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Naufrage de l'Erika : qui est responsable ?

C'est aujourd'hui que le tribunal correctionnel de Paris doit rendre son jugement. Les victimes de la marée noire réclament un milliard d'euros d'indemnisation.
Article rédigé par franceinfo
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Le souvenir est bien vivace. Et cuisant. 20.000 tonnes de fioul lourd qui polluent les côtes bretonnes, tout le monde s'en souvient. A tel point que rares ont été les témoins, lors du procès qui a eu lieu au printemps dernier. Il a été si difficile de tout nettoyer, et de faire oublier les dégâts aux touristes...

Le 12 décembre 1999, l'Erika se brise en deux, pendant une tempête. Le vieux navire de 24 ans transportait 20.000 tonnes de fioul lourd, ultra-polluant. Les opérations de pompage ne permettent pas d'éviter le pire. 400 kilomètres de côtes sont souillées, des dizaines de milliers d'oiseaux tués, la faune et la flore sont ravagés.
_ L'équipage, lui, est sauvé de justesse.

Après le drame écologique est venu le temps de la justice. Le procès, en correctionnelle, a duré quatre mois, au printemps dernier. Les réquisitoires, très attendus, sont tombés : sept condamnations à des peines de prison avec sursis, et des amendes bien sûr.

En première ligne, le groupe Total, l'affréteur du navire. Une amende de 375.000 euros a été requise -- c'est le maximum pour la "pollution maritime" ; une autre amende du même montant a également été requise conte la filiale, Total, transport ; une troisième amende, d'un montant à déterminer, concernerait, elle, la filiale Total Petroleum Services.

Ces sanctions détermineront la suite : les éventuels dommages et intérêts que réclame la centaine de parties civiles -- Etat, régions, départements, communes, associations et personnes privées. Au total, celles-ci réclament environ un milliard d'euros, ainsi que la reconnaissance d'une nouvelle notion, le "préjudice écologique".

Total, de son côté, plaide la relaxe. La société s'appuie sur le droit international qui prévoit que, en principe, l'affréteur n'est pas responsable des naufrages, sauf cas particulier -- que le tribunal devra alors déterminer.
_ Total se dit victime d'un vice caché, et renvoie les torts sur Rina, la société de classification italienne qui a délivré son autorisation de naviguer après des contrôles contestés.

Beaucoup de questions encore sans réponse

Lors des quatre mois d'audience, il n'a pas vraiment été facile de démêler l'écheveau des responsabilités. Le monde du commerce maritime est pour le moins complexe, et trouble, entre courtiers londoniens, sociétés off-shore, équipages indiens ou chantiers navals monténégrins. Sans compter les pavillons de complaisance... Pourtant, l'Erika battait pavillon maltais, qui a depuis rejoint l'Union européenne.

Beaucoup de questions sont donc restées sans réponse. Total était-il conscient de louer, pour un seul voyage, un bateau vieillissant ? L'armateur italien, Giuseppe Savarese a-t-il négligé l'entretien ? Pourquoi Rina, la société de classification, a-t-elle donné ses certificats de navigabilité au bateau ?
_ Quant au capitaine indien, son comportement est resté trouble, d'autant qu'il était absent du procès. A-t-il obéi à des ordres, en annulant son message de détresse, avant d'en lancer un deuxième, trop tard ?

Guillaume Gaven

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