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Oral de rattrapage pour Nicolas Sarkozy

Le président doit s'exprimer jeudi 27 octobre à la télévision au sujet de la crise financière qui secoue l'Europe. Entre des sondages inquiétants et un mutisme qui commence à agacer dans les rangs même de l'UMP, son intervention est attendue au tournant.

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Nicolas Sarkozy en pleine explication lors d'une table ronde sur la santé à Carcassonne, le 25 octobre 2011. (PASCAL PAVANI/ AFP)

Pour les uns, il n’a pas su expliquer la crise aux Français ; pour les autres, moins sévères, il n'était pas encore en mesure de le faire. Toujours est-il que pour la majorité, il est grand temps que le président s’exprime.

Nicolas Sarkozy sera au tableau jeudi 27 octobre sur TF1 et France 2 pour une opération pé-da-go-gie sur la crise.  Mieux vaut tard que jamais.

• Les Français lui tournent le dos

Selon un sondage Viavoice pour Libération publié lundi 24 octobre dans le quotidien, 75 % des Français estiment que Nicolas Sarkozy n’a pas été efficace dans sa gestion de la dette et des déficits publics, et 74 % rejettent sa politique en terme de croissance économique.

La Grèce ? Seules 33 % des personnes interrogées ont trouvé son action efficace jusque là. Le système financier ? Vingt-six pour cent des Français sont satisfaits de la politique menée en la matière.

Quarante-huit pour cent des Français feraient même davantage confiance au candidat socialiste François Hollande qu’à Nicolas Sarkozy pour améliorer la situation financière du pays. Dur à encaisser, pour un président hyperactif sur le sujet.

• La crise, un sujet sensible et complexe

Triple A, agences de notation, Fonds européen de stabilité financière (FESF) mais aussi recapitalisation des banques, liquidités, eurobonds… Le vocabulaire de la crise est obscur pour l’immense majorité des citoyens.

Du coup, communiquer sur la question relève de l’exercice de haute-voltige. A éviter : l’écueil techno, les approximations ou encore le détail des bisbilles diplomatiques intra-européennes.

Aussi, comment faire passer le déblocage de plusieurs milliards d’euros à destination des banques, de la Grèce ou de l’Italie, quand on clame qu’en France "les caisses sont vides" ?

L’incompréhension se traduit immédiatement dans les sondages, estime Jérôme Jaffré, directeur du Centre d'études et de connaissances sur l'opinion publique,interrogé par Slate.fr après l’intervention présidentielle du 5 février 2009.

Peu importe, balaie un membre du gouvernement : "Il faut expliquer, expliquer, expliquer." Et pas qu’à la télé, d’ailleurs : "Où sont les tracts ? Où sont les réunions dans les fédérations ?", s’agace-t-il.

• Ne pas faire de bruit pour rien

Autre travers : l’annonce roulement-de-tambours-pour-pas-grand-chose. Exemple cet été, quand Nicolas Sarkozy revient du cap Nègre mardi 9 août, en plein yoyo boursier. Il tient alors une réunion-surprise à l’Elysée mais à la sortie, rien de neuf.

Surtout, son aller-retour volontariste à Paris alimente les rumeurs plus qu’il ne les calme : pourquoi une réunion d'urgence ? La situation est-elle plus grave qu'on ne le croit ? La journée se solde par un dévissage spectaculaire des valeurs boursières des banques françaises.

• Sarkozy ne convainc pas

Dans un communiqué, le chef de l'Etat maintient l’objectif de réduction des déficits, promet quelques économies supplémentaires et se félicite au passage de la réforme des retraites.

Mais sur le fond, Nicolas Sarkozy ne peut pas revendiquer grand-chose. Malgré son revirement sur certaines de ses promesses de campagne comme la loi Tepa (travail, emploi, pouvoir d’achat) et de nombreuses réformes, les agences de notation, Moody’s en tête, ne semblent pas convaincues.

Pas plus qu’une partie de l’UMP : la majorité est tiraillée, certains députés souhaitant aller plus loin que le gouvernement, par exemple quand il s’agit de taxer les hauts revenus. 

• Communication : un dosage difficile à trouver

Nicolas Sarkozy ne s’est pas exprimé à la télé depuis février. Silence, il se "représidentialise". Après des mois d’omniprésence médiatique, Nicolas Sarkozy a décidé de raréfier sa parole. Mais il faut un savant sens du timing. S’il ne dit rien, on pense qu’il en fait autant ; s’il parle, ce n’est pas pour ne rien dire. Et c’est là que ça coince : "En plein désordre financier, communiquer revient à tirer avec un fusil à un coup. Si ça loupe on n’a pas d’autres cartouches", confie un conseiller du président, cité par Libération.

Alors, quel degré de transparence adopter ?

Soyez rassurant et l’opinion devient sceptique. Notamment parce que "la France a un passif important en matière de communication de crise", explique à 20minutes.fr Thierry Libaert, maître de conférence en communication à Sciences Po, citant les grandes crises minimisées comme la vache folle, le sang contaminé, Tchernobyl ou, plus récemment, la canicule de 2003.

Soyez alarmiste et on vous demande ce que vous faites là à bavasser au lieu d’agir. En 2008, Nicolas Sarkozy avait reconnu l’ampleur de la crise économique dans son discours de Toulon. "C'est pour cela que nous assurons les Français de la garantie absolue de l'Etat sur le système bancaire français", équilibrait le premier ministre François Fillon.

Dans le même temps, sur le perron de l’Elysée où ils avaient rendez-vous, Georges Pauget, du Crédit Agricole, et Henri de Castries, président d'AXA, estimaient que l'ensemble du dispositif bancaire français était "solide, stable et fiable", "un des plus sûrs au monde" osait même le président de la Banque de France Christian Noyer.

De même, à qui s’adresser principalement ? Aux Français ou aux marchés ?

Car chacun son interprétation, comme quand, à la mi-septembre, le ministre de l’Industrie Eric Besson déclare que la nationalisation partielle des banques est "prématurée". Les Français entendent qu’il n’y a pas d’urgence, tandis que les marchés eux, comprennent qu’elle finira par avoir lieu et continuent leur dégringolade.

C'est donc sur les résultats du sommet européen du mercredi 26 octobre que Nicolas Sarkozy va s'appuyer pour s’adresser aux Français. Un seul mot d'ordre, la pédagogie, priorité à la "vérité", mais pourquoi pas en profiter pour tacler Hollande, son opposant dans la course à l’Elysée.

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