Boîte noire et régulateur de vitesse obligatoire : "La voiture risque de redevenir un produit de luxe", regrette une association d'automobilistes

"La voiture risque de redevenir un produit de luxe", regrette Yves Carra, porte-parole de l’Automobile Club Association, alors que l’Union européenne impose de nombreux équipements de sécurité supplémentaires pour les voitures neuves, notamment l’installation des boîtes noires et d’un régulateur de vitesse intelligent. L’obligation entre en vigueur mercredi 6 juillet et ces nouveaux équipements ont un coût. "C’est un vrai problème de pouvoir d'achat" pour les automobilistes, dit-il. 

franceinfo : À quoi servira cette sorte de boîte noire ?

 Yves Carra : Cela va enregistrer 30 secondes avant l'impact et dix secondes après pour essayer de mieux comprendre et de mieux analyser avec des données comme la vitesse, l'angle de la voiture, le freinage, s'il a été bon, s'il a été brutal. Il y aura plein de données qui permettront de mieux connaître les raisons d'un accident. C'est un enregistreur de données. Le terme de boîte noire est un peu anxiogène.

Mais ce système ne dira rien sur l’état du conducteur ?

Les vraies causes d'un accident, c'est d'abord l'inattention. C'est le téléphone, c’est terrible. C'est aussi la consommation de drogues, d'alcool. Et là, on enregistrera uniquement les conséquences. On sera toujours dans l'ignorance de ce qu'aura vraiment fait le conducteur. C'est comme pour les avions. Ils peuvent avoir tous les systèmes possibles et imaginables, toutes les boîtes noires, 20 ans après, on ne sait toujours pas exactement pourquoi il y a eu un accident d'avion. Ce sera a priori un petit peu pareil pour les voitures. Cela ne va pas tout résoudre.

Est-ce qu'il y a un risque de "flicage" des conducteurs ?

A court et moyen terme, je dirais non. Après, dans vingt ou trente ans, c'est le sens de l'histoire. Les voitures sont plus connectées, donneront et transmettront de plus en plus d'informations pour anticiper les réparations, les pannes. C’est à l'image de l’aviation. C'est pour ça que le terme de boîte noire n’est pas si inapproprié finalement. On aura de plus en plus de voitures connectées. Après est-ce qu'on aura assez de ressources minières pour que toutes voitures puissent être comme ça, j'ai un petit doute, mais c'est le sens de l'histoire.

L’Union européenne impose l’installation d’un régulateur de vitesse intelligent, l’Intelligent speed adaptation (ISA). Qu’est-ce que c’est exactement ?

C’est un système qu'on peut débrancher chaque fois qu'on démarre la voiture. Toutes les innovations quand elles sont optionnelles, 15 ans après, elles sont obligatoires. Dans 15 ans ou 20 ans, certainement que tout le monde sera habitué et finalement, ça rassurera tout le monde. On ne perdra pas de points parce qu'on ne dépassera jamais la vitesse maximum des routes. Le limiteur de vitesse classique, c’est vous qui réglez la vitesse, alors que ce régulateur de vitesse intelligent lit les panneaux. Il y a plusieurs systèmes par GPS ou par lecture de panneaux. Il s'adapte obligatoirement à la vitesse de la route sur laquelle vous êtes. La voiture va ralentir automatiquement ou durcir la pédale d'accélérateur pour vous permettre de ne pas dépasser la vitesse.

Est-ce que ces systèmes ne vont pas augmenter le prix des voitures ?

C'est exactement le problème aujourd'hui. Les voitures les plus achetées par les particuliers sont des Dacia qui, justement, n'ont pas tous ces systèmes et qui ont un prix raisonnable. On va effectivement vers des voitures de plus en plus sophistiquées, donc de plus en plus chères. Et ça, c'est un vrai problème de pouvoir d'achat. Les voitures d'occasion qui s'échangent le plus ont plus de 10 ans. La voiture risque de redevenir parce qu'elle l'a été au début du XXIe siècle, un produit de luxe. Il faut être attentif parce que ce c'est une société qui va être trop bouleversée si on ne peut plus acheter de voitures.