Eolien en mer : pourquoi le parc offshore de Saint-Nazaire a mis onze ans à émerger
Ce parc éolien vise à produire 20% de l'électricité du département de Loire-Atlantique. Il doit être mis en service complètement d'ici à la fin de l'année.
Au large de Saint-Nazaire, Emmanuel Macron a visité, jeudi 22 septembre, le premier parc éolien offshore français, qui doit entrer complètement en service à la fin de l'année. Une bonne nouvelle dans le contexte de crise énergétique et un déplacement symbolique pour le chef de l'Etat qui a fait de l'éolien en mer une de ses priorités pour développer la part des énergies renouvelables en France.
Pour accélérer leur déploiement, le président de la République a annoncé un nouvel objectif : diviser par deux le temps de construction des parcs éoliens, et passer ainsi de 6 à 3 ans. "Nous avons besoin de réduire les délais. Depuis quelques mois, nous nous sommes dotés d'une stratégie nationale sur le plan de l'énergie, mais il n'y a jamais eu autant d'inquiétude sur ce sujet. Les temps ont changé", a-t-il promis.
Pour cela, le gouvernement prévoit un projet de loi sur les énergies renouvelables qui vise notamment à simplifier les procédures administratives. "Il sera présenté le 26 septembre en Conseil des ministres", a révélé Emmanuel Macron. En février dernier, il avait fixé un objectif ambitieux : construire 50 parcs éoliens en France à l'horizon 2050. Alors que le premier champ d'éoliennes en mer s'apprête à produire environ 20% de la consommation électrique du département de Loire-Atlantique, franceinfo revient sur la genèse compliquée de ce projet.
Parce que c'est le premier du genre
Espacées d'environ 1 km, les 80 éoliennes du projet offshore ont été implantées sur le banc rocheux de Guérande. Le site a été identifié dès la fin des années 2000. Attribué à une filiale d'EDF en 2012, il a ensuite fallu trois ans pour réaliser une enquête publique, puis quatre année de plus pour que la construction commence en septembre 2019, explique Le Figaro. Entre temps, de nombreuses enquêtes et recours ont été menés.
Les conséquences pour les espèces maritimes, les ressources halieutiques, les oiseaux migratoires ou sédentaires ont dû être prises en compte mais aussi des concertations avec les professionnels de la pêche et les populations locales. "Nous devions nous faire accepter comme de nouveaux voisins et nous insérer le mieux possible dans un territoire qui existait avant nous et qui nous survivra", affirme Olivier de la Laurencie, directeur du projet, dans Le Figaro.
"C'était la première fois qu'on construisait un parc éolien offshore en France, ajoute Nicolas Goldberg, spécialiste énergie chez Colombus Consulting, interrogé par franceinfo. Forcément, ça a pris du temps. A l'époque, même l'éolien terrestre était balbutiant, surtout en France." L'objectif était aussi de monter une filière industrielle française, ce qui a ajouté des contraintes aux porteurs de projet. "Il y avait notamment des critères d'emplois locaux, les éoliennes devaient aussi être assemblées dans une usine sur place", détaille Nicolas Golberg.
Parce qu'il a fait face à des réticences
La longueur du processus de construction émane en partie des réticences de la population locale. En observant ces mâts culminant à 180 m de haut au large de Saint-Nazaire, certains habitants de Loire-Altantique voient surtout le saccage de leur horizon. "On avait un paysage naturel, on m'a encore dit ce week-end qu'on avait maintenant un paysage presque industriel", se désole Bruno Schmit, premier adjoint au maire de Batz-sur-Mer, cité par France 3 Pays de la Loire.
Comme Batz-sur-Mer, plusieurs communes réclament donc une compensation financière pour la dégradation d'un de leurs atouts : la vue sur mer. "J'aimerais bien tenir celui qui nous a présenté les images au début du projet. Les éoliennes, ça devait être des allumettes à l'horizon. Là, je peux vous dire qu'on les voit très bien..." s'est aussi plaint un marin professionnel auprès du Parisien. Les négociations avec les professionnels de la pêche ont aussi été ardues. Les contours du site qui devait accueillir les mâts ont plusieurs fois été modifiés.
Parce que la France est en retard
Pour les professionnels du secteur, le manque de "vision globale" des gouvernements successifs explique aussi le retard accumulé dans le pays. "La France n'a pas fait un travail très fin de planification de ses façades maritimes pour dire : 'Je veux développer l'éolien offshore et voilà précisément où je veux mettre mes parcs. Et j'organise une concertation pour ces zones-là'", assurait Michel Gioria, délégué général de France énergie éolienne, à France 2 lors de la mise sur pied des premières éoliennes à Saint-Nazaire.
Résultat aujourd'hui, la France ne compte que quelques dizaines de turbines en mer, contre plus de 2 000 au Royaume-Uni, 1 500 en Allemagne et 559 au Danemark, selon des chiffres de Windeurope datant de 2020. Dans les prochaines années, la capacité française devrait néanmoins croître. "C'est un parc qui marque le début d'une longue série, rappelle Michel Gloria sur franceinfo. L'année prochaine, on va inaugurer Saint-Brieuc, le parc de Fécamp. Ensuite, ce sera Courseulles-sur-Mer en 2024-2025 et Dunkerque en 2025-2026."
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