Diablo III : le diable est dans les étals
Mardi, des millions de joueurs ont découvert Diablo III, troisième volume du jeu vidéo culte de Blizzard. Louis-Ferdinand Sébum, du magazine "Canard PC", nous explique pourquoi les gamers trépignent.
Lundi 14 mai, minuit moins quelques minutes. Des millions de joueurs à travers le monde bouillonnent d'impatience devant leur écran d'ordinateur. Dans quelques poignées de secondes, ils pourront jouer à Diablo III. Pourquoi une telle agitation ? Parce que le premier volume est sorti en 1997, la suite en 2000, mais qu'il a fallu attendre… douze ans pour que le troisième voie le jour. Son développeur, Blizzard Entertainment, a pris son temps pour le peaufiner. Il a les moyens, ses autres produits sont des cartons mondiaux. World of Warcraft et StarCraft sont en effet les plus grosses licences de jeu massivement multijoueurs. Excusez du peu.
Diablo, c'est un jeu de hack'n'slash, comprendre : trancher du démon à la pelle, pour gagner de l'expérience, des armes ou bien des sorts. Le joueur choisit sa classe (barbare, nécromancien, ensorceleuse…) et la conserve jusqu'à la fin de sa quête, qui consiste à libérer le monde des forces du mal, dans un univers infernal immersif. Le premier volume a bouleversé le genre en y introduisant le principe du point-and-click, où l'on déplace son personnage à la souris et où il suffit de cliquer sur un ennemi pour lancer une attaque.
C'est aussi le premier jeu PC de nombreux "gamers". Louis-Ferdinand Sébum, du bimensuel spécialisé Canard PC, nous explique pourquoi Diablo fait trépigner les joueurs.
FTVi : Qu'est-ce que ça représente pour vous, Diablo ?
Louis-Ferdinand Sébum : Pour moi, Diablo, c'est le premier jeu vidéo de l'ère "moderne". Il faut dire qu'à l'époque, la plupart des jeux sur CD-ROM n'avaient pas beaucoup d'intérêt : les développeurs se contentaient de ressortir des jeux déjà disponibles sur disquette en y ajoutant des voix digitalisées, ou bien en les bourrant de cinématiques [extraits vidéo] jusqu'à ce qu'ils ressemblent plus à des films interactifs qu'à des jeux. Diablo, avec ses graphismes très impressionnants pour l'époque et son ambiance – sonore, entre autres – presque inégalée encore aujourd'hui, a montré ce qui était possible quand on disposait de 650 Mo de données.
De façon plus générale, si on doit réfléchir à la place de Diablo dans l'histoire du jeu vidéo – si tant est qu'une chose aussi grotesque que "l'histoire du jeu vidéo" existe –, on peut le voir comme la synthèse de ce qu'il a de plus moderne, avec un gameplay pensé pour être accessible avec emphase sur l'ambiance, la narration et le mode de jeu, et de plus classique, avec l'exploration ad nauseam de donjons générés aléatoirement, comme dans les premiers jeux de rôle des années 80.
Qu'est-ce qui fait le succès de cette série ?
Son accessibilité. D'autres types de jeux demandent un peu d'entraînement. Il faut passer par une phase d'apprentissage avant d'être assez bon pour y prendre du plaisir. Ceux comme Diablo sont immédiatement accessibles même pour quelqu'un qui n'a pas l'habitude des jeux vidéo : cliquer sur un monstre pour le tuer, cliquer sur l'objet qu'il a laissé tomber en mourant pour le ramasser… Des mécanismes simples, mais surtout terriblement addictifs, avec un côté "casino" : on se dit toujours que le prochain monstre pourra laisser tomber l'objet magique dont on rêve, et on continue à jouer avec cet espoir en tête.
Pourquoi ce troisième volume est-il si attendu ?
Parce que malgré leur simplicité – ou en raison de leur simplicité, justement –, les mécanismes du hack'n'slash demandent beaucoup de talent aux équipes de développement. Un jeu aussi simple que "cliquer pour tuer" peut vite devenir lassant ou répétitif. Les Diablo sont parmi les seuls du genre à avoir su rendre intéressant ce gameplay extrêmement primitif. La plupart des hack'n'slash sortis depuis Diablo II sont horriblement ennuyeux, raison pour laquelle les gens ont continué à attendre Diablo III comme le messie.
Qu'avez-vous pensé de la communication de Blizzard autour du jeu ?
Ça va paraître méchant, mais ce qui m'a le plus marqué est l'impression que les développeurs ne savaient pas trop où ils allaient. Depuis le début de la bêta, commencée en octobre dernier, alors que le contenu du jeu était totalement terminé, Blizzard a changé deux ou trois fois des mécanismes extrêmement importants (dégâts des sorts, objets non-magiques…), le genre de décisions dont on aurait pu penser qu'elles étaient arrêtées depuis le début du développement. Heureusement pour eux, et pour nous, le résultat final ne semble pas à l'image de ce développement chaotique.
Vous avez commencé à y jouer, alors, ça valait le coup d'attendre ?
Je n'ai passé que quatre heures sur le jeu pour l'instant, pas assez pour pouvoir rendre un jugement définitif, mais pour le moment, Diablo III se montre assez conforme à ce qu'on en attendait : les mécanismes sont extrêmement bien pensés et souvent très novateurs, le gameplay fourmille de petites idées servant justement à rendre plus subtile la répétition "cliquer sur monstre pour tuer monstre", certains environnements sont très réussis.
Quelques petits bémols concernant l'histoire et la narration, qui, au début du jeu en tout cas, enchaînent les clichés et n'utilisent pas vraiment le riche background de la licence. Mais encore une fois, après seulement quatre heures de jeu, je ne peux pas en dire beaucoup plus.
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