: Vidéo "Acheter un pantalon est un luxe" : de la Bulgarie à l'Espagne, ces Européens (sur)vivent avec le salaire minimum
A l'occasion des élections européennes, franceinfo a interrogé des habitants d'Europe de l'Est, du Sud et de l'Ouest, vivant tant bien que mal avec le smic local.
L'idée fait peu à peu son chemin. Et si les dirigeants européens instauraient, à l'échelle du continent, un salaire minimum ? Dans un entretien au Parisien, mardi 9 avril, la tête de liste La République en marche pour les élections européennes, Nathalie Loiseau, a également plaidé pour un smic "dans tous les pays de l'Union européenne", équivalent à "au moins la moitié du salaire médian".
A l'heure actuelle, 22 des 28 Etats membres de l'Union européenne disposent d'un salaire minimum national, rappelle Eurostat. Seuls le Danemark, l'Autriche, l'Italie, Chypre, la Finlande et la Suède n'en ont pas. Et d'un pays à l'autre, les disparités sont criantes. Le smic en Bulgarie, le plus faible d'Europe, est de 286 euros brut. Il atteint 700 euros brut au Portugal, 1 521 euros brut en France, et jusqu'à 2 071 euros brut au Luxembourg, développe l'organisme de statistiques de l'Union européenne. De la Bulgarie à l'Espagne, en passant par la Grèce et la France, franceinfo a interrogé des "smicards" européens sur leurs conditions de vie.
Un quotidien au centime près
Assistante éducatrice dans un jardin d'enfants à Sofia (Bulgarie), Sylvia Nikolova, 64 ans, "gagne 285 euros par mois". Natalia Higueras, jeune trentenaire madrilène, cumule deux emplois lui rapportant 200 et 700 euros mensuels. A Athènes, Nikos Tzortzis, 35 ans et diplômé de psychologie, touche 550 euros net pour un travail dans un centre d'appels. Et dans le sud de la France, David Gutmann et sa femme sont tous les deux rémunérés au smic pour un emploi dans une société de conserverie de canard. Le père de famille a même lancé une activité d'auto-entrepreneur en parallèle, "pour pouvoir finir les fins de mois". Tous racontent un quotidien au centime près.
Je dois vivre avec mon compagnon pour être indépendante : 40% de mon salaire part dans le loyer. Les dépenses mensuelles d'électricité, c'est 80 euros. Le forfait téléphonique, 20 euros. A la fin, il te reste environ 100 euros pour toi.
Natalia Higuerasà franceinfo
Ces Européens multiplient ainsi les sacrifices, souvent sans pouvoir épargner le moindre euro. David Gutmann se remémore ainsi cette semaine "où le cumulus nous a lâchés". "On est restés une semaine sans eau chaude. Parce qu'on n'avait pas d'argent pour pouvoir le remplacer", relate-t-il. Le couple, dont la moitié du salaire part d'emblée dans le remboursement de leur prêt immobilier, se trouve dans l'incapacité de financer les logements étudiants de leurs enfants. Quant à la possibilité d'avoir des loisirs, "il n'en est pas question", lâche Nikos Tzortzis depuis Athènes (Grèce).
La seule chose que vous pouvez faire, c'est sortir pour un café ou une bière.
Nikos Tzortzisà franceinfo
"Pour moi, un luxe, c'est acheter un pantalon ou dîner avec les amis", renchérit Natalia Higueras.
Besoin de plus d'argent pour s'en sortir
Plusieurs dépendent encore, à 35 ou 64 ans, de l'aide de leurs proches. "Je vis avec ma mère, explique Sylvia Nikolova. Le logement est à elle, je ne paye pas de loyer." De son côté, Nikos Tzortzis a besoin de l'aide financière de ses parents, de l'ordre de 150 à 300 euros chaque mois. Un salaire européen ? Ces salariés aux portes de la pauvreté réclament avant tout une augmentation, car survivre avec un smic en Europe s'avère de plus en plus difficile. "Pour avoir une vie normale, il me faudrait environ 800 euros de salaire", imagine Nikos Tzortzis. "Je pense qu'il me faudrait entre 1 200 et 1 300 euros pour vivre une vie normale et pouvoir mettre un peu de côté", poursuit Natalie Higueras. Les Gutmann auraient, quant à eux, chacun besoin de 400 à 500 euros de plus chaque mois pour sortir la tête de l'eau : "Là, déjà, vous pouvez vous dire : 'bon, voilà, là je vais peut-être commencer à vivre'."
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