Crise de l'énergie : de l'abandon du charbon à la possible réouverture de la centrale de Saint-Avold, retour sur une promesse d'Emmanuel Macron
Inaugurée en 1948, cette centrale thermique était l'une des plus importantes de France avant sa mise à l'arrêt fin mars. Pour le gouvernement, l'embargo sur l'énergie russe et le mauvais état du parc nucléaire français justifient la remise en route de ce site mosellan.
Une fermeture pas si définitive. La centrale électrique Emile-Huchet de Saint-Avold (Moselle), qui fonctionne au charbon et au gaz, pourrait être remise en service dès l'hiver prochain, a confirmé à franceinfo le ministère de la Transition énergétique, dimanche 26 juin. Cette reprise d'activité "temporaire" doit permettre à la France d'éviter les pénuries d'électricité, alors que le pays tente de se passer de l'énergie russe et que près de la moitié des réacteurs nucléaires du pays sont encore à l'arrêt pour diverses raisons. Franceinfo retrace les débats qui ont scellé, puis débloqué, le destin de cette centrale bien connue des Mosellans.
1En 2017, le candidat Macron promet l'abandon des centrales à charbon
C'est un engagement très attendu, par les écologistes notamment. "Durant les cinq ans [à venir], nous devons fermer toutes les centrales à charbon", répète, en février 2017, Emmanuel Macron, alors candidat à la présidence de la République. Une promesse qui se traduit après son élection par plusieurs annonces et une visite officielle. En octobre 2018, François de Rugy, alors ministre de la Transition écologique, se rend en effet dans cette commune frontalière de l'Allemagne pour s'entretenir, comme le rapporte Le Républicain Lorrain, avec les syndicats de la centrale.
Après plusieurs années de doute, marquées par une prise de conscience environnementale et une baisse de rentabilité de ce type d'énergie, les employés du site, inauguré en 1948, sont informés que leur activité s'arrêtera à l'horizon 2022. Une situation ubuesque selon certains, car pour faire face aux pics de consommation électrique hivernaux, l'est de la France devra alors se tourner vers l’Allemagne, qui produit en partie au charbon, avec notamment de la lignite, un produit de basse qualité et plus polluant que les autres types de charbon fossile.
2En novembre 2019, l'objectif "zéro charbon" est voté par les parlementaires
Malgré la démission de François de Rugy, le projet de loi Energie et climat fait son chemin jusqu'à l'Assemblée nationale, puis au Sénat, et est adopté à l'automne 2019. Le texte, qui vise la neutralité carbone à l'horizon 2050 ainsi qu'une baisse de 40% de la consommation d'énergies fossiles d'ici à 2030, mentionne la fermeture des dernières centrales au charbon avant la fin du premier quinquennat d'Emmanuel Macron, soit au printemps 2022. Cette loi fait écho à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de l'époque, et se voit complétée en juillet 2021 par la loi Climat et résilience, qui prévoit un accompagnement des salariés concernés par les fermetures de sites jugés trop polluants.
3Le 31 mars 2022, la centrale ferme… pour le moment
Comme promis, la centrale Emile-Huchet cesse effectivement son activité le 31 mars. L'épaisse fumée blanche qui planait au-dessus du site depuis plus de 70 ans disparaît elle aussi.
Mais tout n'est pas figé pour autant. Deux jours plus tôt, le ministère de la Transition écologique a ainsi fait savoir que la centrale pourrait reprendre du service l'hiver suivant, compte tenu des difficultés rencontrées par le parc nucléaire d'EDF et des conséquences du conflit en Ukraine. Le ministère assure alors que cette remise en service "ne remettrait pas en cause la trajectoire globale de sortie du charbon de la France".
Interrogés par l'AFP, des salariés de la centrale se disent prêts à reprendre du service si besoin, même s'il faut prévoir des "travaux de maintenance nécessaires" pour "remettre en état" certains équipements.
4Le 26 juin 2022, le gouvernement confirme que la réouverture est une option sérieuse
D'après des informations d'abord révélées par RTL, puis confirmées de source officielle, le gouvernement veut inclure la remise en route de la centrale mosellane dans son futur projet de loi sur le pouvoir d’achat. "Nous nous gardons la possibilité de pouvoir faire fonctionner la centrale de Saint-Avold quelques heures de plus si nous en avons besoin l'hiver prochain", explique le ministère de la Transition énergétique, dans un communiqué transmis le 26 juin. D'après Agnès Pannier-Runacher, à la tête de ce ministère, le charbon continuera à représenter moins de 1% de l’électricité produite en France.
Les salariés de la centrale Emile-Huchet, fraîchement retraités pour certains, attendent désormais le mois de juillet et l'examen de ce projet de loi pour savoir si leur site pourra bénéficier d'une dérogation. S'il est remis en route, le complexe lorrain épaulera la dernière centrale à charbon encore en activité en France, celle de Cordemais (Loire-Atlantique), qui bénéficie d'un sursis jusqu'en 2026 au plus tard.
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