Attentats du 13-Novembre : des écoutes en prison éclairent le parcours de Salah Abdeslam dans les heures qui ont suivi
Le récit qu'il a fait à deux codétenus, en 2016, avait été enregistré à son insu. "Le Parisien" a consulté le contenu de ces écoutes.
C'est un document de neuf pages qui précise le parcours de Salah Abdeslam, seul membre encore en vie parmi les terroristes qui ont perpétré les attentats du 13-Novembre, qui ont fait 131 morts et plus de 450 blessés. Dans des écoutes déclassifiées, versées au dossier juste avant la clôture de l'enquête tentaculaire sur ces sanglantes attaques, que révèle Le Parisien, vendredi 10 janvier, Salah Abdeslam raconte à deux détenus sa soirée du 13 novembre 2015.
Ces échanges avec Mehdi Nemmouche, auteur de l'attentat du musée juif de Bruxelles en mai 2014 et Mohamed Bakkali, soupçonné d'être un logisticien des attentats du 13-Novembre, ont été "enregistrés à son insu", à la prison de Bruges, le 14 avril 2016, précise le quotidien. Salah Abdeslam raconte "dans un mélange de français et d'arabe" et "sur un ton léger" comment, le soir des attentats de Saint-Denis et de Paris, il a fui vers Châtillon (Hauts-de-Seine) après avoir déposé trois kamikazes au Stade de France et abandonné sa Clio dans le 18e arrondissement.
Puis, il explique comment et pourquoi il s'est débarrassé de son gilet explosif à Montrouge, après avoir "demandé un renseignement à un type" : "Il regardait ma veste. Il voyait qu'il y avait quelque chose de bizarre. (...) C'était trop voyant, je savais que je devais m'en débarrasser."
Interviewé par la télé belge... juste après les attentats
L'enquête a prouvé qu'il avait ensuite passé la nuit dans la cage d'escalier d'un immeuble de Châtillon : il le confirme dans les écoutes. Selon son récit, Salah Abdeslam discute avec un groupe de jeunes, puis s'endort sur les marches en attendant l'arrivée de ses deux amis qui doivent l'exfiltrer vers la Belgique au petit matin.
Le 14 novembre 2015, Salah Abdeslam quitte la France avec eux en voiture. Au "troisième barrage", selon le jihadiste, ils sont... interviewés par une équipe de télévision belge. "Elle [la journaliste] me dit : 'Vous trouvez normal qu'il y ait des barrages comme ça ?'", raconte Salah Abdeslam. "J'ai dit : 'Oui c'est normal, vu les circonstances, il faut bien renforcer les barrages hein !' J'étais à l'arrière."
Il raconte tout de même à ses co-détenus qu'il a craint d'être découvert à ces barrages : "Ils étaient avec leurs mitraillettes. Ils avaient entouré la voiture, c'était choquant (...) J'ai dit 'Ça y'est c'est la fin'. J'ai compris qu'il n'y avait plus d'issue." Mais finalement, Salah Abdeslam passe entre les mailles du filet : son avis de recherche ne sera diffusé que le lendemain.
Il y a aussi, plus tard, cette lettre qu'il a rédigée et qui est "tombée de [s]a poche" au moment de son interpellation à Bruxelles, en mars 2016. "J'ai pas mis mon nom dessus, tu crois qu'ils peuvent savoir si c'est la mienne ?", s'inquiète-t-il. Mehdi Nemmouche lui conseille de garder le silence face aux enquêteurs. Car dans ce courrier, il a prêté allégeance au calife du groupe Etat islamique. Cette lettre n'a jamais été retrouvée.
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