Trois questions sur l'arrondi solidaire en magasin, qui permet de faire un microdon à une association directement à la caisse

Ce réflexe solidaire, né il y a 15 ans, repose sur un geste facile au moment de payer en caisse, mais ses modalités restent floues, ce qui peut générer de la méfiance.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Un terminal de paiement d'un magasin Franprix propose l'arrondi aux clients. L'enseigne a été la première à adopter ce programme, en 2009. (CHRISTOPHE MORIN / MAXPPP)

Appuyer sur la touche verte pour donner quelques centimes à une association. Grâce à l'arrondi solidaire, tout client d'un magasin partenaire peut effectuer un microdon en passant à la caisse. L'argent récolté est ensuite reversé à une association. Depuis son lancement en 2009, le dispositif a permis de récolter 80 millions d'euros au profit de 1 800 associations, selon Microdon, l'entreprise qui en est à l'origine.

Cette année, 13 millions d'euros de dons ont été recueillis pour 300 structures bénéficiaires grâce à l'arrondi solidaire proposé par quelque 15 000 magasins de 42 enseignes différentes. Même si 42% des Français ont déjà fait un microdon en caisse, selon une étude OpinionWay pour Microdon de mai 2024, quelques idées reçues subsistent autour de cette façon, simple mais floue, de faire preuve de générosité.

1 En quoi consiste l'arrondi solidaire exactement ?

Au moment de payer là la caisse, le choix est laissé au client de procéder, ou pas, à l'arrondi solidaire. Au supermarché ou dans une enseigne plus spécialisée, chacun peut soit presser la touche verte, pour donner son accord d'arrondir le total, soit la touche rouge, pour décliner cette opportunité. "On a développé la générosité embarquée, c'est l'idée de greffer une opportunité de faire un don dans les transactions du quotidien", explique Pierre-Emmanuel Grange, le fondateur de Microdon. L'entreprise s'occupe d'implanter la technologie nécessaire au sein des terminaux de paiement des magasins partenaires et de récolter les dons faits par ce biais afin de le verser aux associations.

Tous les magasins ne proposent pas l'arrondi solidaire. Dans ceux qui sont partenaires de Microdon, des campagnes de collecte de dons sont alors paramétrées pour afficher la question "Voulez-vous arrondir pour telle ou telle association ?" avant de faire son code de carte bancaire. Les associations bénéficiaires varient d'un magasin à un autre. Les campagnes de dons se déroulent pendant une certaine durée, de quelques jours à plusieurs mois et peuvent être actives seulement à quelques heures de la journée. Il est généralement proposé d'arrondir à l'euro supérieur mais aussi de faire un don fixe, de 50 centimes par exemple. "En fonction des enseignes, du profil de leurs clients ou de la fréquence dans le magasin, on ajuste les paramètres de campagne", précise Pierre-Emmanuel Grange.

Dans un supermarché Franprix à Paris pratiquant l'opération "L'Arrondi", le 18 septembre 2013. (ERIC PIERMONT / AFP)

Mais sur place, il n'est pas toujours évident de savoir à quelle association est destiné le microdon proposé. En théorie, de petites affiches sont censées indiquer la possibilité de faire l'arrondi, mais dans les faits, cette information n'est pas très visible, en particulier dans les enseignes alimentaires. C'est "au moins écrit sur le terminal avant de payer et puis sur le ticket quand vous avez fait un arrondi", rappelle le fondateur de Microdon. Mais il admet qu'"on n’a pas toujours le temps de voir à qui l'on donne" et assure que "c'est un gros chantier pour 2025 : essayer d'être plus identifié dans les magasins et plus visible sur le terminal bancaire".

2 Est-on certain que tout l'argent va bien aux associations bénéficiaires ?

Selon l'étude d'OpinionWay de mai dernier, "66% des personnes interrogées souhaiteraient avoir plus d’informations sur la façon dont les dons sont employés". Tous sont reversés par Microdon aux associations indiquées lors de l'arrondi en caisse, assure l'entreprise. "À la fin de la période de campagne de dons, on fait des appels de fonds qui correspondent au cumul de tous ces centimes. L'enseigne est prélevée automatiquement de ces sommes et c'est versé directement aux associations bénéficiaires", précise son fondateur.

Microdon prélève néanmoins une commission de 10% sur les dons récoltés. Les associations contribuent ainsi pour un tiers au financement de la structure. Les deux autres tiers sont couverts par les entreprises partenaires qui paient pour les coûts d'intégration du projet dans leur système et pour sa maintenance. Par ailleurs, Microdon fait valoir plusieurs gages de confiance. L'entreprise est agréée "Entreprise solidaire d'utilité sociale" par l'État et est une filiale de la Banque Postale. "On est beaucoup contrôlé", souligne Pierre-Emmanuel Grange. 

Pour certaines associations, ces microdons, qui, cumulés, deviennent des millions, "pèsent pour 20 à 30% de leur budget annuel", assure Pierre-Emmanuel Grange. Tout récemment, 1,8 million d'euros ont été récoltés pour plusieurs associations à l'occasion d'Octobre Rose.

3 Les entreprises partenaires bénéficient-elles d'avantages fiscaux ?

Dans la mesure où les dons aux associations peuvent faire l'objet d'une défiscalisation, certaines personnes pensent, à tort, que les enseignes qui proposent l'arrondi solidaire bénéficient d'avantages fiscaux. Une méfiance tenace bien qu'infondée, si bien que ce point est abordé clairement dans la Foire aux questions (FAQ) de Microdon : "Non, l’enseigne ne bénéficie pas d’une défiscalisation liée au montant des dons collectés : ce sont bien les clients qui donnent et non l’enseigne, qui est organe collecteur." De même, des enseignes partenaires, comme Monoprix, tiennent à éclaircir cette question.

"Non, Monoprix ne bénéficie pas d’une défiscalisation liée au montant des dons collectés. [...] De même, Monoprix ne récupère aucune commission sur les dons."

Monoprix

sur son site Internet

Quant aux clients, les sommes minimes qu'ils versent ne leur permettent pas de solliciter une déduction fiscale.

Par ailleurs, Pierre-Emmanuel Grange assure que ni Microdon, ni les enseignes n'ont intérêt à procéder à de la défiscalisation : "Bien évidemment qu'il n'y a aucun reçu fiscal qui n'est émis et qui n'est établi au nom de l'enseigne pour les dons de ses clients, ce serait une fraude." Microdon est l'intermédiaire de confiance qui s'assure que ce n’est pas fait : "Dans tous nos contrats, il est bien expliqué aux associations qu'elles n'ont pas le droit d'émettre de reçus fiscaux pour des entreprises et aux entreprises qu'elles ne peuvent pas les demander aux associations. Et ça ne s'est jamais vu." Pour autant, les entreprises qui participent à l'opération de l'arrondi solidaire y trouvent un avantage. "Elles veulent améliorer leur image, affirme le fondateur de Microdon, et cochent des cases de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE)".

Microdon propose un autre outil, le don sur salaire, qui permet aux salariés de donner quelques centimes ou quelques euros de leur revenu à une association. L'employeur peut abonder le don de ses salariés et, dans ce cas, l'entreprise peut demander une déduction fiscale, puisqu'elle aussi participe au don.

Lancez la conversation

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.