Mediator : Servier dément avoir harcelé une victime
Elle s'appelle Marie, 64 ans. Cette Vendéenne est diabétique et a pris du Mediator pendant 18 ans. Conséquence de ce traitement au long cours : elle a dû subir une opération du cœur et son état général s'aggrave. Des dommages auxquels s'ajoutent ce qui s'apparente à du harcèlement, aux dires de la sexagénaire. Elle affirme avoir reçu déjà dix-sept "coups de fil cachés" lui proposant de l'argent. "Quand je raccroche, ça re-sonne aussi sec".
L'argumentaire serait rodé. "Ils me disent : 'Eux, ils ne vous dédommageront pas. Nous, on va le faire tout de suite. Vous avez 64 ans, vous serez tranquille'".
_ Et les enchères monteraient. "La dernière fois, on m'a proposé 140.000 euros", affirme-t-elle. De l'argent "pour que je retire ma plainte. Ils se disent 'si elle la ferme celle-là, ça en fera une de moins'".
Mais Marie reste intraitable : "Moi je refuse, parce que tout l'argent du monde ne suffira pas à cacher ça.
Servier dément tout en bloc
Les accusations de Marie, le groupe Servier les récuse formellement. Ce genre de pratique serait contraire aux consignes données au personnel du laboratoire, affirme l'avocat Maître Témime.
Argent contre abandon des poursuites : ce marché tel que décrit par la Vendéenne pourtant n'est pas inédit dans cette affaire. Déjà en mars, le laboratoire avait très officiellement conditionné ses indemnisations à l'abandon de toute action judiciaire. Une "transaction" qui avait provoqué un tollé, puis l'intervention du ministre de la Santé Xavier Bertrand, obligeant le groupe Servier à faire machine arrière.
Un dispositif d'indemnisation "d'exception"
Depuis, le laboratoire s'est dont dit "prêt à assumer sa responsabilité si elle est engagée" et a proposé la constitution d'un fonds d'indemnisation. Dispositif cependant jugé insuffisant, par le ministère et les associations de victimes. Le gouvernement a donc décidé la création d'un fonds public spécial Mediator pour pallier les éventuels manquements de Servier, et se retourner ensuite en justice contre lui. Ce projet, confirmé hier en Conseil des ministres, devra être soumis aux parlementaires.
Un guichet unique, géré par l'Oniam, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, devrait permettre alors aux victimes de faire valoir leurs droits à indemnisation. Toutes les victimes... puisque le dispositif entériné par le Conseil des ministres hier supprime toute date-limite pour la prise du Mediator et abaisse le seuil d'incapacité des plaignants. Seules conditions : avoir pris ce traitement pendant au moins trois mois et présenter les symptômes d'un déficit fonctionnel, c'est-à-dire une atteinte des valves cardiaques ou de l'hypertension artérielle pulmonaire.
Cécile Quéguiner, avec agences
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