Mentions confuses, logos trompeurs : comment s'assurer qu'un vin est bien français ?
Des millions de litres de vin, présentés et vendus comme français entre 2016 et 2017, cachaient en réalité du vin espagnol.
Vous pensiez boire un côtes-de-provence, vous avez peut-être dégusté un vin espagnol. En 2016 et 2017, révèle Le Parisien lundi 9 juillet, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de répression des fraudes (DGCCRF) a mené une vaste enquête sur l'origine de certains vins, vendus comme des produits français. "Ces cas de francisation concernent plus de 70 000 hectolitres de vin", soit l'équivalent de 10 millions de bouteilles, indique Alexandre Chevallier, directeur de cabinet adjoint à la DGCCRF.
Comment s'assurer que le vin acheté en magasin ou consommé au restaurant est bel et bien français ? Interrogé par franceinfo, Alexandre Chevallier distille quelques conseils.
Franceinfo : quelles pratiques trompeuses ou frauduleuses votre enquête a-t-elle mises en lumière ?
Alexandre Chevallier : C’est une enquête qu’on a menée sur tous les vins, et pas seulement le rosé. Elle a commencé en 2016, après des soupçons de la part de professionnels français sur des pratiques de francisation, c’est-à-dire de revente de vin étranger sous la dénomination "vin de France". Elle s’est orientée d’abord vers les principaux importateurs, puis les cafés, hôtels, restaurants et la grande distribution, afin de remonter vers les professionnels concernés.
Ça a permis de conclure que les vins importés étaient, en majorité, correctement étiquetés, mais qu’il y avait quand même un certain nombre de pratiques frauduleuses de francisation, ainsi que des pratiques commerciales trompeuses où l’étiquetage pouvait entraîner une confusion. Par exemple, la mention du vin était difficilement identifiable sur la bouteille, alors qu’il pouvait y avoir écrit "embouteillé en France". On pouvait aussi trouver des images type cocarde, fleur de lys ou château, normalement réservées aux vins avec des indices de qualité type AOC ou IGP. Il pouvait également y avoir des noms suggérant qu'un vin étranger était français.
Comment le consommateur peut-il s'assurer que les bouteilles de vin qu'il achète sont bien françaises ?
La provenance du vin, même s’il n’a pas d’IGP et d’AOP, doit être indiqué : c’est une mention obligatoire. Sur toutes les étiquettes, de bouteilles ou de cubis, il faut donc chercher la mention "vin de France", "vin d’Espagne", etc. Et si c’est un assemblage, "vin de la Communauté européenne", par exemple.
Mais il arrive que des étiquettes jouent sur la confusion : il peut y avoir écrit "embouteillé en France" en très grand, et sur une autre étiquette, de manière peu lisible, "Espagne". Concernant les cubis, la mention est parfois sous la poignée ou sous le cubi lui-même, donc pas facilement accessible. Ce sont des pratiques trompeuses qu’on sanctionne. Ce qu’il faut surtout chercher, c’est donc la provenance, pour savoir s'il s'agit d'un vin de France ou d’Espagne.
Le consommateur ne doit pas s’arrêter à un dessin, un nom de marque qui suggère que c’est français, ni à la seule mention 'embouteillé en France'.
Alexandre Chevallierà franceinfo
Et comment faire au restaurant, où l'on n'a pas toujours accès à la bouteille ?
Là encore, si une carte des vins indique qu’il s’agit d’un rosé côtes-de-provence et que c'est en fait un vin étranger, la pratique est délictueuse et passible de sanctions. Si vous avez des doutes, vous avez le droit de demander des éléments de confirmation au restaurateur. Vous pouvez même lui demander la bouteille ! Le consommateur a le droit de demander des informations complémentaires, afin d'éclairer son choix.
Quelles sont les sanctions pour de telles pratiques ?
Au cours de notre enquête, on a constaté des manquements de moindre gravité, comme une information insuffisante ou qui n’est pas délibérément trompeuse. On fait alors des injonctions de remise en conformité. Mais la francisation ou l’étiquetage confusionnel sont des pratiques commerciales trompeuses, punies d'une amende de 300 000 euros, qui peut être portée à 10% du chiffre d’affaires, et de deux ans d'emprisonnement.
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