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On vous explique la polémique autour de la consultation sur les pesticides

Le gouvernement lance lundi une concertation publique qui doit permettre de fixer, dans la loi, une distance minimale entre les habitations et les champs traités.

Article rédigé par franceinfo
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Un agriculteur répand du glyphosate dans une vigne à Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), le 23 février 2018. (JEAN LECOMTE / BIOSPHOTO / AFP)

Le dossier est corrosif. Pour mieux protéger la population des risques pour la santé liés aux pesticides, le gouvernement planche sur un projet de décret afin d'instaurer un espace entre les zones d'épandage et les habitations. Pour finaliser le texte, trois ministères doivent ouvrir, lundi 9 septembre, une consultation publique sur les distances minimales à respecter. Avant même l'ouverture de cette consultation, le débat fait rage entre les écologistes et le monde agricole sur les contours de cette mesure.

Comment fonctionne la consultation ? 

La consultation, "sur le modèle du grand débat", doit être ouverte simultanément sur les sites des ministères de la Santé, de la Transition écologique et de l'Agriculture dans la journée de lundi, selon un porte-parole du ministère de l'Agriculture. "On va lancer une consultation de trois semaines, a-t-il expliqué à l'agence Reuters. Tout citoyen, syndicat agricole ou association de défense de l'environnement pourra s'exprimer. C'est un projet qui peut être amené à évoluer."

Les résultats devraient être centralisés et dépouillés au ministère de la Transition écologique et solidaire. Ce dernier fera la synthèse en vue d'"un arbitrage définitif fin novembre", avant la publication du décret prévu pour le 1er janvier 2020. Cette consultation devait initialement démarrer le 1er octobre, mais elle a été avancée sous l'effet des polémiques créées par un arrêté municipal très médiatisé pris par le maire de Langouët (Ille-et-Vilaine), Daniel Cueff, interdisant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à moins de 150 m d'habitations.

Quel est ce projet de décret ?

Avant même l'ouverture de la consultation, le gouvernement a proposé samedi dernier de fixer dans un décret la distance minimale entre les habitations et les zones d'épandage à 5 m pour les cultures dites basses (céréales) et à 10 m pour les cultures dites hautes, telles que les vignes ou l'aboriculture. "C'est la première fois qu'on va mettre en place des distances minimales et on est un des seuls pays à le faire", s'est félicitée Elisabeth Borne, la ministre de la Transition écologique.

Le projet de décret prévoit également la "possibilité d'adapter ces distances minimales dans le cadre de chartes validées au niveau départemental", indique le ministère de l'Agriculture. Le temps de la consultation publique, des concertations dans toutes les préfectures pour l'élaboration de chartes départementales vont d'ailleurs se poursuivre.

"Le cousu-main de ces chartes prévaudra sur le décret, a indiqué le ministère. Nous croyons à l'intelligence locale : si une charte institue une zone de non traitement à 8 m ou au contraire à 50 m d'un bâtiment, c'est elle qui prévaudra sur le cadre national." A ce jour, huit chartes ont été signées. 

Quelles sont les inquiétudes des écologistes ?

Les associations de défense de l'environnement et plusieurs responsables politiques se sont étonnés de la distance retenue par le gouvernement. "Cinq ou dix mètres de distance ne représentent absolument pas une distance susceptible de réduire de manière significative l'exposition des riverains aux pesticides", estime François Veillerette, directeur de l'ONG Générations Futures. "Je n'y crois pas, je pense que c'est un poisson d'avril", a réagi sur BFMTV le photographe Yann Arthus-Bertrand, fondateur et président de la fondation Good Planet.

C'est insultant pour les gens qui se battent depuis si longtemps contre les pesticides.

Yann Arthus-Bertrand

sur BFMTV

Pour David Cormand, secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts, il s'agit d'une décision au "caractère historique", puisque "c'est la première fois que l'Etat admet qu'il y a un danger grave pour les gens" après l'épandage. Mais "le problème, c'est le côté anecdotique de la décision qu'ils en tirent", a-t-il déclaré sur BFMTV.

"Cinq à dix mètres comme ça, d'une manière un peu rigide, ça ne me semble pas forcément adapté aux réalités du terrain. (...) Ça paraît dérisoire 5 à 10 m", a également estimé sur franceinfo l'ancien ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot. "On espère que c'est une blague ! Ou une erreur de frappe", a également réagi sur Twitter l'ancienne ministre Ségolène Royal.

Le maire de Langouët, Daniel Cueff, à l'origine de l'arrêté interdisant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à moins de 150 m des habitations, a également fait part de sa surprise : "Quand j'ai appris ça, je pensais que c'était une 'fake news' et que ce n'était pas sérieux ! Cette proposition n'est pas croyable." Son arrêté a été depuis suspendu.

Que répond le gouvernement ?

Ces derniers jours, plusieurs ministres ont défilé sur les plateaux de radio et de télévision pour justifier les distances prévues dans le projet de décret par les préconisations scientifiques de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) allant en ce sens. "Ces distances ne sortent pas d'un chapeau, elles ont été rendues publiques en juin par un comité d'experts scientifiques, a ainsi expliqué à l'AFP Elisabeth Borne. C'est un enjeu de santé publique, un enjeu trop important pour qu'on soit dans les polémiques et les caricatures."

Le gouvernement peut compter sur l'appui de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA). "Les écologistes et des politiques n'ont pas arrêté tout le week-end d'insulter et de mépriser les agriculteurs. Ce n'est du tout une mesurette, ceux qui parlent n'ont jamais vu un pulvérisateur pour certains d'entre eux. (...) Que ces gens-là arrêtent de délirer", estime Christiane Lambert, la présidente du syndicat agricole, sur franceinfo"Les scientifiques n'ont jamais parlé de 150 m. 150 mètres, c'est retirer 15 à 20% de la surface agricole française. Qui peut penser que c'est possible ? Sauf ceux qui veulent une France sans pesticides."

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