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Collision mortelle à Millas : quatre questions sur la sécurisation des passages à niveau

Au lendemain de la tragédie, la dangerosité des passages à niveau est de nouveau pointée du doigt. Qu'est-ce qu'un passage à niveau "dangereux" et comment les autorités traitent le problème ? Eléments de réponse.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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L'accident entre un bus scolaire et un TER a eu lieu sur le passage à niveau situé à Millas (Pyrénées-Orientales) le 14 décembre 2017. (MAXPPP)

Après la collision mortelle entre un car scolaire et un TER sur un passage à niveau à Millas (Pyrénées-Orientales), jeudi 14 décembre, les circonstances de cette collision restent à déterminer. L'une des questions qui va intéresser les enquêteurs porte sur la sécurisation du passage à niveau. 

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La France compte un peu plus de 15 000 passages à niveau, dont 163 sont classés comme devant être sécurisés en priorité (donc "dangereux"), selon les données du ministère des Transports et du gestionnaire d'infrastructure, SNCF Réseau. A titre de comparaison, on en comptait 25 000 en 1980. Le passage à niveau où a eu lieu l'accident ne compte pas parmi ces 163 passages à niveau classés "dangereux". 

Pourquoi le passage de Millas n'est pas considéré comme "dangereux" ?

Comment détermine-t-on la sûreté de ce passage à niveau ? Celui de Millas est mécanique : les barrières sont actionnées mécaniquement à l'approche et au départ du train par des pédales situées sur les rails, sur lesquelles appuient les roues du train. Il est annoncé par une signalisation lumineuse automatique et deux barrières, comme 11 000 autres passages à niveau.

>> Lire aussi : Trois questions sur le passage à niveau pointé du doigt dans l'accident

Qu'est-ce qu'un passage à niveau jugé "dangereux" ?

Pour la SNCF, il n'existe pas de passage à niveau "dangereux". "Un passage à niveau est un croisement entre la route et le réseau. Il n’est pas dangereux si l’on respecte les règles du code de la route", explique la société ferroviaire. La sécurité routière a cependant listé 163 passages considérés comme étant "prioritaires" : ce sont des points de croisement ayant connu plusieurs accidents sur une période de dix ans ou connaissant des circulations routières et ferroviaires intenses. Environ 15% des accidents graves sont concentrés sur 1% des passages à niveau. Celui de Millas n'en fait pas partie.

Lors du lancement de ce programme de sécurisation national, défini par l'Etat et l'instance nationale des passages à niveau en 1997, 437 passages à niveau figuraient sur cette liste.

Comment expliquer que ces passages existent encore ?

Le principal obstacle à la suppression des passages à niveau est financier, puisqu'il en coûte à chaque fois entre 5 et 20 millions d'euros, financés par l'Etat, les collectivités locales et SNCF Réseau, qui investit chaque année 40 millions d'euros pour la suppression et la sécurisation des passages à niveau. "On ne peut pas dire très sérieusement qu'on va éviter le croisement des voies ferrées et des routes, si ce n'est à investir des centaines de milliards qu'on n'a absolument pas", a déclaré sur franceinfo vendredi, Alain Vidalies, ancien secrétaire d’Etat chargé des Transports. 

Dominique Bussereau, ancien ministre des Transports à l'origine d'un plan de suppression des passages à niveau les plus dangereux, confirme. 

Supprimer un passage à niveau quand c’est dangereux, c’est-à-dire faire à la place un passage inférieur ou supérieur, un pont, cela coûte entre cinq et six millions d’euros donc une dizaine est traitée chaque année. Les procédures sont longues, déclaration d’utilité publique, procédures administratives, qui durent en général cinq ans...

Dominique Bussereau

sur franceinfo

"Donc, les choses avancent, mais rien n’empêche la faute de comportement, l’erreur humaine ou l’accumulation d’erreurs ou de problèmes techniques qui peuvent conduire à une catastrophe comme celle d’hier", estime vendredi l'ancien ministre. En moyenne, six passages à niveau sont supprimés chaque année, en général remplacés par des ponts ou des tunnels.

Comment prévenir les accidents sur des passages à niveau ?

En 2016, 126 collisions ont été enregistrées sur des passages à niveau, et 31 personnes ont trouvé la mort. D'après la SNCF, 98% des accidents sont dus au comportement des automobilistes, les 2% restants étant dus, à des actes de malveillance, des problèmes climatiques ou encore des animaux.

L'obligation d'un arrêt systématique avant de s'engager n'existe pas en France, mais selon le Code de la route, la priorité absolue est donnée au chemin de fer sur la route. Pour faire changer les comportements des usagers de la route, SNCF Réseau a installé 42 radars de vitesse et 80 radars de franchissement.

Pour prévenir les accidents, le gestionnaire d'infrastructure teste également sept détecteurs d'obstacle, qui préviennent le train lorsqu'un obstacle se trouve sur la voie. Par ailleurs, pour éviter les "déshuntages", ruptures de liaison électrique sortant brièvement un train des rails, environ 500 passages à niveau ont été équipés de pédales de shuntage, permettant l'abaissement des barrières de manière mécanique.

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