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Vrai ou faux Législatives 2022 : le programme de la Nupes contient-il 30 fois le mot "interdiction" et 20 fois "taxation", comme l'affirme Emmanuel Macron ?

Article rédigé par Alice Galopin
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, lors d'une conférence de presse sur les propositions économiques de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), à Paris, le 7 juin 2022. (GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP)

Si les chiffres du président de la République se vérifient, ils cachent des mesures qui reviennent plusieurs fois dans les propositions de l'alliance de la gauche. Certaines ont même déjà été votées durant le premier quinquennat du chef de l'Etat.

A l'approche des élections législatives, Emmanuel Macron tacle ses adversaires. Dans une interview à la presse régionale, publiée jeudi 2 juin, le président de la République a fustigé les propositions de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale. "J'ai lu le programme de la Nupes. Ils y citent 20 fois le mot 'taxation' et 30 fois le mot 'interdiction', ce qui donne une idée assez claire de l’esprit du programme", a attaqué le chef de l'Etat.

Dans la foulée, l'argument a été repris par des membres de la majorité présidentielle. Parfois avec des chiffres quelque peu différents. La nouvelle ministre de la Transition écologique, Amélie de Montchalin, a par exemple recensé "35 fois le mot interdire". Olivier Véran, désormais ministre chargé des Relations avec le Parlement, a de son côté comptabilisé "41 fois" les termes "interdit ou interdire ou interdiction".

Le leader de La France insoumise "propose une société où soit tout est interdit, soit tout est organisé", s'est de son côté emporté Christophe Castaner, chef de file des députés LREM. Derrière ces chiffres, que prévoit réellement le programme de l'alliance de la gauche ?

Certaines mesures apparaissent plusieurs fois

Une recherche par mots-clés dans le programme de la Nupes permet de vérifier qu'il contient effectivement 41 fois les mots "interdiction" ou "interdire", comme l'a déclaré Olivier Véran. Toutefois, ces occurrences ne renvoient pas toutes à des propositions de l'alliance de la gauche. Le mot "interdiction" apparaît par exemple dans la mention du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires des Nations Unies, entré en vigueur en 2021. Par ailleurs, certaines propositions de la Nupes sont mentionnées à plusieurs reprises dans le programme, d'où certaines répétitions.

Au total, selon les calculs de franceinfo, le programme de la Nupes comporte 36 propositions différentes mentionnant des "interdictions". Un chiffre plutôt proche de celui avancé par Amélie de Montchalin. Mais la Nupes souhaite parfois renforcer certaines interdictions déjà existantes, les appliquer "réellement" ou "immédiatement". Ainsi, la coalition de gauche veut "interdire immédiatement les plastiques à usage unique". Il s'agit en réalité d'accélérer le calendrier, puisque la France s'est déjà fixée comme objectif de les prohiber "d'ici 2040". Une "interdiction" votée... lors du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.

Des interdits en faveur de l'écologie...

De la même manière, la Nupes s'engage à "interdire réellement la location des passoires thermiques". Une loi dans cet esprit a également été adoptée durant le mandat d'Emmanuel Macron, mais elle ne concerne pas tous les logements énergivores. Sur la maltraitance animale, le programme mentionne aussi l'interdiction de certaines pratiques, comme l'élevage des poules et des lapins en batterie, ou encore le broyage des poussins. Or un décret, pris par le précédent gouvernement et paru en février, prévoit déjà d'interdire l'élimination des poussins mâles dans les filières de production d'œufs d'ici à la fin de l'année.

Par ailleurs, ces différents chiffres martelés par le président et ses soutiens ne renseignent en rien sur la portée des "interdictions" défendues par la Nupes. Dans le détail, seize d'entre elles sont inscrites au chapitre intitulé "Ecologie, biodiversité, climat, biens communs et énergie". On y trouve notamment la fin de la publicité des produits et services les plus émetteurs de gaz à effet de serre, l'interdiction "immédiate" du glyphosate, la prohibition "d'urgence" des additifs alimentaires "les plus controversés", la fin des fermes-usines ou encore l'interdiction de certaines pratiques de chasse, comme la chasse à courre.

D'autres propositions ciblent quant à elles les entreprises et les acteurs économiques, en interdisant "les licenciements boursiers" ou "les licenciements économiques par les entreprises qui versent des dividendes ou recevant des aides publiques". La Nupes défend aussi la prohibition des "parachutes dorés", ces primes de départ versées aux dirigeants d'entreprise. Les élus et les hauts fonctionnaires de l'Etat sont également ciblés via l'interdiction "des cadeaux aux parlementaires, aux membres du gouvernement et à leurs cabinets" et la fin du pantouflage, qui permet aux élites administratives de faire carrière dans le privé.

... et des taxes pour plus de "justice fiscale"

Quant aux termes "taxer", "taxation" ou "taxe", ils sont cités à 18 reprises dans le programme de la Nupes. Un nombre proche des 20 occurrences évoquées par Emmanuel Macron. Là encore, certaines mesures apparaissent cependant à plusieurs reprises. Toutes ne constituent pas non plus des créations d'impôts. Il s'agit parfois de modifier le fléchage d'une taxe déjà existante, comme "réserver la taxe d'apprentissage aux établissements publics".

Et comme pour les interdictions, l'argument quantitatif ne permet pas d'apprécier le contenu réel du programme de l'alliance de gauche en matière fiscale. Si on observe le programme plus finement, la majorité des propositions font partie du chapitre "partage des richesses et justice fiscale", et plus précisément du volet "faire une révolution fiscale"La Nupes envisage notamment de "refonder la taxe foncière pour la rendre progressive" ou de "taxer les entreprises ayant profité de la crise sanitaire et des conséquences de la crise ukrainienne".

Le programme mentionne également la suppression de la "flat tax" introduite sous Emmanuel Macron, ainsi que le rétablissement de l'impôt sur la fortune (ISF), supprimé sous le premier mandat du chef de l'Etat. Le texte évoque aussi l'"exit tax" sur les plus-values des contribuables qui quittent la France, et dont la suppression avait un temps été envisagée par Emmanuel Macron, avant d'être finalement allégée.

Enfin, la Nupes entend "relancer le projet de taxation" des géants du numérique. Un chantier amorcé sous le précédent quinquennat. Elle souhaite également "instaurer une taxe significative sur les transactions financières". Un sujet qui divise les Etats membres de l'Union européenne depuis une dizaine d'années. Durant le précédent quinquennat, l'exécutif français s'était montré favorable à la mise en place de cette taxe, mais dans une version a minima.

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