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Michèle Alliot-Marie s'est engagée lundi à ne plus monter dans un avion privé tant qu'elle sera ministre

La chef de la diplomatie française est mise en cause pour avoir utilisé l'avion privé d'un ami tunisien, homme d'affaires présenté comme un proche du régime Ben Ali.Michèle Alliot-Marie a fait marche arrière, mardi matin, sur des propos très critiqués qu'elle avait tenus sur le fait de rester ou non ministre quand elle est en vacances.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
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M.Fillon, Mme Alliot-Marie et M.Hortefeux quittent l'Elysée après une réunion sur la Tunisie avec M.Sarkozy (15/01/2011) (AFP/BORIS HORVAT)

La chef de la diplomatie française est mise en cause pour avoir utilisé l'avion privé d'un ami tunisien, homme d'affaires présenté comme un proche du régime Ben Ali.

Michèle Alliot-Marie a fait marche arrière, mardi matin, sur des propos très critiqués qu'elle avait tenus sur le fait de rester ou non ministre quand elle est en vacances.

De nombreuses personnalités de gauche réclament la démission de la ministre des Affaires étrangères, sur la sellette depuis la révolution tunisienne. A propos du vol Tunis-Tabarka, Michèle Alliot-Marie avait reconnu samedi un aller-retour Tunis-Tozeur sur un jet privé le 29 décembre.

Mardi matin, sur Europe 1, Michèle Alliot-Marie s'est justifiée en affirmant que son voyage n'avait rien coûté "ni au budget tunisien, ni au budget français. Ce n'était pas de l'argent public". Par ailleurs, cet ami tunisien qui l'a transportée à bord d'un appareil privé est, selon elle, "une personne qui ne m'a jamais rien demandé. C'est simplement une relation désintéressée et amicale". Mais, a poursuivi la ministre, "je vois, je constate que ça choque" et donc, "il n'est pas question que je remonte dans un avion privé, quelles que soient les circonstances, tant que je serai ministre".

Ministre à temps plein ou pas, MAM rectifie ses propos
Mardi matin, Michèle Alliot-Marie a affirmé lundi que quand on est ministre, "c'est vrai" qu'on l'est "24 heures sur 24 et 365 jours pas an", rectifiant des explications données samedi sur les conditions très critiquées de ses vacances en Tunisie. "Avec le rythme que nous avons, on a besoin de temps en temps de se poser, on a besoin d'être en famille et avec des amis, et à ce moment-là, on oublie la représentation", mais "c'est une erreur, je m'en rends compte maintenant", a-t-elle avoué.

Samedi soir, Michèle Alliot-Marie avait estimé n'avoir rien à se reprocher, dénonçant une exploitation politique. "Quand je suis en vacances, je ne suis pas ministre des Affaires étrangères, je suis Michèle Alliot-Marie", avait-elle affirmé samedi soir à France-Info.

"Avec les trois autres couples d'amis qui étaient avec nous, nous sommes allés dans le désert, il y avait une excursion prévue par M. Miled à laquelle il nous a proposé de nous joindre", a-t-elle affirmé, expliquant avoir voyagé dans ce jet parce que "pour aller de Tabarka à Tozeur il n'y a aucune liaison". Et de conclure alors: "Maintenant je vais être très attentive, je ne sais pas où j'irai passer mes vacances, je pense que je ne quitterai pas la Dordogne si ça continue comme ça."

Un deuxième vol en jet privé
Michèle Alliot-Marie avait fait état d'un vol entre Tunis et la station balnéaire de Tabarka, à bord de l'avion de son ami Aziz Miled, un homme d'affaires tunisien, après les révélations du Canard Enchaîné. A bord du même appareil, Michèle Alliot-Marie a effectué un deuxième vol, un aller-retour vers Tozeur, dans le grand sud tunisien, écrit le Nouvel Observateur.

"J'ai dit au Grand Journal (de Canal+) comme j'ai dit à France 2 que j'avais effectivement, avec mes amis, dont M. Miled, fait d'autres excursions", a dit samedi la ministre des Affaires étrangères à des journalistes qui l'interrogeaient sur ce second vol.

Parmi ces autres excursions, une seule, celle mentionnée par le Nouvel Observateur, a été effectuée en avion, a-t-elle ajouté. Selon le site Mediapart, l'avion utilisé par la ministre, en compagnie de son époux Patrick Ollier, ministre chargé des Relations avec le Parlement depuis novembre 2010, appartenait au beau-frère de Zine Ben Ali, Belhassen Trabelsi, plutôt qu'à Aziz Miled. Le jet est enregistré au nom de la compagnie Karthago Airlines de Belhassen Trabelsi, qui a fusionné en 2008 avec la compagnie d'Aziz Miled, Nouvelair, a écrit vendredi Mediapart.

Aziz Miled est présenté comme un proche du beau-frère du président tunisien déchu, ce que Michèle Alliot-Marie récuse, estimant qu'il est au contraire "une victime" de la belle-famille de Zine El Abidine Ben Ali qui l'a obligé à s'associer avec elle.

Les critiques se multiplient à gauche
Ségolène Royal
a fustigé dimanche sur Europe 1 les "mensonges" de Michèle Alliot-Marie sur ses vacances en Tunisie, estimant qu'il s'agit "d'un nouveau coup porté à la crédibilité de la diplomatie française".

Le député socialiste Jack Lang a jugé dimanche soir "souhaitable que Michèle Alliot-Marie vienne s'exprimer clairement et nettement" sur ses vacances tunisiennes "devant les commissions compétentes de l'Assemblée nationale".

"Lamentable", a rétorqué le chef de file des députés socialistes Jean-Marc Ayrault quand la chef de la diplomatie a fait valoir qu'en vacances, elle n'était pas ministre. "On est toujours ministre de la République, qu'on soit en vacances ou en activité, on ne se met pas entre parenthèses. S'il y avait une crise, elle serait bien obligée de revenir dans le pays", a-t-il estimé sur France Info.

Même le ministre de la Coopération, Henri de Raincourt, tout en estimant que les ministres avaient le droit à la vie privée et au repos, a affirmé que "quand on est membre du gouvernement (...) on l'est évidemment à temps complet".

Quant à Eva Joly, candidate à la candidature à Europe Ecologie, elle estime dans le JDD que "Michèle Alliot-Marie aurait déjà dû démissionner". "Dans les autres démocraties, quand vous êtes pris en défaut, vous démissionnez", observe-t-elle. "En France, on s'accroche au pouvoir! C'est mauvais."

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