Paris 2024 : Valentina Petrillo, une première athlète transgenre aux Paralympiques malgré les critiques

Pour vivre son rêve paralympique de la meilleure façon possible, l'Italienne Valentina Petrillo peut compter sur le soutien de l'association où elle s'entraîne, l'ASD Omero Bergamo, qui affronte la tempête médiatique avec son athlète.
Article rédigé par Simon Bardet
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 4 min
Valentina Petrillo après son 400 m lors des Mondiaux de para-athlétisme, le 13 juillet 2023 à Paris. (DAVID WINTER / SIPA)

Un rêve qui commence à virer au cauchemar. Agée de 50 ans, Valentina Petrillo souhaitait par-dessus tout participer à la grande fête paralympique une fois dans sa vie. Elle sera là à Paris (du 28 août au 8 septembre), mais depuis plusieurs jours, l'athlète italienne est la cible d'une nuée de critiques. La raison ? Sur la piste du Stade de France, elle sera la première transgenre à participer aux Jeux paralympiques, sur 200 m et 400 m. "Nous souhaitons simplement qu'elle soit heureuse et satisfaite d'avoir réalisé cet objectif paralympique", la défend Dario Merelli, représentant de l'ASD Omero Bergamo.

Valentina Petrillo (en bleu) remporte sa série du 200 m lors des Mondiaux de para-athlétisme, le 16 juillet 2023 à Paris. (DAVID WINTER / SIPA)

Cette association sportive bergamasque pour malvoyants, située dans un quartier calme, en face du parc des frères Locatelli, a accueilli Valentina Petrillo en 2020, deux ans après le début de sa transition et de sa thérapie hormonale. "Avant, elle concourait en tant qu'homme dans une autre association basée à Ferrara. Elle est venue nous voir pour nous demander de participer aux compétitions en tant que femme. La fédération nous a dit que les lois autorisaient cette transition. On a donc accepté la requête de Valentina", détaille Margherita Paciolla, athlète et représentante des sportifs au sein de l'association.

"Nous voulions absolument éviter toute forme de discrimination. Les malvoyants connaissent malheureusement trop bien ce problème, et nous ne voulions pas que Valentina vive ça."

Dario Merelli, représentant de l'ASD Omero Bergamo

à franceinfo: sport

L'arrivée de celle qui souffre du syndrome de Stargardt [une maladie ophtalmique rare généralement caractérisée par une perte progressive de la vision] depuis ses 14 ans n'a pas été simple à gérer pour l'ASD Omero Bergamo. Au sein même de l'association, tous ne soutenaient pas l'arrivée de Fabrizio, ex-membre de l'équipe nationale de foot à 5 sur les tartans italiens, sous le prénom de Valentina. "Une partie de notre association a beaucoup critiqué la décision de Valentina, se souvient Margherita Paciolla, car même si ses examens médicaux et son taux de testostérone pouvaient lui permettre de concourir, elle a la corpulence physique d'un homme. Par exemple, si vous voyez Valentina en compétition contre moi, la structure physique est complètement différente. Les gens qui n'ont pas les connaissances médicales et qui ne connaissent pas les lois peuvent penser que la décision de [laisser concourir] Valentina n'est pas correcte."

Affronter la tempête médiatique

L'association lombarde a également dû essuyer de nombreuses pressions venues de l'extérieur. "En tant que représentante des athlètes, j'ai fait face à beaucoup de critiques, regrette Margherita Paciolla. Et nous avons été dérangés par les journalistes, qui voulaient interroger nos athlètes. Autant Valentina est libre de raconter son histoire, autant les autres ont la consigne de rester à l'écart de ça." Dario Merelli ajoute que les problèmes existent encore : "Nous recevons des mails et des messages discriminatoires, affirmant que les personnes transgenres devraient concourir dans d'autres catégories. Mais ce n'est pas nous qui établissons les règlements."

"Nous sommes prêts à être critiqués et nous sommes en mesure de répondre parce que nous ne faisons rien d'illégal. Nous permettons simplement à ceux qui ont le droit, en vertu des règlements internationaux, de participer à la compétition."

Dario Merelli, représentant de l'ASD Omoro Bergamo

à franceinfo: sport

Le Comité international paralympique autorisant sa présence, Valentina Petrillo – qui s'est passionnée pour l'athlétisme après la victoire de Pietro Mennea sur 200 m aux Jeux de Moscou en 1980 – tentera de briller à Saint-Denis. Pour son association, les attentes restent mesurées, malgré les deux médailles de bronze obtenues aux Mondiaux 2023 sur 200 m et 400 m. "Nous n'attendons pas d'elle des résultats majeurs, car nous savons qu'il y a des femmes plus fortes qu'elle sur la scène internationale", tranche Dario Merelli. "Valentina court très bien, mais aux Paralympiques, le niveau est très élevé. Il faudra aller très vite pour gagner une médaille. Par exemple, la Cubaine Omara Durand est très forte comparé à Valentina", poursuit la représentante des athlètes de l'association.

"La vie est un cadeau"

Pour Valentina Petrillo, qui s'est confiée au Comité paralympique italien, "la vie est un cadeau, nous devons l'honorer et tirer le meilleur parti de toutes les possibilités qui s'offrent à nous. Surtout, personne ne peut nous enlever le droit de rêver." Et ce, même si ce rêve est éphémère, ce qu'envisage l'ASD Omero Bergamo. "Il est probable que Valentina ne puisse concourir qu'à Paris chez les femmes. Aux Jeux olympiques, ce n'est pas autorisé, et même si les Jeux paralympiques le font encore, je pense que ce sera la dernière année", prédit Dario Merelli. S'il dit vrai, et "si dans le futur les règles évoluent, on s'adaptera à ce changement", promet Margherita Paciolla. Valentina Petrillo, quant à elle, aura déjà pu vivre son rêve.

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