Euro 2016 : ça sent le roussi à Lens, à Paris et à Saint-Denis
Ces trois villes connaissent des difficultés financières ou politiques. Et dans beaucoup d'autres stades, les travaux ont pris du retard...
L'Euro 2016 commence dans quatre ans, et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'un certain flou artistique règne sur les enceintes qui vont accueillir la compétition. On n'en est pas encore au point de l'Ukraine ou du Brésil, respectivement hôtes de l'Euro 2012 et du Mondial 2014, qui voient régulièrement débarquer les inspecteurs de l'UEFA ou de la Fifa pour s'assurer de l'avancement des travaux, mais presque. Dernier avatar en date : la rumeur d'abandon du Parc des Princes par le PSG, qui fragilise une enceinte historique. Petit récapitulatif de l'avancement des opérations.
• Tout va bien à bord
Lille Le Grand Stade n'est pas encore sorti de terre que la campagne d'abonnements a déjà commencé. Y compris sur les terres du voisin lensois. Reste à trouver un partenaire pour le naming du stade, condition sine qua non pour boucler le "loyer" de l'enceinte, payé par les collectivités locales et le Losc, note La Voix du Nord. Comme presque tous les stades construits pour cet Euro, c'est un partenariat public-privé (PPP) qui a été choisi. Une "bombe à retardement financière", avait dénoncé à l'époque le socialiste Arnaud Montebourg.
Toulouse Les travaux de rénovation du Stadium commenceront fin 2013. Pour le moment, aucun souci de financement ou de voisinage n'est à signaler.
Saint-Etienne Là non plus, pas vraiment d'opposition au toilettage du Chaudron.
Marseille Les travaux de rénovation du Stade-Vélodrome prévoient notamment une augmentation du nombre de places et la construction d'un toit, pour que venir au stade ne signifie plus "prendre une douche".
• Le stade n'est pas encore sorti de terre
Bordeaux Les chiffres et les lettres. Là où Alain Juppé et la mairie totalisent 180 millions d'euros de coût, une association d'opposants, Trans'Cub, trouve une facture de 551 millions. Trans'Cub estime que le choix d'un PPP multiplie la facture par trois. Sans parler du fait que la mairie omet de préciser qu'elle remboursera les taxes au constructeur, Vinci-Fayat, pendant trente ans. Le début des travaux est prévu pour septembre 2012... enfin, si d'autres problèmes, comme le fait de construire le stade sur un marécage, ne se font pas jour d'ici là.
Lyon Le premier coup de pioche n'a pas encore été donné que le président de l'OL, Jean-Michel Aulas, a demandé à accueillir le match d'ouverture de la compétition. Après une guerre juridique sans fin contre une association de riverains, Carton Rouge, Aulas et le maire de Lyon, Gérard Collomb, ont obtenu de pouvoir utiliser le site de Décines, en banlieue lyonnaise. Les riverains sont remontés contre 1) le trajet du tram, qui dessert le stade plutôt qu'une zone peuplée 2) la disparition annoncée d'une zone verte par du béton 3) la spéculation autour de la valeur des terrains près du stade : "Tout a été organisé pour que les dépenses incombant normalement à l’Olympique Lyonnais (ex. : création de 11 000 places de parking) soient assumées par la collectivité", écrit l'association Canol (PDF, p. 2).
Nice Là encore, le permis de construire est contesté par l'opposition, qui y voit surtout la mise en service des deniers publics pour l'intérêt privé. Une conseillère municipale PCF a déposé un recours pour faire annuler le stade : "Est-il possible de faire autrement et beaucoup moins cher ? Oui. Un seul exemple, le stade de Valenciennes, inauguré il y a quelques mois : 25 000 places pour 75 millions d'euros. Celui de Nice coûte et va coûter aux contribuables : immédiatement 60 millions d'euros d'apport, plus le versement par la ville d'une redevance de l'ordre de 10,5 à 11 millions par année pendant 27 ans, soit au total 345 millions d'euros." Les travaux suivent leur cours.
• Les soucis (financiers) s'accumulent
Lens Le club appartient au Crédit agricole, qui n'est pas très chaud pour débourser les 28 millions d'euros nécessaires à la rénovation du stade Félix-Bollaert. Problème : il faut que le dossier soit bouclé dans les trois mois. La descente du club en L2 et son actuelle incapacité à remonter compliquent la donne. Gervais Martel, l'actionnaire minoritaire, mais toujours président du club, veut y croire, comme il le dit au journal L'Avenir de l'Artois : "Nous sommes à 500 % dans les starting-blocks. L'important est que le club de Lens reste sur la carte des grands stades de l'Hexagone." Reste que sans rénovation, le stade Bollaert restera à la porte de l'Euro. Le voisin valenciennois, avec son stade du Hainaut flambant neuf, lorgne déjà une des places disponibles.
Stade de France L'enceinte de Saint-Denis, bâtie en 1998, n'aura besoin que d'un lifting. Mais son avenir financier est beaucoup plus hypothétique : actuellement, comme le stade n'a pas de club résident, l'Etat verse une pénalité annuelle de 12 millions d'euros au consortium Vinci-Bouygues, qui gère l'enceinte. Une somme que le gouvernement entend revoir à la baisse, soit en attaquant le contrat, soit en le renégociant. Pendant ce temps, le rugby va construire son stade, à Thiais-Orly ou à Evry (Essonne), emportant avec lui le Tournoi des VI Nations. Il ne restera plus que l'équipe de France, avec laquelle le Stade de France ne gagne pas d'argent, note Eurosport. Bref, à l'horizon 2014-2016, le Stade de France pourrait n'avoir que des matchs amicaux d'une équipe de France déjà qualifiée pour l'Euro à se mettre sous la dent. A moins que le PSG...
Paris Si jamais les propriétaires qataris du PSG abandonnent le Parc des Princes, comme l'annonce RMC, la ville ne voudra pas forcément supporter le coût d'une rénovation pour un stade qui n'aurait plus de club résident. Le planning initial prévoyait deux ans de travaux pour rénover le Parc, construit dans les années 1970. Mais pas pour l'agrandir substantiellement, ce que demandent les Qataris. Du coup, à la mairie de Paris, on n'est plus si sûr de valider le permis de construire. Cela retarderait le calendrier, qui prévoit une livraison du stade pour mi-2015. Toute autre hypothèse (démolition, agrandissement) rendrait la tenue de matchs de l'Euro à Paris impossible.
L'Euro 2016 commencera en juin. Comme le raconte sur Stade Rennais Online l'adjoint aux sports de la mairie de Rennes, qui a jeté l'éponge, "le cahier des charges pour la Coupe du monde 1998 tenait dans un cartable, celui de l’UEFA pour organiser l’Euro 2016 tient dans une armoire". Si vous avez posé vos fesses dans un siège VIP lors du Mondial 1998, sachez que leur largeur augmentera de 4 cm pour l'Euro 2016. Eh oui, c'est (en partie) là-dedans que passent les millions d'euros investis dans la rénovation de certains stades...
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