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Pourquoi les HLM sont en guerre contre la baisse des APL

Aux yeux des bailleurs sociaux, réunis en Congrès les 26 et 27 septembre à Strasbourg, cette amputation budgétaire est une "ligne rouge" à ne pas franchir.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Vue de la ville de Belfort depuis la citadelle de Vauban, le 24 avril 2017. (PHILIPPE ROY / AFP)

Pas besoin de chauffeur de salle, l'exécutif s'en est chargé. Le 78e congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH) s'est ouvert mardi 26 septembre à Strasbourg sur fond de bras de fer avec le gouvernement.

L'exécutif veut en effet obliger les 723 bailleurs sociaux à baisser leurs loyers en échange de la diminution des aides personnalisées au logement (qui serait de 50 à 60 euros par mois pour les locataires des HLM). A l'arrivée, les HLM seraient privés de 1,4 milliard de ressources chaque année. Aux yeux des bailleurs sociaux, cette amputation budgétaire est une "ligne rouge" à ne pas franchir, car elle les fragiliserait considérablement. Franceinfo vous explique pourquoi.

La production de logements sociaux pourrait être freinée

Les bailleurs sociaux affirment que leurs ressources seraient amputées d'une somme correspondant aux trois quarts de leurs capacités d'investissement dans la production de logements neufs, "Le risque est grand de voir freinée, à Strasbourg comme ailleurs, la production de logements sociaux", a estimé le maire de Strasbourg, Roland Ries, à la tribune du congrès. 

Selon Le Monde, la capacité d'investissement des HLM sera "obérée de plus de moitié" par cette ponction. "A eux seuls, analyse le quotidien, ils construisent 100 000 logements par an, avec un concours minime de l’Etat d’à peine 1%." Parlant de "véritable coup de massue", Alain Cacheux, président de la Fédération des offices publics de l’habitat et ancien député socialiste, a évoqué une perte de 70% des capacités d’autofinancement des acteurs du logement social.

Une centaine d'organismes HLM pourraient se retrouver en difficulté

Telle qu'annoncée, la décision du gouvernement va s'appliquer à tous les HLM. Or ils ne sont pas tous dans la même situation. Une soixantaine font déjà l'objet d'un plan de redressement, selon le Le Monde, et le chiffre pourrait fortement augmenter avec les coupes claires dans leur budget. 

Les bailleurs sociaux estiment en effet que plus d'une centaine d'organismes HLM se trouveraient en difficulté si la mesure était adoptée, notamment dans les départements les plus en difficulté. Et le directeur général de Seine-Saint-Denis Habitat, Yves Nédelec, a expliqué au Figaro qu'il n'était pas possible de compenser cette baisse en "boostant la vente de logements sociaux" ou en "augmentant les surloyers", comme le suggère le gouvernement, vu la pauvreté des locataires. 

La rénovation des immeubles est menacée

Autre chantier compromis : la rénovation du parc. "Ce prélèvement de 1,4 milliard par an dans le budget des bailleurs sociaux représente une baisse aberrante au moment où il y a quatre millions de mal-logés !" s'indigne Manuel Domergue, de la Fondation Abbé Pierre. Et cela fait autant d'argent en moins pour la prévention des expulsions ou pour la rénovation d'un parc qui se paupérise." 

En effet, les bailleurs sociaux réhabilitent plusieurs dizaines de milliers d'immeubles par an. Ils devaient d'ailleurs, explique Le Figaro, "apporter deux milliards d'euros d'ici quinze ans pour permettre de rénover et démolir de vieilles barres d'immeubles". Avec cette contribution, poursuit le journal, "le PNRU (Programme national pour la rénovation urbaine) devait passer de 5 à 10 milliards d'euros d'ici quinze ans. Or, si on réduit leurs loyers, les bailleurs sociaux ne sont plus d'accord pour verser leur écot".

Les locataires des HLM craignent d'être précarisés

Ultime conséquence : la pression sera plus forte sur les locataires, sommés de quitter leur appartement s'ils ne répondent plus aux critères (surface devenue trop grande si les enfants ont quitté le foyer, par exemple). Le gouvernement souhaite en effet que les commissions d'attribution des logements HLM évaluent la situation des locataires tous les six ans, pour éviter que de grands logements ne soient sous-occupés. Ce qui risque de poser problème à nombre d'entre eux, dans un marché tendu.

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