Furosémide Teva : comment l'affaire s'est dégonflée
Le directeur de l'Agence nationale de sécurité du médicament a annoncé la levée de l'alerte sur le diurétique.
Circulez, il n'y a rien à voir ? L'alerte lancée par l'Agence du médicament (ANSM) pour une possible erreur de conditionnement de boîtes de diurétique Furosémide, suspectées de contenir du somnifère, est levée, a annoncé jeudi 20 juin sur Europe 1, Dominique Maraninchi, directeur général de l'ANSM. Cette annonce intervient douze jours après le rappel des boîtes de ce diurétique des laboratoires Teva. Un remplacement du médicament par un somnifère avait été repéré et des lots rappelés. "Sur 70 000 comprimés examinés, nous n'avons trouvé aucun échange. Les investigations continuent", a-t-il indiqué.
"Le Furosémide n'est pas un médicament anodin, il y a danger si les malades ne le prennent pas", a déclaré Dominique Maraninchi. "Toutes les hypothèses sont permises mais c'est un phénomène isolé, c'est le plus important. La justice est en cours, on verra ce que donne l'enquête", a-t-il ajouté. Comment l'"affaire Furosémide" s'est-elle dégonflée ? Réponses en trois actes.
Acte 1 : un pharmacien donne l'alerte
L'alerte a été donnée le 7 juin par un pharmacien de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) : une patiente traitée au Furosémide se plaint d'une somnolence inhabituelle à son pharmacien. Et pour cause, dans la boîte censée contenir le diurétique qu'elle a rapporté, elle a retrouvé un somnifère. La préparatrice en pharmacie a même trouvé un second comprimé de ce somnifère, du Zopiclone, dans une plaquette.
A la suite de cette découverte, deux lots du médicament font l'objet d'une mesure de rappel. Les patients concernés sont appelés à interrompre leur traitement et à ramener les plaquettes dans leur pharmacie.
Mais tout s'emballe le lendemain, samedi 8 juin : on apprend alors la mort d'un nonagénaire marseillais, soigné avec le diurétique de Teva. A-t-il été victime de l'inversion de médicaments, suspectée chez la cliente du pharmacien breton ? Par mesure de précaution, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, annonce l'ouverture d'une enquête de l'ANSM.
Acte 2 : le temps des enquêtes
L'ANSM diligente quatre inspecteurs sur le site de conditionnement du médicament, à Sens (Yonne). Une perquisition y est menée. A ce stade, le mauvais conditionnement du Furosémide Teva 40mg est suspecté d'avoir coûté la vie à trois personnes et d'avoir provoqué l'hospitalisation de deux autres. Les inspecteurs ouvrent les boîtes une par une, mais ne relèvent aucune "anomalie majeure", annonce l'agence le 12 juin.
Le même jour, le parquet avait pour sa part annoncé l'ouverture d'une enquête préliminaire, notamment pour "tromperie aggravée", ainsi que pour "homicides et blessures involontaires". En parallèle, des enquêtes relatives aux trois décès considérés comme suspects ont été ouvertes à Marseille, Toulon et Toulouse.
Quant au pôle santé de Paris, il a confié l'enquête à l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp) et à la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN).
L'inspection des boîtes démontrant que l'inversion des médicaments est un cas probablement isolé, l'hypothèse de la malveillance est évoquée.
Acte 3 : vers la clôture du dossier ?
L'alerte lancée le 8 juin pour cette possible erreur de conditionnement s'est terminée jeudi 20 juin. Aucune inversion médicamenteuse n'a été détectée à ce jour, déclare le président de l'Agence nationale de sécurité du médicament. L'ANSM a examiné, sous contrôle d'huissier, plus de 2 300 boîtes (soit plus de 70 000 comprimés) de Furoméside Teva. "Il faut rassurer les patients, c'est fin d'alerte", a déclaré le président de l'agence, Dominique Maraninchi, sur Europe 1. Ils "peuvent et doivent continuer leur traitement".
"Les analyses qu'on a faites sous contrôle de la police n'ont pas montré à ce stade de comprimé qui soit suspect. (...) Donc je dis fin de l'alerte, poursuite des investigations", a-t-il ajouté. Selon lui, l'inversion médicamenteuse à l'origine de l'alerte est "un phénomène isolé".
Le pharmacien de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) qui a donné l'alerte a affirmé jeudi, dans Le Parisien-Aujourd'hui en France, être "sûr de son témoignage". Il a par ailleurs indiqué que la patiente qui lui avait ramené la boîte contenant du Zopiclone prenait également ce somnifère régulièrement.
Le Parisien cite des sources proches de l'enquête qui s'interrogent sur une possible confusion lors de l'examen des comprimés dans la pharmacie, et une erreur d'interprétation de bonne foi. Les policiers se posent des questions à la suite de sept décès suspects de personnes âgées, mais ils ont aussi des doutes sur la réalité d'un lien entre la prise des médicaments et la mort de ces patients.
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