Jeux paralympiques - Une vie d’athlète en manga : Sonia Heckel, la boccia comme équilibre de vie face à la maladie
Avant les Jeux paralympiques, franceinfo : sport dresse le portrait de six athlètes français prêts à briller à Tokyo. Atteinte d’une maladie génétique évolutive, Sonia Heckel représentera la France en boccia, pour une participation inédite.
Elle a déjà marqué l'histoire de son sport. Sonia Heckel, athlète nancéienne de 32 ans, fait partie de la première équipe de France de boccia, discipline apparentée à la pétanque et pratiquée par un public atteint d'un handicap lourd, qualifiée aux Jeux paralympiques. Bien que ce sport ait été intégré au programme paralympique en 1984, la France n'était jamais parvenue à se qualifier avant Tokyo. C'est désormais chose faite pour la discipline qui a fait ses débuts en 2007 dans l'Hexagone.
Partie de Paris pour Tokyo le 20 août, Sonia Heckel aura ainsi pour mission de représenter la France à l'épreuve par équipe de boccia. "C'est une grande fierté pour moi et surtout d'intégrer cette première équipe de France paralympique. J'espère aussi faire découvrir mon sport, encore peu connu, au plus grand nombre", se réjouit la Nancéienne. Une occasion pour elle aussi d'ajouter un podium paralympique à ses trois titres de championne de France et à son titre européen par équipes en 2019, et marquer ainsi un peu plus l'histoire de la boccia en France.
Maladie génétique rare
Sur et en-dehors des terrains, Sonia Heckel est une battante. Depuis plus de vingt ans, elle lutte contre la myopathie des ceintures, une maladie génétique rare des muscles qui se traduit par un affaiblissement et une atrophie de ceux-ci. Cette maladie ne s'est pas révélé dès la naissance chez elle et sa sœur jumelle Anaïs, elle aussi touchée par la même myopathie. "Quand nous étions petites, nous pouvions marcher, courir, monter les escaliers normalement. Mais au fur et à mesure, ma sœur et moi avons eu les premiers symptômes vers quatre ou cinq ans. On tombait souvent, on marchait sur la pointe des pieds... ", raconte-t-elle.
Ce n'est que vers l'âge de sept ans que les médecins s'interrogent sur ces symptômes anormaux et persistants. Les deux sœurs réalisent alors des examens mais le verdict tombe trois ans plus tard. Si la détection a été longue, c'est notamment parce que la myopathie des ceintures est très rare. Elle ne toucherait, d'après les chiffres de l'association AFM-Téléthon, qu'environ cinq à six personnes sur 1 million.
Anaïs est la première à se retrouver en fauteuil roulant en juillet 2002. "Quand j'ai vu que ma sœur était en fauteuil, j'ai tout fait pour essayer d'éviter ce qui m'attendait aussi. Ma sœur s'était blessée au niveau de la jambe, ce qui l'a immobilisée pendant plusieurs semaines, et cette immobilisation des muscles a été irréversible", explique Sonia. Alors, elle décide de rester très active, de marcher plusieurs heures par jour afin de tenter de contrer l'inévitable.
Une découverte de la Boccia au collège
"Mais en voulant éviter d'être en fauteuil, j'ai trop usé mes muscles et ça a eu le même effet. Au fur et à mesure, j'ai perdu totalement leur usage", se rappelle-t-elle. Quatre mois plus tard, Sonia, impuissante face à son corps qui lui échappe, est à son tour contrainte de se déplacer en fauteuil roulant. Un coup dur pour les jumelles qui, avec le temps, ont fait ensemble de cette épreuve une force. "Vivre cette situation à deux nous a aidées à affronter les choses, on a été solidaires", souligne Sonia.
Si elles se sont beaucoup entraidées au quotidien, elles sont aussi restées soudées pour affronter le regard des autres, notamment à l'école. "Quand les premiers symptômes sont apparus, personne ne savait ce que nous avions, même pas nous. Les parents d'élèves ont commencé à dire à leurs enfants de ne pas nous approcher, par crainte d'être contaminé", confie Sonia.
Pour pouvoir suivre un cursus normal au collège, Sonia intègre alors un établissement scolaire adapté à son handicap. C'est à ce moment-là, en 2007, qu'elle découvre la boccia, en cours d'EPS. "La boccia faisait ses débuts en France. Au départ, on jouait sans vraiment connaître les règles, sans stratégie ni réflexion autour du jeu. Et pour être honnête, ça ne me plaisait pas forcément", raconte-t-elle.
Pourtant, son professeur de sport remarque sa bonne aptitude à la discipline et lui propose d'intégrer, en 2009, le groupe France alors en recherche de talents. "J'ai accepté pour essayer. Et à partir de cet instant, on a commencé à pratiquer ce sport en s'appuyant sur la stratégie. Et ce côté-là m'a tout de suite beaucoup plu", raconte celle qui aborde chaque entraînement ou compétition avec passion depuis près de quinze ans. Car une fois sur le terrain, Sonia entre dans sa bulle et oublie tout ce qui l'entoure.
"La boccia est un sport très cérébral, donc quand je joue, j'oublie le handicap, j'oublie tout."
Sonia Heckel, joueuse de l'équipe de France de Bocciaà franceinfo: sport
Tout sauf son assistant, Florent, qui est toujours à ses côtés sur le terrain. "Il est mon meilleur ami, mon frère, la deuxième partie de moi", précise Sonia. En boccia, plusieurs catégories permettent d'avoir un assistant, qui a pour rôle d'être les mains du joueur et d'agir sur les consignes de l'athlète. Les assistants n'ont pas le droit de regarder le jeu, ni d'aider l'athlète sur la stratégie.
Dégradation de sa maladie
En 2014, Sonia doit faire face à un nouveau coup dur. Sa maladie s'aggrave et elle perd la quasi-intégralité de sa mobilité au niveau des bras. Conséquence : elle doit changer de catégorie. "J'ai dû tout reprendre à zéro, se rappelle la jeune femme. C'était dur de devoir se refaire une place dans son sport, mais surtout, il s'agit d'une nouvelle épreuve car on reçoit en plein figure l'évolution de sa maladie. Je passais de la catégorie avec le handicap le plus faible, à celle où le handicap était le plus important." Si elle lançait auparavant la balle avec la main, elle doit à présent apprendre à jouer avec une rampe de lancement et un "pointeur", une sorte de baguette fixée sur la tête ou maintenue dans la bouche. Celui-ci permet ainsi de lancer la balle dans la rampe.
Cette nouvelle épreuve de la vie a renforcé encore plus son tempérament de battante. "La maladie m'a rendu plus forte", poursuit Sonia, dont la maladie s'est stabilisée depuis deux ans. "Malgré mon handicap lourd, j'ai vraiment une vie épanouie grâce au sport. Je participe à des déplacements sportifs avec l'équipe de France, je rencontre du monde, je vis des moments intenses de vie. Sans le sport, je ne serai pas aussi heureuse ni aussi bien dans ma vie quotidienne", ajoute Sonia. À Tokyo cet été, une nouvelle aventure de vie va s'ouvrir à elle, sous le regard attentif de toute une nation.
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