Un journal condamné pour harcèlement moral et sexuel "environnemental"
Pour la première fois, ce ne sont donc pas des propos ou des comportements sexistes qui ont été jugés par le conseil prudhommal de Tours, mais bien une ambiance générale misogyne. La victime était journaliste. Elle travaillait à la locale de Châteauroux du journal La Nouvelle République .
Des fonds d'écrans pornographiques, des "blagues" sexistes, des commentaires insultants… le quotidien de la journaliste était devenu insupportable. Marilyn Baldeck, Déléguée générale de l'Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail, illustre cette "ambiance" et donne des exemples : "Ces collègues avaient un entretien téléphonique avec une autre journaliste et la traitaient après avoir raccroché de connasse, de salope. Elle était confrontée à de la pornographie, des propos régulièrement hyper sexistes, hyper misogynes… "
Et cette situation au travail était d’autant plus difficile que la hiérarchie ne bouge pas. Alertée, la direction minimise : elle évoque une atmosphère masculine, drôle. Ce sont ces arguments qu'elle développe auprès de Pascal Laurent, le secrétaire du CHSCT de "la NR", saisi dans cette affaire : "Ça aussi ça a été insupportable pour la journaliste, comme si c’était de l’humour ."
Pour les dirigeants, "c’est quelque chose qui passe très bien, on a le droit de parler comme ça auprès de ses confrères, il n’y avait aucune raison de s’en formaliser ."
"Stratégies viriles de cohésion des équipes"
Marilyn Baldeck confirme : ces "ambiances" de travail sont monnaie courante. Elles doivent cesser : "Le harcèlement sexuel est considéré comme des manifestations qui soudent les équipes. Nous, on a entendu des choses comme ça dans certains dossiers, des 'stratégies viriles de cohésion des équipes' qui donc n’ont pas lieu d’être sanctionnées, d’être stoppées ."
Cette fois, les prud'hommes de Tours en ont décidé autrement : ils ont condamné le journal à verser à la journaliste 10.000 euros de dommages et intérêts et 15 mois de salaire. La Nouvelle République l'avait licenciée pour inaptitude en janvier 2013. La direction a fait appel du jugement.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.