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Nicolas Hulot, Capitaine Planète sans ses pouvoirs ?

Son "bilan" est mitigé et il est inconnu sur la scène internationale. Pourtant, François Hollande l'a nommé "envoyé spécial pour la protection de la planète".

Article rédigé par Camille Caldini
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Nicolas Hulot, envoyé spécial pour la protection de la planète, sort de l'Elysée, le 6 décembre 2012. (BERTRAND LANGLOIS / AFP)

POLITIQUE - Nicolas Hulot, le retour. L'animateur écologiste a été nommé "envoyé spécial du président de la République pour la protection de la planète", jeudi 6 décembre. Une mission "internationale, diplomatique", a expliqué Nicolas Hulot. Et "bénévole", ajoute l'Elysée. Mais qu'a fait Nicolas Hulot pour s'attirer ainsi les faveurs de François Hollande ?

Un bilan mitigé

Après Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, c'est donc auprès de François Hollande que "l'hélicologiste", comme le surnomment certains détracteurs, va jouer son "rôle préféré : conseiller du prince", écrit La Croix. Il a déjà enfilé le costume auprès de Jacques Chirac, dont il a gagné l'amitié, au point d'être invité à l'Elysée pour les 74 ans de l'ancien président. Il a su "intéresser Chirac à l'environnement", explique à francetv info Daniel Boy, spécialiste de l'écologie politique au Cevipof. Sans parvenir à influencer sa politique environnementale. Au mieux, l'écologiste médiatique lui aurait-il soufflé cette phrase restée célèbre : "Notre maison brûle et nous regardons ailleurs", prononcée au Sommet de la Terre, en 2002 à Johannesburg (Afrique du Sud).

A son actif, il peut tout de même compter un joli coup politique, avec son Pacte écologique. En menaçant de se présenter à la présidentielle de 2007, il a presque mis à genoux les principaux candidats à l'élection en les poussant à s'engager pour le développement durable. Mais le président Sarkozy a vite oublié le pacte signé par le candidat. La taxe carbone a été enterrée en 2010 et le Grenelle de l'environnement s'est soldé par un bilan très mitigé, rappellent Les Echos. Au bout de seulement trois ans de mandat, Nicolas Sarkozy lâche en plein Salon de l'agriculture que "l'environnement, ça commence à bien faire", comme le racontait Rue89.

Un écologiste controversé

Lorsqu'il s'est par la suite engagé dans la primaire d'Europe Ecologie-Les Verts, Nicolas Hulot a à nouveau essuyé un vilain revers. Car l'ancien animateur a toujours divisé le camp écologiste. D'abord parce qu'il s'est réveillé un peu trop tard, au goût de certains, sur le risque nucléaire. C'est la catastrophe de Fukushima, au Japon, le 11 mars 2011, qui semble lui avoir ouvert les yeux sur ce sujet pourtant cher à EE-LV. "C'est un environnementaliste, son truc, c'était plutôt le réchauffement climatique", explique Daniel Boy.

Les critiques visent aussi la "marque" Nicolas Hulot, les produits dérivés de son émission culte, "Ushuaïa", et sa Fondation pour la nature et l'homme, dont les partenaires sont de grands industriels comme EDF ou L'Oréal. Et les "décroissants", écologistes de l'extrême, ne manquent pas de rappeler qu'il a parcouru des milliers de kilomètres en hélicoptère pour TF1, et même couru un Paris-Dakar, avant de se passionner pour l'environnement.

Sur le plan politique, il a aussi commis une boulette. Lors d'un dîner avec des journalistes, en juin 2011, Nicolas Hulot a confié avoir "pensé pendant un court temps à faire un tandem" avec Jean-Louis Borloo et s'est attiré les foudres d'une partie des responsables EE-LV et des militants, rapporte Le Monde. C'est finalement Eva Joly qui a remporté la primaire. Nicolas Hulot, vexé, a rompu sa promesse de soutenir le candidat Vert pour donner sa voix au Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon, au premier tour de la présidentielle de 2012.

Une étiquette d'expert

Finalement, cette boulette témoigne du positionnement apolitique qu'a toujours revendiqué Nicolas Hulot. Elle lui permet d'être considéré, "à gauche, comme à droite, comme un expert, au dessus des partis politiques", analyse Daniel Boy. Ce qui ne l'empêche pas de "très bien raconter le catéchisme écologiste", ajoute le chercheur. Nicolas Hulot l'a reconnu jeudi, en quittant l'Elysée, ses seules armes sont à présent "[ses] mots et [ses] convictions". Il a d'ailleurs prévenu François Hollande qu'il garderait sa "liberté de parole". Mais sur le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, auquel il est pourtant opposé, il s'est contenté de dire au président "qu'il y avait des investissements plus importants à faire", rapporte Le Figaro.

Nicolas Hulot jouit en prime d'une certaine popularité. Il est la dixième personnalité préférée des Français, selon le baromètre 2012 du Journal du Dimanche, réalisé par l'Ifop. Ce qui fait redouter une simple "opération de communication politique", à Daniel Martin, ancien élu EE-LV, dans une tribune publiée par le Nouvel Obs.

Un inconnu à l'étranger

Malgré ses multiples voyages autour du monde, sa popularité est restée en France. "A l'étranger, Hulot ne pèse rien, mais il peut peut-être se faire sa place", suppose Daniel Boy. D'autant plus que "le circuit classique de la diplomatie internationale environnementale est bloqué et les conférences sur le climat se suivent sans aucun résultat, alors on ne sait pas bien à qui il va s'adresser", déplore l'expert. L'écologiste lui-même ne dit pas autre chose : "La tâche est tellement immense que je me demande par quoi et par quel pays je vais commencer."

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