Cet article date de plus de six ans.

Client de BlaBlaCar condamné en Italie : "Je suis vaccinée, je ne veux plus jamais faire appel" à ce site, déclare sa compagne

Charlène et son compagnon Andrea recouraient pour la première fois à BlablaCar. Le baptême s'est terminé avec une condamnation à de la prison avec sursis pour Andrea, les deux passagers qu'ils avaient pris en covoiturage étant sans-papiers. Dépassée par la situation, Charlène dénonce le manque de soutien de BlablaCar.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Deux clients de BlaBlaCar, arrêtés pour aide à l'entrée illégale sur le sol italien, déplorent le manque de soutien de la plateforme. (KENZO TRIBOUILLARD / AFP)

Andrea, un client italien de BlaBlaCar, qui avait pris en covoiturage le 10 août, deux passagers qui se sont avérés être sans-papiers, pour un voyage Paris-Rome, a été condamné le 11 août 2018 en Italie, à neuf mois de prison et 24 000 euros d'amende, le tout avec sursis, pour aide à l'entrée illégale sur le sol italien, a révélé vendredi 31 août franceinfo. "C'est à la sortie du Tunnel du Mont Blanc, une fois arrivés côté italien, qu'on a été arrêtés", a précisé Charlène, la compagne d'Andrea.

Andrea, un Italien de 26 ans voyageait avec sa compagne, une Française âgée de 28 ans. Ils vivent en île-de-France et c'est la première fois qu'ils s'inscrivaient sur la plateforme de covoiturage, pour réduire le coût de leur voyage Paris-Rome. "On était à mille lieux de penser que c'étaient des sans-papiers", a indiqué Charlène la compagne d'Andrea, de nationalité italienne. Charlène assure qu'"à aucun moment" le site BlaBlaCar "n'a réclamé une pièce d'identité" à son compagnon, Andrea.

Pour Charlène, Andrea a été mal défendu par son "avocat commis d'office qui lui a conseillé de plaider coupable". Charlène critique également l'absence de "numéro de téléphone" sur le site. "On ne peut que leur envoyer un message via un formulaire classique". Et "ils ont mis plus de 14 heures à répondre" à un de mes messages. "Je suis vraiment vaccinée et je ne veux plus jamais faire appel à BlaBlaCar", assure Charlène, à franceinfo.

franceinfo : Avez-vous vérifié l'identité des deux passagers en question, comme le conseille le site BlaBlaCar ?

Non, ce n'est pas ce qu'on a fait. On était à mille lieux de penser que c'étaient des sans-papiers. À mon compagnon, à aucun moment, on n'a réclamé de pièce d'identité lors de l'inscription sur le site. À moi, on m'a demandé la plaque d'immatriculation du véhicule pour l'annonce. Il y avait des informations facultatives à fournir dont la pièce d'identité, mais c'était facultatif et pas du tout bloquant pour publier l'annonce. C'est à la sortie du tunnel du Mont-Blanc, une fois arrivés côté italien, qu'on a été arrêtés. Les policiers ont procédé aux contrôles des documents. Nous avons présenté nos pièces d'identité et quand ils ont vu qu'il y avait un passager qui faisait mine de chercher la sienne et ne la trouvait pas, ils l'ont conduit au poste de police côté français pour vérifier son identité [un homme d'origine marocaine]. Ils se rendent compte qu'il n'est pas capable de donner deux fois la même identité, ni le même nom, ni le même prénom, ni son âge. Ils ont passé deux heures à l'interroger pour éclaircir la situation.

Comment vous êtes-vous retrouvés en garde à vue avec votre compagnon Andrea ?

