Euro 2021 : Ronaldo et Coca, Pogba et Heineken… On vous explique la polémique des boissons qui a mis de l'eau dans le gaz
En déplaçant des bouteilles de Coca-Cola en conférence de presse, Cristiano Ronaldo a suscité des blagues et des détournements. Mais il a aussi contribué à faire chuter l'action en Bourse du géant américain des sodas et obligé l'UEFA à réagir.
Un doublé et un record. En inscrivant ses dixième et onzième buts dans un championnat d'Europe lors de la victoire du Portugal contre la Hongrie (3-0) à l'Euro mardi 15 juin, Cristiano Ronaldo a dépassé Michel Platini et est devenu le meilleur buteur de l'histoire de la compétition. Mais c'est pour un autre geste qu'il a fait la une.
En déplaçant deux bouteilles de Coca-Cola loin de son champ de vision avant sa conférence de presse d'après-match, l'attaquant portugais a déclenché une polémique, qui a fait des remous jusqu'à Wall Street. Franceinfo revient sur ce geste loin d'avoir fait "pschitt".
Ronaldo n'aime pas le Coca, Paul Pogba n'aime pas la bière
Elu homme du match pour son doublé contre la Hongrie, Cristiano Ronaldo s'avance face à la presse, mardi. Sur la table, à côté des micros, trônent deux bouteilles de Coca-Cola. L'international portugais s'en saisit, les éloigne et lance : "De l'eau, pas du Coca-Cola."
En décembre déjà, en marge des Globe Soccer Awards, l'attaquant avait confié qu'il n'était pas un grand fan des sodas, surtout quand son fils de 10 ans voulait s'en servir un verre. "Je suis parfois dur avec lui parce qu'il boit du Coca-Cola et du Fanta et je suis énervé contre lui", avait-il confié.
PTDRRRR le marketing de Coca Cola en sueurpic.twitter.com/y5WtbadPQ8
— emm. (@emmbld) June 15, 2021
Quelques heures après le geste de dédain de Cristiano Ronaldo à l'égard du Coca, Paul Pogba a, lui, écarté une bouteille de bière Heineken placée devant lui. Le Bleu a toutefois remis la boisson (sans alcool) sur la table, à la fin de sa conférence de presse.
En conférence de presse Paul Pogba retire du pupitre une bouteille de Heineken, sponsor officiel de l'#Euro2020. Comme l'avait fait la veille la star du Portugal Cristiano Ronaldo, avec des bouteilles de Coca-Cola #AFP pic.twitter.com/1nqQhNsgvA
— Agence France-Presse (@afpfr) June 16, 2021
Ce geste du Français n'était pas du tout prémédité, selon son coéquipier Raphaël Varane. "Non, on n'en a pas discuté, chacun est libre, chacun peut analyser la situation à sa façon", a-t-il réagi le lendemain en conférence de presse. "Il faut respecter les partenaires et aussi l'avis de chaque joueur", a défendu le joueur tricolore, appelant à "être compréhensif dans ce type de situation".
Le geste devient un motif de blagues
Ces deux gestes ont été abondamment détournés. Le premier à y faire référence a été le sélectionneur russe Stanislav Cherchesov, mercredi, en ouvrant, avec une certaine habileté, une des deux bouteilles de Coca-Cola devant lui. Il a ensuite bu une gorgée et l'a reposée, sourire aux lèvres, visiblement content de son effet.
#Ronaldo ne veut pas de #Coca pendant ses conférences de presse.
— Antoine Llorca (@antoinellorca) June 17, 2021
Le sélectionneur de la Russie, Stanislas Cherchesov, en revanche
(Regardez la technique pour ouvrir la bouteille )#RUS #EURO2020 pic.twitter.com/XCtA3Wz5wD
A la veille du match contre l'Angleterre, jeudi, l'Ecossais John McGinn s'est, lui, amusé de l'absence de boissons gazeuses sur la table pour sa conférence de presse. "Pas de Coca ?" a-t-il lancé tout sourire à la presse.
"Any coke?" #SCO John McGinn paying tribute to Cristiano Ronaldo after he removed 2 bottles of Coca-Cola before his #POR press conference the other day @jmcginn7 pic.twitter.com/dykFqWAao5
— Football Daily (@footballdaily) June 17, 2021
Même scène côté italien. Manuel Locatelli a d'abord posé une bouteille d'eau fraîche devant lui, avant d'écarter les deux Coca-Cola, dans un clin d'œil au geste de Ronaldo.
Locatelli now moves the Coca Cola bottles before his press conference
— Italian Football TV (@IFTVofficial) June 17, 2021
pic.twitter.com/OLAznGiTct
L'attaquant ukrainien Andriy Yarmolenko a quant à lui lancé un appel aux marques, jeudi, en mettant bien en évidence les deux boissons, rapporte l'agence Reuters (en anglais) : "Je peux faire quelque chose ? J'ai vu Ronaldo faire ça. J'ai envie de bouger [les bouteilles de Coca-Cola] ici et je veux mettre la bière ici. Coca-Cola et Heineken, appelez-moi !"
