La droite tire à boulets rouges contre Médiapart, à l'origine des accusations les plus dures dans l'affaire Woerth
Estimant l'affaire Woerth close après le démenti partiel de l'ex-comptable de Liliane Bettencourt concernant ses déclarations à Mediapart, la majorité se retourne contre le site d'informations fondé par Edwy Plenel.
"Poubelle du net", "méthodes fascistes", "presse des années 30", "ragots" : la charge, entamée mardi, ne faiblissait pas vendredi.
En déplacement en Croatie, le Premier ministre François Fillon a fustigé vendredi des "justiciers auto-proclamés", une allusion à peine voilée au site Mediapart. "La France est un Etat de droit, en France il y a une justice indépendante, en France on n'a pas besoin de justiciers auto-proclamés", a-t-il dit lors d'une conférence de presse.
Xavier Bertrand avait ouvert le feu, lors d'un meeting mardi soir au côté d'Eric Woerth, en fustigeant les "méthodes fascistes" de Médiapart. Son fondateur Edwy Plenel, ancien journaliste du "Monde", a répondu qu'il poursuivrait le numéro un de l'UMP pour diffamation.
"On ira devant la justice s'expliquer", a riposté Xavier Bertrand jeudi en lançant une nouvelle charge, cette fois contre les méthodes "totalement anti-démocratiques du site".
De son côté, Christian Estrosi a rappellé jeudi devant des journalistes qu'il n'avait "cessé de dire au cours des dernières 48 heures combien (il) dénonçai(t) cette addition de désinformation" faisant penser, selon la formule qu'il martèle à l'envi, à "une certaine presse des années 30".
"Je fais la différence entre l'information et les fantasmes, la presse en général et Mediapart", a ajouté ce proche de Nicolas Sarkozy, comparant aussi ce "site de ragots" à "une véritable poubelle du net".
Sa collègue Nadine Morano avait elle aussi isolé clairement Mediapart dans ses attaques mercredi, en l'accusant de se faire de la "pub" sur le net. Elle a récidivé jeudi pour réduire les révélations du site à une "opération" visant "à renflouer ses caisses".
Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat à l'économie numérique, a ajouté sa voix à ce réquisitoire en estimant que "les méthodes de Mediapart portent atteinte à la crédibilité de l'information en ligne", et lançant à l'intention de Mediapart que "la calomnie sur le net n'est pas un modèle économique !. Eric Besson, lui, a évoqué "les procès de Moscou".
Dans une tribune intitulée "J'accuse", le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre a dénoncé jeudi une "alliance immonde" de l'opposition de gauche avec des "médias aux relents d'extrême droite et de trotskisme" pour faire déferler un "torrent de boue".
Le député UMP des Bouches-du-Rhône Renaud Muselier s'en est pris vivement, jeudi, au journaliste Edwy Plenel qu'il a qualifié de "professionnel de la manipulation" dont le site véhicule "des affabulations calomnieuses et scandaleuses".
Réaction de Mediapart et de ses soutiens
François Bonnet, rédacteur en chef de Mediapart a répondu que Mediapart "maintient l'intégralité de ses écrits". Edwy Plenel a pour sa part déclaré n'avoir jamais connu d'attaques "aussi violentes" et "aussi basses".
Son site a reçu le soutien des éditeurs de services en ligne (Geste), indignés de l'utilisation "injurieuse" de termes "aussi graves que 'méthodes fascistes' ou 'presse des années 30'".
Des partis de gauche, comme Europe Ecologie, se sont élevés contre la violence des attaques visant la presse.
Reporters sans frontières (RSF) a estimé que les efforts de la majorité pour tranformer l'affaire Woerth-Bettencourt en affaire Mediapart sont "rétrogrades" et "ne changent rien au fond du problème."
Transparence international France a estimé dans un communiqué que "les médias ont un rôle essentiel à jouer dans la mise au jour des affaires de corruption."
De son côté, le syndicat de journalistes SNJ-CGT a fustigé des "méthodes inadmissibles qui doivent cesser", pendant que la CFDT-Journalistes dénonçait "une étape supplémentaire dans le dénigrement des médias".
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