Du vol scientifique au tourisme spatial, ce qui vous attend dans les étoiles
Le lancement réussi du Falcon 9, une fusée d'une société privée, marque peut-être le début d'une nouvelle ère dans la conquête spatiale. FTVi vous explique pourquoi cette évolution est inéluctable.
C'est une première pour une société privée. La société américaine SpaceX a réussi, mardi 22 mai, le lancement de sa fusée Falcon 9 afin d'envoyer sa capsule Dragon vers la Station spatiale internationale (ISS). "Il ne fait aucun doute que ce sera un vol historique en cas de succès de l'amarrage à l'ISS", estimait vendredi Gwynne Shotwell, directrice générale de l'entreprise. Cette tentative constitue une grande avancée vers la privatisation des vols spatiaux, devenue inéluctable. FTVi vous explique pourquoi.
Parce qu'aller sur l'ISS, ça coûte cher
Malgré la crise, les Etats-Unis entendent poursuivre la conquête de l'espace... ce qu'ils ne peuvent plus faire seuls. Depuis l'arrêt des navettes spatiales en juillet 2011, la Nasa dépend des Soyouz russes pour acheminer scientifiques et vivres vers la station orbitale, au prix de 63 millions de dollars (49 millions d'euros) par siège.
Pour réduire dès cette année la facture, l'agence spatiale américaine compte sur le succès du secteur privé. L'objectif de SpaceX a de quoi séduire : diviser par dix le prix d'une place pour la Station spatiale, en le réduisant à 4 millions d'euros. C'est pourquoi la Nasa a signé un partenariat avec la jeune entreprise et lui a octroyé un contrat de 1,6 milliard de dollars (1,2 milliard d'euros) pour douze missions de livraison de fret à la Station entre 2012 et 2016. Au total, SpaceX et sa concurrente Orbital devraient transporter chacune 20 tonnes de matériel pour un contrat global de 3,5 milliards de dollars (2,7 milliards d'euros).
Dans un programme présenté en 2010, le gouvernement américain affichait clairement sa volonté de sous-traiter certains voyages dans l'espace, "quelque chose vers lequel tend la Nasa depuis 25 ans", expliquait alors Howard McCurdy, professeur de politique publique à l'Université américaine, à Washington. En 2010, l'équipe de Barack Obama avait présenté un budget de 5,9 milliards de dollars (4,2 milliards d'euros) sur cinq ans pour encourager des entreprises privées à construire et exploiter des engins spatiaux. "L'objectif est de permettre à la Nasa d'acheter des vols pour ses astronautes comme on réserve un taxi", résumait alors La Tribune. Pour mettre cette enveloppe sur la table, la Nasa a annulé l'essentiel des 7 milliards d'euros affectés au programme Constellation, qui planchait sur les moyens d'acheminer des astronautes jusqu'à la Lune pour des missions de longue durée.
Parce que la Nasa voit grand
Pour Phil McAlister, directeur à la Nasa chargé du développement des vols spatiaux commerciaux, confier les missions de fret au secteur privé est intéressant financièrement. Mais cela permet aussi à l'agence de disposer de l'argent ainsi économisé pour d'autres missions. Comme l'étude de la Terre et surtout l'exploration spatiale.
Il s'agit notamment pour la Nasa de se relancer dans les voyages habités. L'environnement immédiat de la Terre est déjà bien connu des scientifiques. Il n'y a plus de découvertes majeures y faire. Alors la Nasa voit plus loin : elle a "l'exploration de Mars en ligne de mire", expliquait Le Figaro en juillet. Elle compterait également visiter des astéroïdes géocroiseurs d'ici vingt ans.
D'une certaine manière, "le président des États-Unis tente de redonner à la Nasa l'image qu'elle avait dans les années 1960 en faisant d'elle à nouveau une agence de recherche et de développement performante, et en déléguant à des fournisseurs civils l'orbite terrestre basse. Mars deviendrait la nouvelle Lune", souligne le site spécialisé Pour la science.
