Le leader de la CFDT de Florange écrit sa "vérité" à François Hollande
Dans un courrier au président, Edouard Martin développe les "absurdités", les "mensonges" et les "vérités" dans la bataille pour la sauvegarde du site mosellan.
"Florange, le 27 décembre 2012". Ainsi démarre la lettre qu'Edouard Martin, le leader de la CFDT de l'usine ArcelorMittal mosellane, a envoyé au président de la République. Un peu moins d'un mois après l'accord passé entre le gouvernement et l'aciériste, au grand dam des syndicats, la missive de plusieurs pages publiée par le site du quotidien régional Le Républicain Lorrain.fr entend faire connaître à François Hollande la "vision des choses [des ouvriers de Florange], de manière exhaustive, non tronquée et non déformée."
Dans ce courrier, Edouard Martin énumère les "mensonges", "les absurdités" et livre la "vérité" sur le dossier Florange. Francetv info énumère les points abordés par le leader syndical.
Sur la rentabilité du site
Dire que l'usine n'est pas rentable en raison de sa situation géographique "continentale" et de sa petite taille "est faux", commence le syndicaliste. Dans sa lettre, ce dernier assure au président que "Florange, c'est 1,5 milliard d'euros de chiffre d'affaires par an. C'est 600 millions d'euros de valeur ajoutée dont les trois quarts sont exportés et améliorent la balance commerciale de la France".
"La vérité, c'est que l'usine de Florange, comme le dit ArcelorMittal, compense par ses performances techniques et, au-delà, les coûts d'acheminement des matières", assure-t-il. Ainsi, "Florange n'a aucun handicap logistique au bout du compte puisque c'est une usine dont les clients sont à l'Est (PSA Sochaux et Mulhouse, Mercedes, Audi, BMW, Opel etc .. en Allemagne)", remarque Edouard Martin. "La vérité, c'est que l'usine de Florange est compétitive, y compris sa filière chaude, ses Hauts Fourneaux, son aciérie."
Sur le plan social évité
Dans sa lettre, le syndicaliste remet en cause le texte signé entre le Premier ministre et le groupe ArcelorMittal pour éviter le plan social. "Il n'y aura pas de plan social parce que la pyramide des âges de l'usine conduira au départ naturel de plus de 600 personnes en trois ans", argumente Edouard Martin, balayant ainsi la satisfaction affichée par Jean-Marc Ayrault à l'issue de cet accord.
Sur les promesses du projet Ulcos
Et le leader de la CFDT de démonter une à une les promesses de l'accord : "On fera Ulcos. C'est faux", écrit-il. Censé sauver Florange, cet ambitieux projet européen qui a pour but de mettre au point un procédé de production de l'acier plus propre et plus efficace a connu début décembre sa première déconvenue.
Pour le syndicaliste, Ulcos est voué à l'échec : "Personne ne mettra d'argent privé dans Ulcos tant que la tonne de C02 s'échangera à 7 € et qu'il en faudra peut-être le double pour faire fonctionner Ulcos (électricité, maintenance, etc ...). Quel investisseur privé ira convaincre ses actionnaires de dépenser 200 Millions d'euros dans Ulcos, et, si ça marche, de perdre 15 à 20 Millions d'euros par an si on le fait fonctionner", demande-t-il.
Sur les investissements promis
Quant aux 180 millions d'investissement promis, il sont davantage alloués aux "dépenses d'OPEX (dépenses opérationnelles) et de maintenance" qu'à "l'investissement", déplore une nouvelle fois Edouard Martin.
Sur les choix stratégiques pour le site
Par ailleurs, le syndicaliste déplore ce qu'il présente comme de mauvais choix stratégiques. "Vouloir vendre une usine d'agglomération du minerai, deux Hauts Fourneaux et une aciérie. Sans la cokerie ! Alors que, pour faire de la fonte, il faut mélanger du minerai et du coke !", s'étonne le sidérurgiste.
Sur le bilan de l'action du gouvernement
"Les Français se font berner par Mittal", assure Edouard Martin. "Nous voulons reprendre notre destin en mains. Notre usine est viable. Elle est au top niveau mondial" conclut-il, rappelant qu'"un plan de reprise vous [François Hollande] a été soumis qui a été validé par Monsieur Montebourg, Ministre du Redressement Productif, et ses services". Citant l'abandon de ce plan induisant une nationalisation partielle, le syndicaliste revient sur le "système français" : "Il est beaucoup plus difficile de fermer une usine allemande, même moins compétitive que Florange, parce qu'en Allemagne, la sidérurgie est en co-gestion avec les syndicats".
"Seul dans notre système français, le gouvernement peut l'empêcher. Le gouvernement laissera-t-il faire?", demande Edouard Martin à François Hollande en conclusion de sa missive. "Monsieur le Président, après vos promesses, nous laisserez-vous être sacrifiés sans comprendre et arrêter cette mécanique à nous broyer ?"
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