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L'ancien Premier ministre a répété jeudi devant la cour d'appel de Paris ne pas être intervenu en faveur d'Imad Lahoud

Dominique de Villepin a redit qu'il n'était pas intervenu pour faire libérer Imad Lahoud, le faussaire présumé de l'affaire Clearstream.Selon M. de Villepin, cet épisode révèle en fait que la mathématicien n'était pas sa source, mais bien celle du ministère de la Défense.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Dominique de Villepin (AFP/Patrick Kovarik)

Dominique de Villepin a redit qu'il n'était pas intervenu pour faire libérer Imad Lahoud, le faussaire présumé de l'affaire Clearstream.

Selon M. de Villepin, cet épisode révèle en fait que la mathématicien n'était pas sa source, mais bien celle du ministère de la Défense.

Le 25 mars 2004, Imad Lahoud est placé en garde à vue pour une affaire annexe d'escroquerie. Les policiers découvrent alors qu'il est en possession d'un sauf-conduit délivré par Jean-Louis Gergorin. Dans cette lettre, le vice-président d'EADS affirme que son protégé est en mission pour le compte du général Philippe Rondot.

A l'époque, le général Rondot enquête sur les listings Clearstream pour le compte du ministère de la Défense, mais aussi de Dominique de Villepin, au Quai d'Orsay.

Lorsque le commissaire responsable de la garde à vue l'appelle, le général, qui n'a pas connaissance de ce sauf-conduit, répond qu'il ne saurait couvrir Imad Lahoud. L'officier appelle ensuite Jean-Louis Gergorin pour l'avertir de l'incident et lui demander des explications.

Peu de temps après, Dominique de Villepin téléphone au général Rondot. Selon le militaire, il lui demande alors de faire libérer Imad Lahoud.

"Je n'ai pas donné d'instruction au général Rondot de libérer la source ou Imad Lahoud", a redit jeudi l'ancien Premier ministre, qui assure avoir appelé le militaire en lien avec des dossiers internationaux. De toute façon, à l'époque, "je ne connais pas l'identité de la source, (...) je ne sais pas qu'il a fait de la prison (...) et que c'est un escroc aux renseignements".

"J'ai le réflexe très normal de lui dire : voyez ce qu'il en est, en d'autres termes, faites au mieux", poursuit M. de Villepin. Mais "ma propre intervention est comme le fruit confit dans le cake, c'est-à-dire qu'(...) elle est sans aucune conséquence dans ce dossier".

En revanche, le fondateur de République solidaire oriente l'attention de la cour sur la "note de couverture" adressée quatre jours plus tard sur l'incident par le général Rondot à Philippe Marland, directeur de cabinet du ministère de la Défense.

Selon lui, cette note "glisse sur" plusieurs points et tente de protéger cette "source pourrie" en raison d'un "intérêt supérieur". Le ministère de la Défense aurait alors voulu "sauver le soldat Lahoud", qui lui promet par ailleurs de remonter jusqu'à Oussama Ben Laden.

Villepin maintient les mêmes versions qu'au premier procès
Relaxé en première instance, l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin a répété mot pour mot ce qu'il avait dit au tribunal, à savoir qu'il n'avait pas évoqué les listings Clearstream avec le président Chirac comme l'affirme l'ancien haut responsable d'EADS, Jean-Louis Gergorin.

Le 1er janvier 2004, "j'ai fait état des instructions fortes dont m'avait fait part le président sur la moralisation de la vie politique internationale", a martelé le fondateur de République solidaire. Mais il n'était "pas besoin d'en référer au président de la République".

M. de Villepin a juste reconnu avoir "évoqué avec le président de la République, après le 9 janvier 2004, une menace internationale" et lui avoir dit qu'il "avait confié une enquête au général Rondot".

"Il faut à un moment revenir sur terre", a soupiré l'homme politique, et cesser "la lecture tendancieuse ou biaisée" des notes du général Rondot, qui en janvier 2004 "ne marqu(ait) aucune réserve" quant à la véracité de la menace.

Imad Lahoud à la peine
De leur côté, Jean-Louis Gergorin et Imad Lahoud ont ferraillé pour se rejeter la faute. Mais la cour a semblé peu réceptive aux arguments du mathématicien qui, depuis lundi, multiplie les déclarations contradictoires. Ce dernier a affirmé "n'avoir ajouté qu'un seul nom, Nagy et Bocsa", patronyme de Nicolas Sarkozy et a eu du mal mercredi à démontrer qu'il n'était que la victime impuissante d'une manipulation

Quelques secondes plus tôt, le prévenu avait pourtant parlé de plusieurs noms. "J'ai toujours dit que Jean-Louis Gergorin se prévalait d'instructions reçues par Dominique de Villepin quand il me demandait d'ajouter des noms (...) et de détruire des documents."

- "Mais, alors, qui les a ajoutés?", questionne la présidente, Christiane Beauquis.
- "Je ne sais pas, Mme la présidente, mais j'aimerais bien savoir...".

Quant à la question de savoir pourquoi il n'avait pas dit au général Rondot, qui enquêtait sur les listings, que ceux-ci étaient falsifés: "Je n'avais pas le courage, la sérénité, l'assurance de dire les choses à l'époque", a plaidé le quadragénaire aux petites lunettes rondes. "J'aurais dû (lui) dire clairement que Jean-Louis Gergorin faisait rajouter des noms. J'ai essayé de l'alerter, de manière elliptique."

Jean-Louis Gergorin a lui répété avoir "complètement déraillé à cette époque", avoir été abusé, "impressionné par la confiance qu'avait le général Rondot en Imad Lahoud".

Le géostratège a fait état d'une faute d'orthographe qui attesterait selon lui que c'est l'agrégé de mathématiques et non lui-même qui aurait ajouté certains noms sur les listings.

Considéré par le tribunal comme le "cerveau" de la dénonciation calomnieuse, le polytechnicien a écopé en première instance de 15 mois de prison ferme, moins qu'Imad Lahoud (18 mois de prison ferme).

Les débats dans cette affaire s'étaleront jusqu'au 26 mai.

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