Electricité : notre capacité à ne pas consommer bientôt monnayée
Réseau
de Transport d'Electricité (RTE), qui gère le réseau électrique en France,
remet ce mercredi au gouvernement les règles du marché capacité électrique. Leur entrée en vigueur est prévue début 2016 mais elles commenceront à se mettreprogressivement en place dès cet été. Le
changement majeur, c'est qu'on ne va plus simplement vendre de l'électricité, on
va aussi monnayer sa capacité à en produire ou à ne pas en consommer.
L'objectif,
c'est faire face aux pics de consommation, ces moments où tout le monde
utilise de l'électricité en même temps. En hiver lorsqu'il fait très froid ou à
19h le soir lorsque l'on rentre chez soi par exemple. Ces pics sont de plus en plus hauts
et augmentent deux fois plus vite que notre consommation globale d'électricité,
avec un risque : celui de pénuries électriques à partir de 2017.
Accepter de s'effacer... quelques minutes
Pour
éviter cela, une nouvelle règle sera posée : le fournisseur va devoir garantir qu'il sera capable d'alimenter ses clients. Il pourra ainsi jouer sur deux leviers :soit s'assurer que des centrales seront prêtes à produire de l'électricité si besoin, soit encourager les usagers à moins consommer au moment des pics.
Cela s'appelle
l'effacement. On accepte donc de s'effacer, de ne pas utiliser d'électricité
lorsqu'il y a trop de demande.
"Cela ne change même pas la température de la pièce" (Maxime)
Dans sa
maison de Meudon, en région parisienne, Maxime l'expérimente depuis 2 ans. Il
ne s'agit pas de couper la lumière ou le four, mais simplement le chauffage et
le ballon d'eau chaude et c'est un boitier installé sous le compteur
électrique, qui s'en charge. "C'est un petit boitier carré blanc qui se
raccorde à tous les radiateurs et au chauffe-eau. Donc nos radiateurs se
coupent parfois sans qu'on s'en rende compte. En général aux heures de pointes
et en hiver. Ce sont des petites coupures de deux à cinq minutes, ça ne change même pas
la température de la pièce ", assure Maxime.
Développer le marché de capacité
Mais les microcoupures
de chauffage de Maxime ne suffisent pas à limiter les pics de consommations
évidemment. Pour les particuliers, il existe des opérateurs qui rassemblent des
milliers de consommateurs et réduisent en même temps leur consommation, ce qui
fait cette fois la différence à plus grande échelle. Cela existe aussi pour les entreprises. A commencer par celles qui
consomment beaucoup d'électricité, comme par exemple les aciéries ou les
papeteries. Lorsqu'elles acceptent de suspendre leur production, l'impact est
forcément plus important. L'idée est donc de le développer plus encore,
notamment via ce futur marché de l'électricité : le marché de capacité.
"On va être payé pour différer sa consommation" (RTE)
** Ce marché vise à vendre et acheter des capacités de production, "des assurances contre les coupures électriques" en quelque sorte. L'idée
c'est de payer des centrales pour qu'elles restent prêtes à produire plus en
cas de pics. Mais c'est aussi de payer des usagers pour qu'ils acceptent de ne pas consommer
en cas de pointes.
Pour certains cela rapportera plus qu'à d'autres, explique
Pierre Bornard de Réseau de Transport d'Electricité. "On va être
payé pour différer sa consommation. Si vous êtes un industriel votre facture va
baisser. Pour les particuliers c'est un peu moins évident mais en modifiant son
comportement il va faire des économies d'énergie et gagner un peu d'argent ".
Un foyer pourrait ainsi
réduire sa facture de 10% à 15%. C'est du moins ce qu'avance Volatlis, un des opérateurs
qui installe ces fameux boitiers destinés à limiter votre consommation d'électricité
au moment des pics. D'autres opérateurs
promettent même de rémunérer à terme les ménages qui se prêteraient au jeu.
Quel impact sur le prix de l'énergie ?
Le financement de ce
nouveau marché risque de faire augmenter le prix de électricité mais l'impact
sera très faible : de l'ordre de 1,5% de hausse sur la facture au moment
de sa mise en place en 2016, selon la commission de régulation de l'énergie. Et
ensuite plus rien. Certains opérateurs parient même sur une légère baisse du
coût de l'électricité.
Actuellement, lors des pics de consommation, on démarre
des centrales supplémentaires, plus
coûteuses. Si l'on maitrise mieux ces pics, cela devrait se voir sur la
facture, affirme Pierre Bivas, co-fondateur
de Voltalis et président de Cathode, syndicat professionnel de l'effacement
"Eviter de consommer, cela permet d'éviter de produire, cela évite de
faire tourner les centrales d'appoint, qui sont les plus chères et les plus polluantes.
Et en évitant ce coût, on va permettre de faire baisser le prix de l'électricité, ou au moins de modérer les hausses", explique-t-il.
Pas d'emballement pour autant. Cela ne fera pas beaucoup bouger les prix, surtout que les tarifs
réglementés de l'électricité sont plutôt à la hausse. On attend +10% d'ici la
fin de l'année.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.