La réforme des retraites "ne devrait pas s'appliquer brutalement" : les réponses de Magali Boissin à vos questions
La journaliste de France 2 a répondu jeudi aux interrogations des internautes sur le projet gouvernemental de fusionner 42 régimes existants en un unique système à points universel.
Les inquiétudes se multiplient avec le big bang annoncé de la réforme des retraites en 2025. Le premier ministre, Edouard Philippe, a précisé, jeudi 12 septembre devant le Conseil économique, social et gouvernemental, le calendrier et la méthode retenue pour le projet de loi, qui vise à fusionner les 42 régimes existant en un système universel unique. Le texte devrait être voté à l'été 2020. La journaliste de France 2 Magali Boissin a répondu à vos questions.
Ce sont donc les personnes nées à partir du 1/01/1964 qui seront concernées ? (@BM)
Le Premier ministre a annoncé ce matin que la réforme des retraites concernerait uniquement les personnes nées après 1963. Effectivement, toutes les personnes nées à partir du 1er janvier 1964 seront concernées.
Et concernant les personnes nées en 1964, le système s'appliquera-t-il brutalement ? Concernant le dispositif "carrières longue", sera-t-il modifié d'un coup pour repousser de deux ans par exemple la date de retraite des personnes nées en 1964 ? Merci, cordialement. (@anonyme)
Non, le système ne devrait pas s'appliquer brutalement. La réforme des retraites devrait commencer à entrer en vigueur en 2025, mais un système transitoire devrait être prévu. Selon le Premier ministre, le nouveau système ne s'appliquera entièrement qu'à partir de 2040.
Concernant le dispositif "carrière longue", pas de modification brutale non plus a priori, mais un nouveau système de calcul pour tous ceux ayant commencé à travailler avant l'âge de 20 ans. Les détails ne sont pas encore connus et feront partie de la négociation dans les prochains mois.
Je voudrais savoir si les heures supplémentaires défiscalisées compteront dans le calcul de la retraite. Merci. (@anonyme)
Oui, évidemment, les heures supplémentaires – qu'elles soient défiscalisées ou non – correspondent à du temps de travail payé par votre employeur. Elles donneront donc droit dans le nouveau système à un certain nombre de points, qui serviront à calculer votre pension.
Comment va se passer la transition après 2025 ? Est-ce qu'on gardera les droits acquis dans l'ancien système ? (@anonyme)
La question de cette transition entre 2025 et 2040 est évidemment cruciale. Mais là encore, rien n'est tranché. Seule précision ce matin du Premier ministre : il promet que les droits acquis dans le cadre du régime actuel seront conservés à 100%.
C'est une réforme qui se veut universelle, mais pouvez-vous nous citer les professions salariées qui en sont a priori exclues ? Merci. (@anonyme)
C'est tout l'objectif du gouvernement. Un régime universel de retraite qui remplace les 42 régimes de retraite existants et donc, en théorie, entraîne la fin des régimes spéciaux. Mais ce n'est pas si simple. Le gouvernement promet déjà des aménagements pour certaines professions comme les militaires ou les policiers. Des négociations sont aussi en cours pour des professions avec un niveau de pénibilité important, comme les infirmiers, ou alors pour des professions qui perdraient beaucoup en niveau de pension avec la réforme, comme les enseignants.
Faut-il craindre de grosses manifestations contre cette réforme ? (@anonyme)
Oui, plusieurs manifestations sont déjà programmées lors de cette rentrée, comme la grève de demain [vendredi] des agents de la RATP en région parisienne. La CGT appelle à une manifestation le mardi 24 septembre. Force ouvrière a choisi une autre date, le 21 septembre. Les professions libérales, comme les médecins et les avocats, manifestent lundi prochain.
N'était-il pas prévu une discussion pendant un an ? A quoi servira cette discussion, si tout est déjà décidé et annoncé ? (@anonyme)
Après déjà de longs mois de consultations, le gouvernement a confirmé que la réforme des retraites ferait encore l'objet de "consultations citoyennes" de fin septembre jusqu'à la fin de l'année, pour aboutir à un projet de loi d'ici l'été prochain. Des concertations avec les partenaires sociaux sont aussi au programme jusqu'en décembre. Selon le gouvernement, toutes les options sont encore sur la table, comme la question de l'âge de départ à la retraite ou la durée de cotisation. Mais il est vrai que certains syndicats comme la CGT assurent aujourd'hui ne plus croire à la négociation promise par le gouvernement.
J'ai parfois dû travailler à mi-temps pour élever mes enfants. J'imagine que je risque d'être pénalisée au moment du calcul de ma retraite ? (@anonyme)
Une seule certitude : le calcul de la retraite pour un salarié du privé ne se ferait plus sur les vingt-cinq meilleures années de carrière, mais tout au long de cette carrière. Les salariés qui ont eu des carrières hachées avec parfois des périodes à mi-temps, par exemple, pourraient être perdants. Mais tout dépend du projet de loi définitif, et si certains aménagements sont retenus à l'issue des négociations.
J'aimerais savoir comment sera calculée la valeur du point ? (@anonyme)
J'adorerais le savoir, mais c'est un calcul que personne ne connaît pour le moment !
Les professions libérales seront très fortement touchées par un doublement (!) de leurs cotisations : de 14% à 28%... Ce serait bien d'en parler aussi. (@anonyme)
Oui, c'est effectivement ce qui est prévu pour les professions libérales. Faire passer le taux de cotisation de 14 à 28%, jusqu'à 40 000 euros de revenus annuels. L'objectif de cette réforme est une harmonisation des taux de cotisation entre les différents systèmes. Mais selon les représentants des professions libérales, c'est une augmentation des charges inacceptable. Là aussi, on peut imaginer que les négociations à venir pourront entraîner des évolutions.
La réforme étant applicable dans bien longtemps, sera-t-elle annulée en cas de changement politique ? (@anonyme)
Bonne observation. En 2025, la réforme commencera à être appliquée sous le prochain quinquennat et on peut imaginer que le choix des Français à la prochaine élection présidentielle en 2022 peut avoir un impact. En cas de changement de majorité, rien n'empêcherait une nouvelle réforme ou un retour en arrière, même si cela pourrait être un peu complexe. En 2040, lorsque la réforme doit s'appliquer en théorie entièrement, plus de trois quinquennats se seront écoulés, donc délicat de prédire l'avenir !
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