Reportage Panneaux solaires : les fabricants français en difficulté face à la concurrence chinoise

La société Systovi, l'un des deux derniers fabricants qui assemblent des panneaux en France, prÚs de Nantes, cherche un repreneur.
Article rédigé par Lauriane Delanoë
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Paul Toulouse est, directeur gĂ©nĂ©ral de Systovi depuis deux ans et demi, cherche un repreneur pour son entreprise de panneaux solaires installĂ©e prĂšs de Nantes. (LAURIANNE DELANOÊ / RADIO FRANCE)

Le boom du photovoltaïque ne profite pas à tout le monde. Si les Français installent de plus en plus de panneaux solaires sur les toits de leurs maisons pour produire de l'électricité, trÚs peu sont fabriqués en France.

Face à la concurrence chinoise, l'un des deux derniers fabricants qui assemblent des panneaux en France cherche un repreneur au plus vite. Cette entreprise, c'est Systovi, installée à Carquefou, prÚs de Nantes : 87 salariés, et 15 ans d'existence.

Une ligne de production Ă  l'arrĂȘt

Dans l'usine de Loire-Atlantique, seule une ligne de production sur deux fonctionne. Pourtant, les machines sentent encore le neuf. "Cette ligne de production, on a fini de l'installer complÚtement en octobre dernier", explique Paul Toulouse, directeur général de Systovi depuis deux ans et demi.

"Aujourd'hui, on produit entre 300 et 400 panneaux par jour. Malheureusement, une partie de cette production est stockée, parce que le carnet de commandes ne suffit pas à vendre toute cette production".

Paul Toulouse, directeur général de Systovi

Ă  franceinfo

Les deux lignes de production de Systovi fonctionnent dĂ©sormais en alternance, avec deux Ă©quipes qui se relaient : une le matin et une l'aprĂšs-midi. (LAURIANE DELANOË / RADIO FRANCE)

Des panneaux deux fois moins chers en Chine

Un effondrement des commandes qui aurait débuté l'été dernier, à cause de la concurrence chinoise, explique Paul Toulouse. N'ayant plus accÚs au marché américain, les fabricants chinois bradent leurs panneaux solaires en Europe et "ont divisé le prix de leur panneau par deux", explique Paul Toulouse, qui illustre son propos. 

"Aujourd'hui, si vous ĂȘtes un particulier, et que vous voulez Ă©quiper votre maison avec des panneaux photovoltaĂŻques (ndlr : pour une installation globale, en plus du panneau en lui-mĂȘme), il vous en coĂ»tera en gros 1 000 euros de plus, sur une facture estimĂ©e Ă  8 000 euros, d'installer des panneaux français par rapport Ă  des panneaux chinois. Tout ce qui fait la qualitĂ© de la marque ne suffit plus Ă  convaincre les clients de payer cette diffĂ©rence de prix lĂ ".

Pour limiter les pertes, Systovi a réduit la cadence d'assemblage dÚs janvier. Désormais, les deux lignes de production de Systovi fonctionnent en alternance, avec deux équipes qui se relaient : une le matin et une l'aprÚs-midi. La direction a ainsi mis fin à des contrats d'intérim. Une stratégie insuffisante : la direction cherche donc un repreneur d'ici mi-avril. L'annonce bouleverse les salariés comme Yannick Fasseel, 46 ans. Ce conducteur de ligne a rejoint l'équipe il y 11 mois.

Yannick Fasseel, 46 ans, conducteur de ligne de Systovi depuis 11 mois. (LAURIANE DELANOË / RADIO FRANCE)

"Moi, j'ai fait ce choix de faire des panneaux solaires en me disant que c'est un format d'avenir. Le choix de créer en France quelque chose qui va nous permettre de sortir du réchauffement climatique, pour que le panneau solaire français ait un nom et une existence. Et de voir ce projet brisé, c'est décevant, il n'y a pas d'autre mot. C'est la déception totale".

"Ça fait des annĂ©es qu'on nous promet qu'on sera protĂ©gĂ©s"

Une dĂ©sillusion aussi pour AmĂ©lie Sicard, 41 ans. La responsable des achats depuis quatre ans et demi de Systovi rappelle les discours du gouvernement sur la rĂ©industrialisation et la souverainetĂ© française : "Ça fait des annĂ©es qu'on nous promet qu'on sera protĂ©gĂ©s, si finalement l'Europe et la France pouvait mettre des barriĂšres ou en tout cas, une Ă©galitĂ© par rapport Ă  cette concurrence qui est dĂ©loyale, ça pourrait nous aider".

Il y a bien en ce moment des discussions à l'échelle de l'Europe pour changer la réglementation et valoriser les fabricants français et européens. Mais ces nouvelles mesures arriveront "trop tard" pour la direction actuelle de Systovi. D'aprÚs Paul Toulouse, les effets significatifs ne se feront pas sentir avant deux ans.

Le directeur général appelle l'Europe et la France à soutenir les entreprises locales et à "rendre l'accÚs au marché européen un peu moins facile pour les panneaux importés". Pour que la France reste "maßtre de sa transition énergétique", il plaide pour le développement d'une filiÚre plus forte, à la fois pour l'assemblage et pour les composants. Car si Systovi assemble ses panneaux à Carquefou, le groupe importe les cellules photovoltaïques de Chine, comme la grande majorité de ses concurrents.

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