Festival d'Avignon 2022 : "Futur proche", le ballet apocalyptique de Jan Martens à la Cour d'honneur
Jan Martens est de retour au Palais des papes avec un ballet avant-gardiste sur le sort de l’humanité qui a enthousiasmé un public exigeant.
Les déréglements du monde, les angoisses apocalyptiques sont au cœur de Futur proche, le ballet de Jan Martens créé dans la Cour d’honneur pour le 76e Festival d’Avignon. Avec une troupe de danseurs aux âges et origines diversifiés, fidèle au clavecin contemporain de ses dernières chorégraphies, Jan Martens fait preuve d’une audace qui a touché et conquis le public.
Paradis perdu
Sur un long banc transversal, face au public, les danseurs alignés se lèvent et exécutent un ballet mécanique qui se transforme en une chorégraphie élégiaque, tournoyante, en symbiose avec le clavecin d’Elisabeth Chojnacka. Un paradis, bientôt perdu, à l’issue d’un étrange rituel baptismal. La troupe virevoltante va progressivement ralentir sa frénésie, avant d’être plongée dans une lumière enténébrée, et se figer telles des statues de sel.
Jan Martens déploie une inventivité chorégraphique époustouflante, servie par des danseurs virtuoses. Ils exécutent des gestuelles différentes en se répondant avec une synchronisation déconcertante. Puis les danseurs, filmés en direct, se regroupent en fond de scène et apparaissent sur le haut mur de la cour, une scène impressionnante qui s’avère le tournant de la pièce.
Mouvements sorciers
Cette projection gigantesque évoque l’égo surdimensionné d’une humanité qui met le monde en péril. C’est d’abord une mystérieuse cérémonie de l’eau à laquelle s’adonnent les danseurs. Symbole de purification ? Dénonciation d’un usage excessif de cet élément vital, dont la raréfaction menace l'équilibre écologique ? Après cette cérémonie, le ballet est tout à coup gagné par une étrange lenteur. Des danseurs disparaissent de la scène. Ceux qui restent sont saisis d'une apathie progressive. Leurs gestes à peine perceptibles, comme les aiguilles d’une horloge égrainant un temps compté, s'effaceront peu à peu dans la nuit.
Derrière l'ésotérisme des figures et des enchaînements, le message est clair : le désastre est là. L’art de Jan Martens et de sa troupe envoûte, avec le clavecin virtuose de Goska Isphording dans ses mouvements variés ou répétitifs. Une performance fascinante, longuement applaudie. Futur proche ou quand la danse alerte de façon saisissante sur les menaces pesant sur la planète.
"Futur proche", Cour d’honneur du Palais des papes, Place du Palais, 84000 Avignon. Chorégraphie de Jan Martens. Clavecin : Goska Isphording. Jusqu’au dimanche 24 juillet, 21h30. Tel : 04 90 14 14 14
Festival d'Avignon
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