: Vidéo "Si vous ne reconnaissez pas les discriminations, vous mettez en cause le ciment qui nous tient tous ensemble", prévient le Défenseur des droits
Alors qu'il achève son mandat jeudi, Jacques Toubon estime avoir "accompli" sa mission de défense des libertés publiques. Il redoute que les Français ne soient "prêts à les sacrifier devant la peur".
Jacques Toubon quitte jeudi 16 juillet ses fonctions de Défenseur des droits après six années passées à la tête de l'institution. Il estime avoir "accompli" sa mission de défense des libertés publiques et considère qu'il faut persévérer en la matière. "Si vous ne reconnaissez pas les inégalités, les discriminations que subissent des millions et des millions d'entre nous, vous mettez en cause tout simplement leur appartenance à la République. Donc, vous mettez en cause le ciment qui nous tient tous ensemble", a expliqué Jacques Toubon sur franceinfo, en marge de l'édition 2020 des Napoléons, forum sur l'actualité qui se déroule cette année à Roland-Garros.
franceinfo : Qu'est-ce que vous retiendrez de toutes ces années ?
Ce que je retiendrai, c'est que nous avons accompli notre mission : veiller au respect des droits et des libertés fondamentales, souvent par des positions, par mes propos ou par mes écrits, qui étaient en défaut par rapport aux autorités publiques, par rapport à l'opinion publique. Je n'ai pas hésité parce que je crois que le service que la République me demandait, c'était justement de dire et d'écrire cela. Parce que, comme par exemple sur le grand dialogue entre universalisme, égalité, discrimination, les choses sont devenues aujourd'hui complexes. Si vous ne reconnaissez pas les inégalités, les discriminations que subissent des millions et des millions d'entre nous, vous mettez en cause tout simplement leur appartenance à la République. Donc, vous mettez en cause le ciment qui nous tient tous ensemble.
Le premier jour du confinement, vous vous êtes inquiété des éventuelles privations de liberté. Vous avez été "disruptif" à ce moment-là ?
Au moment des deux états d'urgence que j'ai vécus, l'état d'urgence antiterroriste et l'état d'urgence sanitaire, j'ai toujours fait la même réflexion. Je me suis toujours dit : est-ce qu'aujourd'hui, les Français sont autant attachés aux libertés ? Est-ce qu'ils ne sont pas prêts à les sacrifier devant la peur, la peur du terrorisme, la peur de la maladie, la peur de la mort ? Ce qui est tout à fait légitime. Moi aussi, j'ai peur, comme vous. Mais est-ce qu'ils ne sont pas prêts à laisser partir une partie de ces libertés qui sont pourtant clairement le sceptre que notre République doit toujours brandir ? On a, il y a quelques jours, discuté d'un texte où on était en train de passer du principe de la liberté de manifester à l'autorisation de manifester. Mais l'autorisation de manifester, c'est dans les pays où il n'y a pas la liberté de manifester ! Vous voyez combien je suis attentif aujourd'hui à ce que nous ayions la connaissance de la société, la conscience de l'exigence des libertés, de l'égalité. Et puis, à partir de là, je pense que le débat peut avoir lieu, mais on sera conscient de ce que nous faisons. Et le Défenseur des droits a toujours cherché à apporter la connaissance et à rendre conscients les pouvoirs publics, mais aussi tous mes concitoyens.
Et pour conclure, que fera l'ancien Défenseur des droits vendredi matin ?
Je n'en sais strictement rien. Il verra bien ce que lui réserve la vie, mais il ne changera pas de convictions.
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