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Taxe mondiale des multinationales : il y a des "trous dans le gruyère" qu'il faut "colmater", pointe Cécile Duflot

Le taux minimum de 15% de taxation des multinationales "est trop bas", critique la directrice générale d’Oxfam France. "Il fallait aller au moins à 21%", sinon elle ne va "profiter qu'aux pays riches".

Article rédigé par franceinfo
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Cécile Duflot, ancienne ministre et directrice générale d'Oxfam France, invitée de franceinfo le 6 septembre 2019. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

La taxe sur les multinationales "va profiter aux pays riches" et il y a des "trous dans le gruyère" qu'il faut "colmater", a dénoncé vendredi 2 juillet sur franceinfo Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France, membre de la coalition People’s Vaccine Alliance. 130 pays ont trouvé un accord pour instaurer une taxation mondiale d'au moins 15 % visant les grandes multinationales. L'OCDE prévoit 150 milliards de dollars de recettes fiscales de plus par an.

franceinfo : Partagez-vous l'enthousiasme général ?

Cécile Duflot : Je ne partage pas cet enthousiasme. D'abord parce que c'est un accord qui s'est fait au profit des pays riches et ensuite parce qu'il laisse de nombreuses failles. Pour ne pas être complètement rabat-joie, il y a un quand même un élément positif, c'est quand même le retour du multilatéralisme, la démonstration qu'on peut avoir un accord international qui engage la quasi-totalité des pays du monde. En revanche, 15 %, c'est un taux très bas qui va aussi par la construction du système, profiter aux pays riches puisque 60 % des recettes de cet impôt minimum seront captées par les pays du G7 exclusivement.

Quel taux aurait-il fallu choisir ?

Au départ, Joe Biden avait parlé d'un taux minimum à 21 %. On craint que ce taux de 15 % devienne une espèce de plancher pour tous, avec une concurrence fiscale qui va devenir encore plus agressive. S'il y a eu cette décision, c'est parce que les pays européens et d'autres étaient en passe de prendre des dispositions qui allaient être très fermes, notamment à l'égard des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). C'est important de ne pas perdre de vue que ce taux minimum est trop bas. Il fallait aller au moins à 21 %. On pensait que ce plancher était intéressant. C'était 12 milliards en plus. Les pays en voie de développement avaient tous dit qu'ils voulaient un taux supérieur à 20 %.

C'est un accord qui manque d'ambition, selon vous ?

C'est certain. Mais surtout, on a créé les trous dans le gruyère.

"Comme il va y avoir une fraction minime des bénéfices des 100 entreprises les plus rentables au monde qui vont être taxées, de fait, on crée les possibilités de continuer à faire de l'évasion fiscale."

Cécile Duflot, directrice générale d'Oxfam France

à franceinfo

Le problème, c'est que ce taux plancher a des trous à l'intérieur de son dispositif. Donc, il faudrait déjà colmater ces trous. C'est vraiment une priorité pour éviter qu'on puisse faire un taux au minimum factice. Les négociations sont encore en cours. Les choses ne sont pas terminées. On a entendu Bruno Le Maire qui disait que pour lui, 15 % c'était un minimum et qu'il voulait aller plus loin. Mais on sait bien que vu la nature de la réunion, la nature des annonces, on a peu d'espoir sur le fait d'augmenter ce taux. Donc, il faut a minima supprimer toutes les trappes qui sont fabriquées pour que cette taxation minimum ne devienne pas un gruyère.

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