Quand les policiers ont appelé le procureur italien pour l'informer qu'il y avait un sans-papiers qui tentait de rentrer clandestinement en Italie, ils ont demandé la procédure à suivre. Le procureur a tenu à ce que la procédure s'applique aussi à ceux qui conduisaient le véhicule et donc à Andrea qui a été placé en garde à vue et mis en examen pour une comparution le lendemain. Il avait un avocat commis d'office qui lui a conseillé de plaider coupable pour tenter d'avoir la peine la plus légère possible, car l'avocat lui a dit que c'était très grave ce qu'il avait fait et qu'il encourait une peine très importante. Andrea n'a pas eu le choix, il ne voulait pas plaider coupable. Il a été condamné à neuf mois de prison et 24 000 euros d'amende avec sursis et le véhicule, qui avait été prêté par ma sœur, a été confisqué. On ne peut pas faire appel du jugement puisque [Andrea] a plaidé coupable. Le seul moyen ce serait de se pourvoir en cassation, parce qu'il a été mal conseillé par son avocat. Andrea a maintenant un casier judiciaire en Italie, il a une épée de Damoclès sur la tête pour cinq ans. Une grosse dette envers ma sœur car on n'a pas pu lui rendre le véhicule qu'elle nous avait prêté. Une fois la procédure terminée, les policiers nous déposent à une gare où on se retrouve avec tous nos bagages. On a pris trois trains ensuite pour arriver jusqu'à notre destination finale à Latina, où on est arrivés à 23h

Avez-vous essayé de joindre BlaBlaCar à un moment donné pour leur exposer la situation ?

Dès que j'ai compris que ça allait être compliqué de repartir tout de suite, j'ai essayé de joindre BlaBlaCar. Le problème, c'est que sur le site internet il n'y aucun moyen de contact, aucun numéro de téléphone. On ne peut que leur envoyer un message via un formulaire classique. Je leur ai envoyé deux fois un message via ce formulaire, le vendredi soir. Je n'ai pas eu de réponse, je leur ai envoyé un message aussi sur Messenger via Facebook. Ils ont mis plus de 14 heures à répondre à ce message. Je voulais qu'ils [BlaBlaCar] m'aident à nous sortir de là, qu'ils nous trouvent une solution, qu'ils arrivent à nous trouver un bon avocat, pour nous disculper et nous sortir de cette situation de dingue. C'est à eux [BlaBlaCar] qu'on s'est fié pour prendre des passagers. Ils ont touché une commission pour ce voyage. Ils peuvent être à nos côtés pour traverser ces épreuves parce que c'est assez lourd à vivre. J'ai finalement été en contact avec eux au téléphone. C'est eux qui nous joignaient en numéro privé, car c'est impossible d'être en contact avec eux pour les joindre directement. On était vraiment à leur merci. J'ai passé des journées entières accrochée à mon téléphone à attendre un appel de BlaBlaCar. Ce que j'attends d'eux, c'est qu'ils nous prennent en charge et qu'ils nous soutiennent, c'est-à-dire, la perte du véhicule, tous les frais d'avocat, les billets d'avion qu'on a dû prendre pour rentrer et le préjudice que nous avons vécu. C'est vraiment lourd à porter

Le site BlaBlaCar s'est-t-il engagé à vous aider après toutes vos péripéties ?

Oui, j'ai eu quelqu'un de BlaBlaCar qui n'a jamais voulu nous donner ni son nom, ni sa fonction. Il nous a assuré dans un premier temps que BlaBlaCar prendrait tous nos frais de transports au moins pendant la période des vacances. Quand on lui a demandé d'écrire cela noir sur blanc, il a été beaucoup plus vague et le lendemain il s'est complètement rétracté en disant finalement que BlaBlaCar ne prendrait rien en charge en-dehors du trajet pour arriver jusqu'à Latina. [Depuis la publication de cet article, la société BlaBlaCar nous a fait savoir qu'elle réfutait cette version des faits]. Je suis vraiment vaccinée et je ne veux plus jamais faire appel à BlaBlaCar. Je m'interroge aussi sur les autres sites qui proposent ce genre de services entre particuliers.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.