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Recrutement chez Thales : "Avec la guerre en Ukraine, il faut compenser les pertes de capacité connues" pendant le Covid-19, analyse un spécialiste

Pour Loïc Tribot La Spière, délégué général du Centre d’Études et de Prospectives Stratégiques (CEPS) et invité de franceinfo dimanche, les recrutements voulus par Thales ne seront pas simples, car l'aéronautique connaît aussi une pénurie de main d'œuvre.
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Le géant Thales prévoit de recruter 12 000 personnes en 2023, dont 5 500 en France. (DENIS CHARLET / AFP)

"On a acté que, désormais, il peut y avoir la guerre en Europe", a constaté Loïc Tribot La Spière, invité de franceinfo dimanche 26 février. Pour le délégué général du Centre d’Études et de Prospectives Stratégiques (CEPS), spécialiste du transport aérien, le secteur bénéficie d'un "soutien massif de l'État" et reprend des couleurs après trois années difficiles liées au Covid-19.

franceinfo : Plusieurs géants du secteur, dont Thales, annoncent d'importants recrutements. C'est la seule conséquence de l'après-Covid ?

Loïc Tribot La Spière : Il y a une multiplicité de facteurs. Le premier élément est effectivement le Covid-19. Pendant les confinements, les entreprises ont procédé à des licenciements pour assurer leur pérennité et leur survie économique, donc à des pertes de compétences. Maintenant, la situation s'améliore, les entreprises se développent. L'autre raison est que le secteur aérospatial et défense bénéficie d'un soutien massif de l'État, d'abord par des commandes. Avec la guerre en Ukraine, nous sommes amenés à offrir un certain nombre de systèmes d'armes à l'Ukraine, il faut donc compenser ces pertes de capacité que nous avons connues. De surcroît, nous avons acté le fait qu'il peut y avoir la guerre désormais en Europe.

Il y a aussi besoin de chercheurs, car le secteur de la Défense recrute aussi ?

Il faut souligner le cas singulier de Thales. C'est une sorte d'immense société de service et d'ingénierie informatique (SSII) qui est présente sur de nombreux grands segments. Elle est présente dans le secteur de la Défense, mais aussi sur les aspects cyber, sur la construction de l'aéronautique civile, dans le digital. Donc cette entreprise va être un grand recruteur parce qu'elle est multi-métiers, pas seulement aérospatiale, pas seulement défense, mais aussi espace, circulation, commandement, etc. Elle doit répondre à des besoins multiples, à la différence d'un groupe comme Dassault, qui recrute aussi, mais qui est monoculture. Dassault, c'est une prouesse, mais Thales, c'est un arc-en-ciel de compétences.

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On sait qu'il y a des pénuries de main-d'œuvre dans de nombreux secteurs. Est-ce que l'aéronautique est concernée ?

Bien sûr que ces entreprises sont concernées. Elles embauchent, car il faut répondre à des besoins et parce qu'on est dans une ère beaucoup plus digitale. Force est de reconnaître qu'un certain nombre de ces grandes entreprises sont "désoutillés". Il faut aussi souligner qu'elles sont amenées à faire appel à des SSII, des entreprises du numérique, qui mettent à disposition leurs collaborateurs. Il faut désormais faire appel à des prestataires extérieurs, mais aussi embaucher. En France, il y a des diplômés à embaucher, mais il faut constater qu'en matière de Recherche et Développement (R&D), notre pays a toujours été à la traîne. On est un centre de formation mondiale, on forme des gens de talent, et puis les Américains les recrutent. D'abord, parce qu'ils offrent de vrais salaires, et puis parce qu'ils offrent la possibilité à des éléments géniaux de travailler dans des laboratoires. On essaie d'y répondre, mais assez faiblement en France.

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