Création d'emploi en 2017 : "La désindustrialisation n'est pas une fatalité"
L'économiste Mathieu Plane de l'OFCE a expliqué mardi sur franceinfo que l'"on est dans une phase un peu plus durable" de reprise de l'emploi.
L'économie française a créé 268 800 postes salariés l'an dernier, le chiffre le plus haut depuis 2007, a annoncé mardi 13 mars l'Insee. Tous les secteurs affichent de bonnes performances, et notamment l'industrie. Pour Mathieu Plane, économiste à l’OFCE et directeur adjoint du département analyse et prévisiona réagi à ces bons chiffres sur franceinfo.
franceinfo : La France a-t-elle amorcé la décrue du chômage de masse, comme le dit la ministre du Travail Muriel Pénicaud ?
Mathieu Plane : Nous restons avec des niveaux élevés de chômage, mais nous sommes dans une reprise franche du côté de l'emploi. 2017 le montre, et 2016 était également une bonne année. On est dans une phase d'accélération de ce côté-là, ce qui est très corrélé avec la croissance. L'activité est en train de redémarrer de manière assez nette et tous les secteurs se retrouvent avec des augmentations d'emploi assez importantes.
L'industrie avait détruit près d'un million d'emplois en seize ans. Pourquoi cela redémarre-t-il ?
On était sur une tendance de désindustrialisation quasiment constante depuis 2001. Cela s'était accéléré avec la crise, mais là le secteur se remet à créer de l'emploi. Même les marges industrielles sont revenues à un niveau élevé, l'investissement industriel est important et les emplois reviennent. Les secteurs clés sont l'industrie chimique et le transport, de l'aéronautique à l'automobile. C'est positif. Alors attention, on parle de quelques milliers d'emplois sur l'année, alors que le secteur des services en créé des centaines de milliers. Le rapport de force n'a rien à voir. Mais c'est une première depuis seize ans. La désindustrialisation n'est pas une fatalité.
Beaucoup de ces emplois créés l'an dernier sont-ils des emplois précaires ?
L'interim est très présente dans ces créations d'emplois. On est à un niveau historique d'interim en France, on n'a jamais eu autant d'intérimaires. Mais ce n'est pas uniquement l'intérim qui génère des emplois, ce qui veut dire qu'on est dans une phase un peu plus durable. Au début des phases de reprise, les entreprises embauchent en contrat court. Une fois que cette reprise est installée, on bascule sur des emplois un peu plus longs. Comme la reprise actuelle est pérenne, on peut espérer un peu plus d'emplois longue durée et moins précaires. Comme le chômage baisse, certaines qualifications vont commencer à être difficiles à trouver. Il va falloir que les entreprises soient attractives, ce que l'on ne voyait pas du côté des entreprises.
Pourquoi ces disparités entre les territoires ?
La croissance n'est pas égalitaire, dans la population comme au sein des territoires. Il y a des secteurs très tournés vers les services dans les grandes agglomérations, qui ont beaucoup d'activités scientifiques, juridiques, de conseil, qui vont profiter de ce mouvement. Et il y a des territoires qui ont été délaissés, une partie de leur main-d'oeuvre est partie. Ce sont surtout des territoires anciennement industrialisés, où les usines ont fermé. La reprise arrive lentement et de manière différée dans ces endroits, plutôt que dans les grandes agglomérations où la main-d'oeuvre est plus qualifiée.
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