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Etats-Unis. La Chambre des représentants approuve l'accord sur le "mur budgétaire"

Cela permet d'éviter au pays la cure d'austérité qui menaçait. Mais tout n'est pas réglé... Francetv info revient sur ce qui reste en suspens.

Article rédigé par Marion Solletty
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le président américain, Barack Obama, lors de son intervention face à la presse après la validation par le Sénat de l'accord sur le "mur budgétaire", le 31 décembre 2012 à Washington (Etats-Unis). (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)

Après le Sénat, la Chambre des représentants a adopté, dans la nuit du mardi 1er au mercredi 2 janvier un texte permettant aux Etats-Unis d'éviter le "mur budgétaire", une situation susceptible d'assommer l'économie américaine. Quelques minutes après le vote qui a vu le texte adopté par 257 "oui" contre 167 "non", Barack Obama s'est exprimé depuis la Maison Blanche. Le président américain a affirmé qu'il tenait ainsi une de ses promesses de campagne, établir une fiscalité plus juste, avant de repartir pour Hawaï où il passe ses vacances.  

Le terme de "mur budgétaire" désigne la conjonction de deux mécanismes qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier si l'accord n'avait pas été validé : la fin des baisses d'impôts de l'ère Bush d'une part, et d'autre part, des coupes budgétaires automatiques élaborées en 2011 dans le cadre des négociations sur le relèvement du plafond de la dette, visant à contraindre Washington à réduire les dépenses publiques. Deux phénomènes qui, conjugués, représentaient une cure d'austérité si brutale qu'elle risquait de replonger l'Amérique dans la récession.

Pour l'éviter, les chefs de file des deux camps ont négocié ferme durant des semaines afin de trouver un terrain d'entente. D'un côté, les démocrates voulaient augmenter les impôts pour les plus riches. De l'autre, les républicains souhaitaient réduire drastiquement les dépenses. L'accord conclu in extremis lundi a été conçu pour réconcilier les deux points de vue, mais il ne solutionne pas tout... Explications.

Ce qui est réglé

Essentiellement, le volet fiscal. Les négociations ont été très serrées sur ce point, les hausses d'impôts étant un casus belli majeur pour les républicains. Des compromis ont été trouvés en particulier sur l'impôt sur le revenu, sur la succession et sur la taxation du capital. 

La hausse des impôts pour les plus riches. C'est le principal acquis de l'accord : le vice-président, Joe Biden, et le leader de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, sont tombés d'accord pour augmenter les impôts sur le revenu des foyers gagnant plus de 450 000 dollars (341 000 euros) par an : le taux de prélèvement passera de 35% à 39,6%. C'est une concession importante pour Barack Obama, qui voulait fixer le seuil à 300 000 dollars (189 000 euros), plaidant pour plus de justice fiscale.

L'impôt sur la succession. Autre épineux sujet fiscal, l'impôt sur la succession : comme l'explique le Washington Post (en anglais), celui-ci a chuté depuis les années Clinton, passant d'un taux d'imposition de 55% à un taux de 35%, avec un seuil d'exonération en hausse. Les démocrates plaidaient pour un entre-deux. Selon les termes de l'accord final, les héritages seront finalement taxés à 40% au-delà de 10 millions de dollars (7,6 millions d'euros) par couple.

La taxation du capital. Comme François Hollande en France, Barack Obama avait à cœur de relever le niveau de taxation des revenus du capital, moins imposés que ceux du travail. Ce sera chose faite avec un taux passant de 15% à 20% pour les foyers gagnant plus de 250 000 dollars par an (189 000 euros).

Et aussi : la prolongation de l'assurance chômage et de certains crédits d'impôt. Les indemnités pour les chômeurs longue durée seront prolongées d'un an, un gain crucial pour les familles touchées par la crise. Des crédits d'impôts à l'intention des entreprises et des ménages défavorisés, listés par le site américain Politico (en anglais), ont également été prolongés.

Ce qui n'est pas tranché

Initialement, Barack Obama voulait un accord global portant sur la fiscalité et les dépenses publiques. Finalement, l'obstination des parlementaires à chaque extrémité de l'échiquier politique a contraint la Maison Blanche à accepter un processus en plusieurs étapes : l'accord de lundi ne fait que reporter à plus tard certains éléments du problème.

La baisse des dépenses publiques. Un délai de deux mois a simplement été aménagé pour trouver un accord sur ce point, destiné à éviter les coupes budgétaires automatiques d'un montant de 110 milliards de dollars (83 milliards d'euros) par an. Elles menaçaient de sabrer le budget de la défense et les aides sociales.

Le plafond de la dette. Si ce sujet n'entrait théoriquement pas dans les négociations sur le "mur budgétaire", il lui est en réalité étroitement lié : le "mur budgétaire" est un mécanisme directement issu des négociations sur le relèvement du plafond de la dette, ayant provoqué une crise politique majeure en 2011.

Or le nouveau plafond, fixé à 16 400 milliards de dollars (12 400 milliards d'euros), ayant été atteint, il va devoir être renégocié dans les prochaines semaines, comme l'explique CNN (en anglais). Les républicains, qui ont fini par jouer le jeu sur les hausses d'impôts, risquent fort de mettre à profit cette nouvelle bataille parlementaire pour contraindre l'administration Obama à des coupes drastiques dans ses dépenses... Mais dès l'adoption du texte par la Chambre des représentants, le président américain a martelé : "Je négocierai sur beaucoup de choses, mais je ne débattrai pas encore avec le Congrès sur la nécessité d'acquitter les factures induites par les lois déjà adoptées."

Autant dire que la route s'annonce longue pour Barack Obama, moins de deux mois après sa réélection. Si son nouveau mandat a prouvé qu'il était toujours soutenu par les Américains, la situation à laquelle il fait face au Congrès est plus que jamais problématique. Le New York Times (en anglais) souligne ainsi que l'épisode du "mur budgétaire" est symptomatique d'un pouvoir législatif paralysé, réduit à prendre des mesures d'urgence pour parer au plus pressé. Une réalité qui risque de peser non seulement sur le budget mais aussi sur les grandes réformes annoncées par Barack Obama sur l'immigration ou le port d'armes.

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