se restaurer, en fumant une cigarette. "L'émission n'a tourné qu'autour de ça [les sanctions du CSA]. C'était lourd comme ambiance (...) A un moment, ça m'a saoulé, tranche un jeune homme debout à l'entrée du métro le plus proche, en attendant que son ami termine son appel. Après, ils ont vraiment traité le sujet."

"Le succès, ça plaît pas"

Si l'émission du jour était moins rigolarde que d'habitude, la démonstration de Cyril Hanouna sur la supposée disproportion de la sanction du CSA a fonctionné. "C'est abusé. Quand on voit ce qu'ont fait les autres avant, c'était 1 000 fois pire", réagit l'un des trois adolescents en quête d'un lieu où dîner. "Ah ouais, quand l'autre disait qu'il [Serge Gainsbourg] voulait la baiser [Whitney Houston] !", s'exclame l'un de ses camarades.

"Il y a pire que 'Touche pas à mon poste' à la télévision, comme les émissions de téléréalité, selon un trentenaire habillé d'une chemisette à carreaux et venu en couple. Il revient sur la séquence où l'animateur a posé la main de Capucine Anav sur son sexe : "Ils sont entre potes, ils se connaissent. C'est comme si nous, entre amis, ça partait en vrille. Sauf que là, ils oublient qu'ils sont à la télévison, qu'ils sont filmés."

Sur Twitter, les avis sont plus modérés. A la question "Avez-vous été choqués par la sanction du CSA ?", les résultats sont à 50-50, après quelque 3 580 votes.

Le jeune homme qui a trouvé l'ambiance lourde pense avoir deviné la raison de ces sanctions jugées trop sévères. "C'est le revers de la médaille. Quand tu pètes les audiences des autres, que tu 'fais chier' le PAF [paysage audiovisuel français], voilà...", analyse-t-il en haussant les épaules.

Un point de vue partagé par un adolescent interpellé par Cyril Hanouna à la fin de l'émission en raison de sa coupe de cheveux et de leur couleur (raie au milieu, racines brunes et longueur décolorée). "C'est la rançon de la gloire : le succès, ça plaît pas. Quand t'as trop de succès, on te tombe dessus", lance-t-il. Et pour lui, contrairement à ce qu'a dit le chaffeur de salle, Cyril Hanouna n'était pas spécialement "chaud" ce soir. "Il doit dire ça tout le temps", balaye-t-il, soulignant toutefois avoir décelé une émotion certaine chez l'animateur pendant l'émission : "A chaque fois qu'il parlait, il avait les larmes aux yeux."

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