Quelques heures après, le sélectionneur de la Belgique, Roberto Martinez, a conclu son intervention en salle de presse en montrant la fameuse bouteille rouge avec insistance et sourire : "Les Red Devils aiment le Coca-Cola."
Siguiendo con la polémica de las botellas y la sala de prensa
— Carrusel Deportivo (@carrusel) June 17, 2021
Roberto Martínez, entrenador de #BEL dice que los 'Red Devils'... pic.twitter.com/gx3P0HPtaD
Des conséquences économiques
Heineken et Coca-Cola sont des partenaires de l'Euro. Et le geste de Cristiano Ronaldo a peut-être en partie contribué à faire flancher le titre du fabricant de sodas à l'ouverture de la Bourse de New York. L'action a perdu plus de 1 dollar (passant de 56,18 dollars à 55,24 dollars). Au total, la capitalisation boursière du géant américain a chuté d'environ 242 à 238 milliards de dollars. Le cours est ensuite remonté.
Pour Heineken, le geste du milieu de terrain français a eu l'effet inverse. A 17h35, mercredi, l'action de la marque du géant néerlandais de la brasserie est partie à la hausse de 1,35%. Aucune des deux marques n'a officiellement réagi.
"Bien que sponsor officiel de la compétition, Coca-Cola ne peut publiquement se plaindre du geste de Ronaldo car ils ne peuvent pas se mettre en porte-à-faux avec un joueur d'une telle influence", juge auprès du Parisien Pierre Rondeau, spécialiste de l'économie du football et codirecteur de l'Observatoire Sport et Société à la Fondation Jean-Jaurès.
"Cette histoire prouve à quel point Cristiano Ronaldo est un influenceur."
Pierre Rondeau, spécialiste de l'économie du footballau "Parisien"
Le Portugais, comme les autres stars du ballon rond, tire une partie de ses revenus de ses contrats publicitaires. "Bien sûr qu'il y a une hypocrisie. A partir du moment où une partie de leurs revenus sont des revenus commerciaux", assure à LCI Luc Arrondel, économiste spécialiste du sport. "Quand Cristiano Ronaldo fait un geste pareil, ce n'est pas anodin. Ça peut être un coup de com, sachant que sur les 120 millions d'euros qu'il touche, 50 millions sont des revenus commerciaux", remarque-t-il. "Est-ce que [les joueurs] ne se tirent pas une balle dans le pied ? En réalité, on en est encore loin. Et puis il n'est pas impossible que d'autres marques, plus compatibles socialement, viennent se substituer à ces marques qui n'ont plus le vent en poupe", estime Luc Arrondel.
Avec ses plus de 500 millions de followers sur les réseaux sociaux, chaque geste ou propos de Cristiano Ronaldo est scruté, analysé. Cette position vis-à-vis de Coca-Cola pourrait-elle remettre en cause le partenariat entre la marque et l'UEFA, qui organise l'Euro ? "On n'en est pas là, mais c'est une hypothèse", avance Luc Arrondel. "Quand Coca investit dans le foot, c'est pour gagner en visibilité. Si son image véhiculée par l'UEFA est négative, il risque d'arrêter sa collaboration. Sauf que la part des revenus commerciaux de l'UEFA au niveau de l'organisation d'un Euro équivaut à peu près à 20% des recettes. Ce n'est quand même pas rien", rappelle l'économiste sur LCI.
Pas de sanctions mais un rappel à l'ordre de l'UEFA
Le directeur de l'Euro, Martin Kallen, a admis que le geste de Cristiano Ronaldo était le plus embarrassant des deux pour l'UEFA. Pour autant, la star portugaise ne risque rien. Interrogée par Libération, l'instance du foot européen a assuré qu'"aucune procédure disciplinaire ne serait ouverte à l'encontre de Cristiano Ronaldo". "Chacun est libre de boire les boissons qu'il préfère", a ajouté l'UEFA. Elle a toutefois précisé au Parisien qu'elle avait rappelé "aux équipes participantes que les partenariats font partie intégrante du déroulement du tournoi et permettent d'assurer le développement du football à travers l'Europe, y compris pour les jeunes et les femmes".
Ce rappel à l'ordre confirme ce que confiait le professeur en management du sport Guillaume Bodet sur franceinfo : "Je ne suis pas convaincu que l'on reverra ces scènes, compte tenu des enjeux pour les sponsors en termes de visibilité." "Aujourd'hui, les organisations sportives vont briefer les équipes et les joueurs avec des codes et des règles qu'ils vont devoir ne pas enfreindre, conclut-il, parce que cela met effectivement en danger ces organisations et leurs relations avec les sponsors." Le Portugal de Ronaldo affronte l'Allemagne samedi soir, et tout le monde guettera la réaction de l'attaquant s'il se présente à nouveau en conférence de presse.
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