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Emmanuel Macron critiqué après avoir évoqué le cas de "femmes illettrées" aux abattoirs Gad

Le nouveau ministre de l'Economie a utilisé cette formule alors qu'il plaidait mercredi sur Europe 1 la cause des salariées de cette société d'abattage de porcs bretonne en difficulté. Mais cette sortie passe mal.

Article rédigé par franceinfo
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Des employés des abattoirs Gad à Josselin (Morbihan), le 22 octobre 2013. (FRED TANNEAU / AFP)

Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, a un "objectif" qu'il a rappelé mercredi 17 septembre au matin, au micro d'Europe 1 : "Créer de l'activité partout où c'est possible." Pour ce faire, il prône "une série de petits déverrouillages sur plein de sujets", notamment sur le coût et le délai d'obtention du permis de conduire. Pour illustrer son propos, il a pris un exemple : celui des salariées des abattoirs Gad, en Bretagne. Evoquant les "femmes illettrées de Gad", le ministre a suscité l'indignation d'auditeurs bretons, souligne Le Télégramme.

"Il y a dans cette société une majorité de femmes, il y en a qui sont, pour beaucoup, illettrées, a affirmé Emmanuel Macron. Pour beaucoup, on leur explique : 'Vous n'avez plus d'avenir à Gad ou aux alentours. Allez travailler à 50 ou 60 km'. Ces gens-là n'ont pas le permis de conduire. On va leur dire quoi ? Il faut payer 1 500 euros. Il faut attendre un an. Voilà, ça, ce sont des réformes du quotidien."

"Pourquoi pas débile profond ?"

"Il n'y avait aucun mépris envers les salariés", a souligné l'entourage d'Emmanuel Macron au Télégramme, concédant "un mot malheureux", "extrêmement blessant". Citée par le quotidien, une source proche du ministre a reconnu que cette expression "suscite une certaine émotion, mais il n'y avait aucune volonté de stigmatiser qui que ce soit. Le souhait du ministre est plutôt d'illustrer la difficulté d'un certain nombre de salariés de se reclasser", a poursuivi cette source.

Du côté des anciens salariés de l'abattoir, le mot ne passe pas. "On a eu le droit à tout, tous partis politiques confondus : 'France d'en-bas', 'sans-dents'. Pourquoi pas 'débile profond' ? Quand on pense que ce sont ces gens-là qui font la loi..." soupire Jean-Marc Detivelle, ancien délégué syndical FO du site de Lampaul, contacté par francetv info.

Des formations pour certains salariés

L'illettrisme concerne 20% des salariés de cette société d'abattage de cochons bretonne, selon Europe 1. Un taux bien supérieur à celui des Français âgés de 18 à 65 ans (7%), comme le souligne Rue89, mais que conteste Jean-Marc Detivelle. "Vu ce qu’ils sont en train de faire à l’Education nationale, dans quelques années, il aura peut-être raison, mais pour l’instant, les gens ont encore la chance d'apprendre à lire et à écrire", grince-t-il, dénonçant au passage le manque de professeurs ou les suppressions de classes. Selon lui, l'illettrisme ne concerne en fait que quelques personnes parmi les employés d'origine étrangère. "Ils ont appris à parler français, le lire et l'écrire, c'est différent", poursuit-il.

Selon lui, les quatre salariés "en difficulté avec la lecture et l'écriture" formés par Gref Bretagne appartiennent à cette catégorie-là. L'illettrisme est, en effet un obstacle au reclassement de ces salariés. L'abattoir de Josselin (Morbihan) a été placé en liquidation judiciaire avant une reprise éventuelle par Intermarché. Le projet de réouverture de l'abattoir de Lampaul-Guimiliau (Finistère), porté par des anciens cadres de Gad, a, lui, été abandonné.

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