Parce que le tourisme spatial est déjà en route
Depuis 2001, la Russie a envoyé huit touristes jusqu'à la Station spatiale avec ses fusées Soyouz, moyennant entre 22 et 36 millions d'euros chacun. L'espace est peut-être le nouvel eldorado du tourisme si le transport régulier de (richissimes) particuliers s'ajoute au fret spatial et à l'acheminement des astronautes. Des géants de l'aérospatiale comme Boeing et Lockheed Martin, qui ont déjà construit la plupart des fusées et capsules américaines, sont dans les starting-blocks. D'autres sociétés sont prêtes à se lancer, comme Orbital Sciences, basée à Dulles en Virginie, et Bigelow Aerospace, dans le Nevada.
Mais comme on peut observer l'espace et profiter de la sensation d'apesanteur sans devoir franchir l'alitude de la mise en orbite, des sociétés se sont lancées dans l'organisation de voyages moins éloignés de la Terre. C'est le choix de Virgin Galactic, la branche spatiale du groupe du milliardiaire Richard Branson. L'entreprise a construit en 2010 le premier Spatioport aux Etats-Unis, dans le sud du Nouveau Mexique. Et un deuxième est prévu à Abu Dhabi, a annoncé lundi l'émirat, rapporte le site RTL.be. Ces bases serviront aux touristes de l'espace. Lors de ces voyages de deux heures à 100 km au-dessus de nos têtes, ils pourront admirer la Terre depuis leur vaisseau à travers des hublots. Les passagers pourront également quitter leur sièges pendant cinq minutes pour flotter en apesanteur lorsque l'appareil aura pris assez d'altitude. Les 500 personnes qui ont déjà réservé leurs places pour les premiers décollages prévus aux Etats-Unis ont acheté leur billet 200 000 dollars (141 302 euros) par tête. Voici à quoi cela pourrait ressembler :
Cette altitude de 100 km est bien moins élevée que celle de l'ISS, comme le montre une infographie (en anglais) du site spécialisé Gizmodo, qui plane entre 330 et 410 km au dessus de nous.
Richard Branson a par ailleurs évoqué l'ouverture d'hôtels de luxe dans l'espace qui pourraient être utilisés comme étapes pour de longs vols vers la Lune, affirmant aussi son intérêt pour le lancement de "petits satellites" destinés aux écoles et universités, écrivait Le Monde.fr en septembre 2010.
Mais des ingénieurs russes ont été plus rapides. La société Orbital Technologies a dévoilé en septembre 2011 un projet de mise en orbite d'un hôtel à 320 kilomètres de la Terre d'ici à 2016, rapporte Courrier International. Baptisé Hôtel du Paradis, il devrait comporter quatre chambres pour une capacité d'accueil de sept personnes. Prix du séjour ? 574 000 euros pour se rendre sur place en vaisseau Soyouz et 115 000 euros supplémentaires pour y passer cinq jours. Et pourtant, malgré le prix, pas de promesse du grand luxe : les clients pourraient boire du thé glacé ou des jus de fruits mais l'alcool serait interdit, a annoncé Orbital Technologies. Les touristes devraient prendre des repas préparés sur Terre et réchauffés au micro-ondes. Les eaux usées devraient être recyclées. Mais l'établissement promet d'autres atouts, comme celui de faire le tour de la Terre en 90 minutes pendant 24 heures, ce qui permet d'observer 16 couchers et 16 levers de soleil.
Autre signe d'un tourisme spatial en croissance, l'entreprise américaine Bigelow Aerospace a développé des capsules gonflables dont les composants modulaires peuvent être assemblés et déployés dans l'espace pour former des quartiers d'habitation orbitaux, comme le montre ce reportage en anglais (voir vers 3 mn 14) :
Mais les projets les plus fous semblent encore loin. Les vols de milliardaires vers l'ISS sont annulés en Russie pour une "durée indéterminée", selon l'agence Ria Novosti alors que plusieurs départs pour la Station étaient prévus pour 2013, raconte Le Figaro. Quant aux amateurs de tels voyages mais dont le portefeuille serait moins garni, rendez-vous lorsqu'une compagnie lancera des vols spatiaux lowcost.
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