Paralympiques 2024 : énorme bosseur, Breton pur jus, sérénité à toute épreuve... Qui est Alexandre Léauté, médaillé d'or sur la poursuite ?

Le coureur de 23 ans, star annoncée de la délégation française en paracyclisme, a fait vibrer le vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines, vendredi.
Article rédigé par Clément Mariotti Pons
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Alexandre Léauté peut exulter : vendredi 30 août, au Vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines, lors des Jeux paralympiques de Paris, il a remporté l'or en finale de la poursuite individuelle 3 000 m (catégorie C2). (LECOCQ CEDRIC / KMSP)

"Je n'ai jamais été aussi fort." Ce n'est pas faute d'avoir prévenu. La phrase prononcée par Alexandre Léauté, tout juste une semaine avant sa première épreuve lors des Jeux paralympiques de Paris, résonne avec beaucoup plus de force. Vendredi 30 août, dans la chaleur du vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines, l’as du paracyclisme tricolore a brillamment défendu sa couronne acquise à Tokyo sur la poursuite individuelle (catégorie C2). Un deuxième sacre paralympique – et une cinquième médaille en carrière – à 23 ans, et sans doute plus encore d'ici la fin des Jeux le 8 septembre. Assez pour faire de lui l'une des stars françaises dans la capitale.

"Un monstre de travail"

Son 5e record du monde battu dès les qualifications en fin de matinée ce vendredi – alors que ses concurrents des autres séries se disputaient le record paralympique, avant de finir à plus de trois secondes du cycliste tricolore (!) – a tout de suite mis les choses au clair. Oui, Alexandre Léauté survole sa catégorie. Et pour Laurent Thirionet, manager de la performance de l'équipe de France de paracyclisme, même si cela semble une évidence, c'est un état de fait qu'il ne doit qu'à son travail.

"Je l'ai vu se métamorphoser, explique-t-il. A Tokyo, c'était un gamin, aujourd'hui c'est un homme. C'est un athlète extraordinaire avec une musculature hors norme. Mais c'est surtout un énorme bosseur, un monstre de travail. Il ne fait que ça tous les jours, que ce soit en salle de musculation, en s'entraînant sur la route, sur la piste... Aujourd'hui, s'il est le numéro un, c'est grâce à ça. Il travaille plus que les autres."`

Paralympiques 2024 - Cyclisme : intraitable, Alexandre Léauté conserve sa couronne
Paralympiques 2024 - Cyclisme : intraitable, Alexandre Léauté conserve sa couronne Paralympiques 2024 - Cyclisme : intraitable, Alexandre Léauté conserve sa couronne (Paralympiques 2024 - Cyclisme : intraitable, Alexandre Léauté conserve sa couronne)

"Sa plus grosse force, c'est son exigence envers lui-même et l'intérêt qu'il porte à son projet, confirme l'entraîneur des Bleus du paracyclisme Mathieu Jeanne. Il est proactif et n'hésite pas à tenter des choses, à aller se tester en division nationale avec des valides... C'est la marque d'un gros caractère et de quelqu'un qui sait ce qu'il veut."

Un handicap difficile à classifier

Les discussions qu'il pouvait y avoir il y a quelques années sur l'iniquité dans sa catégorie – certains de ses adversaires étant unijambistes, ce qui n'est pas le cas du Français – n'existent plus, à en croire Laurent Thirionet. "Il a été battu par ces athlètes-là, et aujourd'hui il les bat", précise-t-il.

L'hémiplégie d'Alexandre Léauté lui complique la vie, notamment pour plier et tendre sa jambe droite. Elle affecte aussi le haut de son corps, à l'instar de sa main et de son bras, nécessitant une poignée particulière sur le vélo. Les médecins, neurologues et autres spécialistes du monde médical faisant partie du panel de classificateurs internationaux ont estimé que la spasticité dont sa jambe était atteinte était équivalente à un unijambiste qui pédale avec une seule jambe sans résistance mécanique de l'autre côté.

Une sérénité à toute épreuve

Quand on l'interroge sur son statut de star, et notamment sur la comparaison que certains font entre lui et Léon Marchand, quadruple médaillé d'or lors des JO il y a quelques semaines, son sourire s'illumine. "Ça me fait toujours rire ! Mais ça ne me plaît pas trop, confesse le principal intéressé. Il a fait quelque chose de grandiose, il est posé, je l’admire. Mais Alexandre Léauté va réaliser de grandes choses, j’espère qu'on se rappellera de moi parce que j’ai marqué l’histoire, pas parce que lui l’a fait."

Paralympiques 2024 - Cyclisme : médaille d'or, Marseillaise à l'unisson, Alexandre Léauté est sur un nuage

Réservé dans la vie, Alexandre Léauté est un exemple de sérénité, qui tranche avec sa férocité une fois les pieds sur les pédales. Quant à la pression, elle semble glisser sur lui. "Je ne me rends pas compte, je viens de Loudéac (Côtes-d'Armor) à la base ! Je n'ai pas de pression. Si je suis une tête d’affiche tant mieux, sinon tant pis. Pas de souci si on me met ça sur les épaules, je peux faire avec."

Un champion qui joue collectif

Il suffisait de le voir sauter dans les bras de ses "potes" de l'équipe de France, Kévin Le Cunff et Thomas Peyroton-Dartet, à peine descendu de la selle, pour comprendre l'importance qu'il attache à ses coéquipiers. Sous le feu des projecteurs, Alexandre Léauté n'oublie jamais d'avoir un mot pour celles et ceux avec qui il partage le plus clair de son temps à l'entraînement.

"Il y a une vraie dynamique dans cette équipe. Le staff annonce 25 médailles sur ces Jeux à Paris, je ne sais pas si on se rend compte ! C'est énorme, tous les coureurs français sont des stars car on peut tous prétendre au titre. Je suis le premier à supporter tout le monde. On se retrouve à l'hôtel à la fin des compétitions, un truc s'est créé entre nous."

Un fier représentant de la Bretagne

Les drapeaux bretons exhibés un peu partout, vendredi 30 août, dans les tribunes du vélodrome national, donnaient un léger indicateur de ce que représente Léauté pour toute une région. "Une fierté, un champion à l'échelle mondiale", glissait il y a encore quelques heures le maire de Saint-Caradec, la ville où il a grandi, dans Ouest-France. Et le champion paralympique n'a pas oublié d'où il vient : pour ses débuts à Paris, il avait fait affréter deux bus de supporters pour venir l'encourager. Des fans qui ont pris la route à trois heures du matin pour être à ses côtés.

Paralympiques 2024 : le village breton de Saint-Caradec est venu soutenir Alexandre Léauté
Paralympiques 2024 : le village breton de Saint-Caradec est venu soutenir Alexandre Léauté Paralympiques 2024 : le village breton de Saint-Caradec est venu soutenir Alexandre Léauté (France 2)

"Je n'ai pas pris beaucoup de plaisir sur le vélo, c'était surtout de la douleur extrême, mais que tout le monde ait pu m'encourager comme ça, c'était très chouette", expliquait-il, la médaille autour du cou. Une médaille qu'il ira, une fois les Jeux terminés, présenter sans aucun doute sur ses terres bretonnes.

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