L'attaque de "Charlie Hebdo" porte la marque d'Al-Qaïda au Yémen
Said Kouachi, l'un des deux frères suspectés d'avoir attaqué la rédaction de l'hebdomadaire, a été formé par cette branche d'Al-Qaïda en 2011.
Les frères Kouachi, suspectés d'avoir attaqué Charlie Hebdo le 7 janvier, et d'y avoir tué 12 personnes, ne sont plus tout à fait une énigme. Le plus âgé des deux, Said, a suivi un entraînement avec Al-Qaïda au Yémen (Aqpa, également nommé Al-Qaïda dans la péninsule arabique), en 2011. Quant au plus jeune, Chérif, il a fait partie de la "filière des Buttes-Chaumont", à Paris, connue pour avoir envoyé des jihadistes rejoindre une branche d'Al-Qaïda en Syrie, au début des années 2000.
"Tu n'as qu'à dire que c'est Al-Qaïda au Yémen"
"Si les journalistes te posent des questions, tu n’as qu’à leur dire que c’est Al-Qaïda au Yémen." Cette phrase, ou une légère variante, a été prononcée mercredi, par l'un des suspects de l'attentat contre Charlie Hebdo, qui braquait un automobiliste, qui rapporte la scène pour RTL. Un témoin interrogé par 20 Minutes confirme : "Une voiture noire était arrêtée au milieu de la rue. (...) Ils ont sorti un homme de la voiture qui était derrière. Et ils sont montés en disant : 'Vous direz aux médias que c’est Al-Qaïda au Yémen'. J’étais à 5 ou 10 mètres, ils sont repartis et la police est arrivée 5 minutes plus tard."
Said Kouachi s'est entraîné au Yémen en 2011
En plus de cette revendication, le New York Times révèle, vendredi, que Said Kouachi, l'aîné des deux frères, a voyagé en 2011 au Yémen, où il s'est entraîné au maniement des armes avec Al-Qaïda. Il y aurait passé plusieurs mois, avant de revenir en France. Sur Twitter, le chercheur et consultant sur les questions islamistes Romain Caillet estime qu'Al-Qaïda au Yémen est désormais la piste la plus sérieuse.
On s'oriente de plus en plus vers la piste d'#AQPA, plus connue sous le nom d'al-Qaïda au #Yémen, plutôt que celle de l'#EI.
— Romain Caillet (@RomainCaillet) 8 Janvier 2015
Jacques Raillane, autre spécialiste du renseignement et du terrorisme, partage cette analyse et rejette la piste de l'Etat islamique.
Et mes compliments, en passant, aux imposteurs et autres universitaires en roue libre. On a affaire à du réseau GIA/GSPC/AQPA. Pas d'EI...
— Jacques Raillane (@AbouDjaffar) January 9, 2015
"Charlie" et Charb dans le viseur d'Aqpa depuis 2006
Al-Qaïda n'a jamais digéré les caricatures de Mahomet, dessinées au Danemark et publiées notamment par Charlie Hebdo en 2006. Wassim Nasr, spécialiste des mouvements jihadistes, rappelle à France 24 que "le journal satirique français a été désigné comme une cible par Ayman Al-Zawahiri, bras droit et successeur d’Oussama Ben Laden à la tête de la nébuleuse, en personne".
En mai 2013, le rédacteur en chef de Charlie Hebdo, Charb, assassiné mercredi, est devenu personnellement une cible. La publication jihadiste anglophone Inspire, éditée par Aqpa depuis 2010, avait mis sa tête à prix, avec ce message : "Recherché mort ou vif pour crimes contre l’islam". La photo de Charb était placée à côté de celles de Geert Wilders, député néerlandais d'extrême droite, et de Lars Vilks, un artiste et dessinateur suédois qui avait représenté Mahomet en chien.
#France des comptes pro #AlQaeda diffuse ce montage / ce n'est pas une revendication officielle pr autant #Paris pic.twitter.com/uYf6JlyCKv
— Wassim Nasr (@SimNasr) 8 Janvier 2015
Des liens anciens avec l'Etat islamique
Toutefois, l'un des deux frères au moins peut être lié aux jihadistes de l'Etat islamique : Chérif, le plus jeune. Son appartenance à la "filière des Buttes-Chaumont" et ses liens avec Boubakeur El-Hakim, notamment, retiennent l'attention de Jean-Pierre Filiu, historien et spécialiste des réseaux islamistes, car cet homme est aujourd'hui "un personnage clé de Daech", autre nom de l'organisation islamiste. Chérif Kouachi aurait aussi un lien avec Salim Benghalem, l'un des bourreaux de l'Etat islamique, inscrit sur la liste noire du département d’Etat américain. Leurs noms, ainsi que celui d'Amedy Coulibaly, apparaissent dans une même affaire : le projet d'évasion de Smaïn Aït Ali Belkacem, artificier de l'attentat du RER, en 1995, à Paris.
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