Cet article date de plus de dix ans.

République dominicaine : les quatre Français accusés de trafic de cocaïne relâchés, mais pas innocentés

Ils leur est en revanche interdit de quitter le territoire, en attendant leur procès. 

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Jean-Pascal Furet (à gauche) and Armand Victor Bruno Odos, le pilote et le copilote, le 8 mai 2014, lors de leur comparution devant le tribunal de Saint-Domingue (République dominicaine).  (ERIKA SANTELICES / AFP)

Un soulagement, mais leur combat continue. Quatre Français, dont deux pilotes d'avion, en détention provisoire depuis plus d'un an en République dominicaine après des accusations de trafic de cocaïne, ont été relâchés mardi 17 juin. Mais ils ont interdiction de quitter le territoire en attendant leur procès.

Retour sur cette saga judiciaire.

Une arrestation musclée

Tout démarre le 20 mars 2013. Alors qu'il s'apprêtait à décoller de Punta Cana, un avion privé à destination de la France, via les Açores, est cerné par une dizaine d'agents de la DNCD, la brigade anti-drogue dominicaine, appuyée par leurs homologues américains de la DEA. A bord de l'appareil, ils retrouvent 700 kilos de cocaïne répartis dans 26 valises. Les pilotes Pascal Fauret et Bruno Odos, un autre membre de l'équipage, Alain Castany, et le passager, Nicolas Pisapia, sont arrêtés.

"Vêtus de noir et armés, ils ont fait sortir les quatre occupants de l'appareil sous l'objectif de caméras avant de les menotter pendant trois heures, allongés face à terre sur le tarmac tandis qu'un hélicoptère surveillait le ciel", se souvient Sabine Fauret, interrogée dans Le Figaro.fr. Dans la foulée de cette opération, une quarantaine d'agents des douanes, de la police antidrogue et des services migratoires dominicains sont également été arrêtés, soupçonnés d'avoir participé à ce vaste trafic. 

Une procédure judiciaire qui traîne

Aussitôt, les deux pilotes nient avoir le moindre lien avec la cargaison découverte à bord de ce Falcon 50, propriété du lunetier français Alain Afflelou, mais affrété par une société de location française, SN-THS. Quant au passager, Nicolas Pisapia, il affirme n'avoir embarqué qu'avec un sac à dos, et n'avoir lui non plus aucun lien avec les 700 kilos de drogue retrouvés.

Mais de son côté, le procureur Milciades Guzman assure que les deux pilotes effectuaient depuis 2012 des liaisons vers différentes destinations européennes avec les mêmes passagers à des fins de narcotrafic. Dès le 4 avril, la justice dominicaine prononce une année de détention provisoire à l'encontre de la plupart des quarante accusés dans cette affaire. Parmi eux figurent les deux pilotes ainsi que leurs deux passagers, emprisonné à Higüey, dans l'est du pays. Au cours des mois qui suivent, plusieurs audiences sont repoussées.

En mai, l'avocat des accusés français, Jean Reinhart, explique ces lenteurs par la sensibilité qui entoure les affaires de stupéfiants en République Dominicaine. Au micro d'Europe 1, il pointe également des problèmes de procédure. "Nous sommes devant une situation gigantesque : c’est le plus gros dossier, paraît-il, présent devant les juridictions de République Dominicaine". Alors qu'en France, une enquête est ouverte à la Juridiction interrégionale spécialisée de Marseille pour déterminer les contours du trafic mis au jour, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, s'indigne de ces reports. Début mai, il juge "très choquant" le traitement que réserve la justice dominicaine aux deux pilotes. Il demande la tenue rapide d'un procès, relaie alors France 3 Rhône-Alpes

Un comité de soutien mobilisé

En France, les proches des pilotes se mobilisent. Le comité de soutien à Bruno Odos et Pascal Fauret compte plus de 750 membres, expliquait fin mai au Point l'avocat des deux hommes. "Nous avons des dizaines de témoignages de moralité, et pas de n'importe qui : des pilotes de l'aéronavale, des pilotes autorisés à voler avec la bombe nucléaire à leur bord. C'est pas des rigolos, ces types-là, c'est des hommes intègres", martelait-il. 

De son côté, le principal syndicat français de pilotes, le SNPL France Alpa appelle  les pilotes à ne plus desservir la République dominicaine, "incapable d'assurer un niveau de sûreté conforme aux standards internationaux [ainsi que] les conditions nécessaires à l'exercice du métier de pilote de ligne (...)".

Un procès à venir 

A l'issue de plusieurs audiences préliminaires menées ces dernières semaines, la juge, Elka Reyes, décide finalement, mardi, de renvoyer les suspects. Elle considère les charges à leur encontre suffisantes, mais ordonne leur remise en liberté, la durée légale de leur détention provisoire étant dépassée. "Il est décidé l'ouverture d'un procès", indique le jugement d'Elka Reyes, émis par un tribunal de Saint-Domingue. Libérés sans caution, les prévenus ne peuvent quitter le territoire dominicain et devront se présenter régulièrement devant un juge pour attester de leur présence dans le pays.

"De notre point de vue, nos clients auraient dû bénéficier d'un non-lieu, mais nous respectons la décision de la juge et nous prendrons les mesures nécessaires", a déclaré l'avocate des deux pilotes.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.